lui avaient obtenu la faveur populaire. Son genre de talent allait, d’ailleurs, au goût du peuple. J’ignorais qu’une demi-heure auparavant, il avait préconisé la république au milieu d’une assemblée de journalistes et de députés réunis dans un des bureaux de la Chambre. Je l’aperçus debout à son banc, je fendis la foule et, arrivé jusqu’à lui : « Nous périssons, lui dis-je à voix basse et à la hâte ; vous seul en ce moment suprême pouvez vous faire écouter ; montez à la tribune et parlez. » Je crois encore le voir à l’instant où j’écris ces lignes, tant sa figure me frappa. Je vois sa longue taille droite et mince, son œil tourné vers l’hémicycle, son regard fixe et vacant, absorbé dans une contemplation intérieure plus que dans la vue de ce qui se passait autour de lui. Au bruit de mes paroles, il ne se retourna pas vers moi, mais se borna à étendre le bras vers la place où se tenaient les princes, et répondant à sa pensée plus qu’à la mienne : « Je ne parlerai point, me répliqua-t-il, tant que cette femme et cet enfant seront là. » Je ne lui demandai rien de plus ; j’en savais assez ; je regagnai mon banc, et, passant au centre droit près du siège où étaient assis Lanjuinais et Billault : « Est-ce que vous ne voyez pas quelque chose que nous puissions faire ? » leur dis-je. Ils firent tristement le signe que non ; et je continuai ma route.
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