Page:Alfieri - De la Tyrannie.djvu/185

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jeter à l’envi aux pieds du tyran, le flatter, l’honorer, le défendre et tendre une tête soumise à son joug infâme ; et quel est le but de ce pacte affreux ? si ce n’est celui de redoubler les liens du peuple malheureux et innocent, auprès duquel, pour parvenir à leurs intentions criminelles, ils deviennent, avec une adresse perfide, les ardens propagateurs de toute espèce d’ignorance funeste.

Et poussant plus loin cette différence très-importante, qui existe entre la partie des esclaves, qui, sous la tyrannie, se fait instrument d’oppression, et cette autre partie qui en devient la victime sans savoir pourquoi, j’ose avancer une assertion qui paraîtra peut-être invraisemblable à plusieurs, mais que je crois cependant fondée sur la vérité. La voici : c’est que de la fidélité même, de l’aveuglement et de la grande opiniâtreté, avec lesquels les peuples défendent leur tyran, on peut tirer la juste conséquence qu’ils feraient autant et plus d’efforts pour leur liberté, si, dès leur berceau, au lieu du nom de tyran, on leur eût appris à révérer religieusement, et comme une chose sacrée, le nom de la république.

Le vice donc de la tyrannie comme le plus