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POÈMES DRAMATIQUES.

qui, dans son abaissement, n’a plus de force que pour mordre la poussière et le sable ? Personne… Et maintenant, c’est moi-même qui le dis, je suis un envieux ; oui, j’envie profondément, cruellement. Ô ciel ! où donc est ta justice, quand le don sacré, le génie immortel, n’est pas envoyé en récompense de l’amour brûlant, de l’abnégation, du travail, de la patience, des supplications enfin, mais quand il illumine le front d’un viveur insouciant ! Ô Mozart ! Mozart !… (Entre Mozart.)

Mozart.

Ah ! tu m’as aperçu ? Et moi qui voulais te surprendre, te régaler d’une plaisanterie inattendue.

Salieri.

Te voilà ! Es-tu ici depuis longtemps ?

Mozart.

Je ne fais qu’entrer. Je venais chez toi pour te montrer quelques morceaux, lorsque, passant devant un cabaret, j’entendis un violon. Non, ami Salieri, tu n’as jamais rien entendu d’aussi drôle. Un violonneux aveugle jouait dans ce cabaret : Voi che sapete. C’était char-