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DONATELLO.

simple qu’elle soit, n’est dépourvue d’une merveilleuse complexité. Ici, c’est le triomphe de cette aptitude singulière à éprouver et à exprimer plusieurs sentiments à la fois. Le plus âpre humour vient mêler sa note aux tendresses, comme aux déchirements.

Telle est, sans doute, la secrète raison pour laquelle les statuaires modernes, et, en général, tous les artistes de notre temps révèrent en Donatello leur patron et celui qui, tout en leur ayant ouvert les voies, s’est avancé plus loin qu’eux tous. C’est à lui, en grande partie, que l’art rajeuni dut ses plus belles arrière-pensées. En Phidias, il fallait voir le plus puissant et le plus pur créateur de formes sereines ; en Donatello surgit un créateur inattendu de formes agitées. Ce fut lui qui introduisit, le plus éloquemment de tous, le tourment dans l’œuvre d’art, et, désormais, il fut impossible de le bannir de toute conception qui n’était pas de pure grâce ou de simple agrément.

Aussi, voyez quelle riche et superbe lignée ! On peut dire que tous les grands sculpteurs italiens qui viennent immédiatement après lui sont hantés de lui, et que ceux même qui ont la personnalité la plus tranchée lui rendent plus ou moins volontairement hommage.

Chez les uns, cette influence se tempère d’une naturelle douceur, comme chez Desiderio da Settignano ou comme chez Mino da Fiesole ; chez les autres, elle s’enrichit d’une capricieuse et nerveuse originalité, comme chez Agostino di Duccio ; chez d’autres enfin, comme Verrocchio, un des