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DU GOUVERNEMENT DE LA DÉMOCRATIE.

éloges à cette portion de la Constitution qui accorde au pouvoir exécutif la nomination des juges, ajoute : « Il est probable, en effet, que les hommes les plus propres à remplir ces places auraient trop de réserve dans les manières, et trop de sévérité dans les principes, pour pouvoir jamais réunir la majorité des suffrages à une élection qui reposerait sur le vote universel. » (Kent’s Commentaries, v. I, p. 272.) Voilà ce qu’on imprimait sans contradiction en Amérique dans l’année 1830.

Il m’est démontré que ceux qui regardent le vote universel comme une garantie de la bonté des choix, se font une illusion complète. Le vote universel a d’autres avantages, mais non celui-là.



DES CAUSES QUI PEUVENT CORRIGER EN PARTIE CES

INSTINCTS DE LA DÉMOCRATIE.

Effets contraires produits sur les peuples comme sur les hommes par les grands périls. — Pourquoi l’Amérique a vu tant d’hommes remarquables à la tête de ses affaires il y a cinquante ans. — Influence qu’exercent les lumières et les mœurs sur les choix du peuple. — Exemple de la Nouvelle-Angleterre. — États du Sud-Ouest. — Comment certaines lois influent sur les choix du peuple. — Élection à deux degrés. — Ses effets dans la composition du sénat.


Lorsque de grands périls menacent l’État, on voit souvent le peuple choisir avec bonheur les citoyens les plus propres à le sauver.

On a remarqué que l’homme dans un danger pressant restait rarement à son niveau habituel ; il s’élève bien au-dessus, ou tombe au-dessous. Ainsi arrive-t-il aux peuples eux-mêmes. Les périls extrêmes, au lieu