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DONATELLO.

en dehors de la liberté des allures et de la franchise du langage. Nous ne saurions nous reconnaître trop heureux de posséder au Louvre ce grave et précieux panneau, où l’Uccello représenta « Giotto, peintre, comme rénovateur et flambeau de l’art, Filippo di Ser Brunelleschi pour l’architecture, Donatello pour la sculpture, lui-même pour la perspective et la figuration des animaux, et pour les mathématiques Antonio Manetti, son ami, avec qui il avait de fréquents entretiens sur la géométrie d’Euclide ». Ce sont ces choses qui font revivre, pour les imaginatifs, toute la flamme d’une époque. Mais il faut, pour bien reconstituer ces temps et ces hommes privilégiés, avoir le talent d’un Marcel Schwob et pouvoir écrire les « Vies imaginaires » de tels artistes. Vous représentez-vous ces entretiens où le savoir le plus grave alterne avec les plus truculentes blagues ? Ne vous attendrissez-vous pas sur cet hommage que Paolo adresse à ses contemporains illustres et à lui-même, à cette espèce de retable intellectuel qu’il peint pieusement et conserve comme un tableau d’autel dans son pauvre logis, humble sanctuaire de pensée ?

Dans ce portrait, Donato apparaît avec des traits réguliers, pleins de franchise, une bonne barbe raide d’ouvrier, des yeux gros et limpides, toute une simplicité qui, par le contraste, rend encore plus grandioses les rêves et les lièvres que l’artiste cristallise, qui semblent être sortis tout bouillonnants de ce cerveau, pour s’arrêter soudain dans la matière, sous le miracle d’un geste créateur.