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LE COLLAGE

tion impossible lui venaient. Que ne pouvait-il se transporter rapidement aux points les plus opposés, contempler à la fois les Buttes-Chaumont, les Halles, le jardin du Luxembourg, courir en un clin d’œil de la barrière du Trône aux Champs-Élysées ! Puis, entre les grands vols de son désir, il se sentait attiré vers d’innombrables particularités. Que pouvait bien avoir inventé le Grand-Hôtel ? Les magasins du Louvre devaient être joliment curieux à voir ! Il eût voulu passer au boulevard Magenta, devant les fenêtres de son ancien patron : le vieux drôle, un gredin sournois et avare, n’avait pas dû se mettre en frais, même d’un drapeau de vingt-cinq sous, ni d’un lampion.

Au milieu de ces divers picotements de curiosité, malgré une ivresse croissante, quelque chose, comme une force inconsciente, le rapprochait toujours de Montmartre. Certes, il faisait détours sur circuits, prenant parfois par une rue plus embrasée que les autres, s’arrêtant ici pour écouter une musique d’amateurs, là pour joindre sa voix aux voix d’un orphéon chantant. Mais il revenait quand même sur ses pas, montait vers son ancien quartier. Il avait un but. Toute cette joie publique, c’était bien ! Mais ces citoyens heureux avaient auprès d’eux leur femme et leurs enfants ; au jour, qui n’allait pas tarder à se lever, quand ils voudraient se reposer, ceux-là rentre-