distinction particulière, attachées à son service personnel) et lui ordonna d’avertir de tout cela la mère abbesse et de faire ensuite avec la tourière comme avec Agnese les arrangements convenables. Elle congédia celle-ci, salua le gardien et retint Lucia. Le gardien accompagna Agnese jusqu’à la porte, lui donnant de nouvelles instructions, et s’en fut préparer sa lettre à son ami Cristoforo sur tout ce qui venait d’être fait. « Singulière tête que cette signora ! pensait-il en marchant. Quelque chose de curieux, par ma foi ! Mais qui sait la prendre lui fait faire tout ce qu’il veut. L’ami Cristoforo ne s’attend certainement pas à ce que je l’aie servi si vite et si bien. Ce brave homme ! Il n’y a pas moyen ; il faut toujours qu’il se mette quelque besogne sur les bras ; mais il le fait pour le bien. Heureusement pour lui cette fois qu’il a trouvé un ami qui, sans tant de bruit, tant d’appareil, tant de mouvement, a mené l’affaire à bon port dans un clin d’œil. Il sera content, ce bon Cristoforo, et il verra que nous aussi, dans notre pays, nous sommes bons à quelque chose. »
La signora qui, en présence d’un vieux capucin, avait un peu étudié ses manières et ses paroles, lorsqu’elle fut ensuite restée seule avec une jeune villageoise sans expérience, ne songea plus autant à se contenir ; et ses discours devinrent peu à peu si étranges qu’au lieu de les rapporter, nous jugeons plus à propos de raconter brièvement l’histoire antérieure de cette infortunée, c’est-à-dire ce qu’il en faut pour expliquer ce que nous avons vu en elle de mystérieux et d’insolite, et pour faire comprendre les motifs de sa conduite dans ce qui arriva plus tard.
Elle était la dernière fille du prince de ***, grand seigneur milanais, qui pouvait être compté parmi les plus riches de la ville. Mais la haute idée qu’il avait