Page:Alfieri - De la Tyrannie.djvu/190

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et qu’il eût conçu la sublime pensée de sacrifier sa propre vie, et plus encore sa renommée, pour éteindre, en peu de temps et sûrement la tyrannie, il n’aurait pas d’autres meilleurs moyens à prendre que de conseiller au tyran à jouir tellement de sa puissance, à seconder et à enflammer tellement sa nature tyrannique, qu’il vienne à s’abandonner aux excès les plus atroces, afin de rendre tout-à-la-fois, sa personne et son autorité odieuses et insupportables. Et je dis expressément ces trois paroles, sa personne, son autorité, odieuses à tous, parce que tout excès privé du tyran ne nuirait qu’à lui-même ; mais tout excès public, ajouté aux excès particuliers, excitant également la fureur universelle et particulière, nuirait également à la tyrannie et au tyran, et inspirerait peut-être la résolution de détruire entièrement l’un et l’autre. Ces moyens que je reconnais moi même pour infâmes et atroces, seraient indubitablement, cependant comme ils l’ont toujours été, les moyens les plus courts et les seuls efficaces pour réussir dans une entreprise aussi difficile et aussi importante. Je frémis en le disant, mais je frémis bien davantage en réfléchissant sur la nature de ces gouvernemens dans lesquels, si un homme