Page:Alfieri - De la Tyrannie.djvu/25

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en même-temps ils regardent comme bien au-dessous d’eux le petit nombre de rois ou de princes, qui ayant des bornes insurmontables à leur pouvoir, partagent l’autorité avec les lois.

Ces rois absolus savent donc très-bien qu’il n’y a pas la moindre différence entre tyrannie et monarchie. Pourquoi les peuples qui en font continuellement la triste expérience ne le savent-ils pas aussi bien qu’eux ? Mais les princes européens qui chérissent le pouvoir des tyrans, se contentent seulement du modeste titre de monarque. Les peuples, au contraire, dépouillés, avilis et opprimés par la monarchie, ne savent que stupidement abhorrer le nom de tyrannie.

Mais le petit nombre d’hommes qui ne sont ni rois ni esclaves, lorsqu’ils ne méprisent pas également tous les princes, monarques ou tyrans, ou même les princes dont le pouvoir est limité, comme perpétuellement inclinés à le devenir ; ce petit nombre de penseurs profonds, dis-je, sait très-bien quelle différence il y a entre la dignité plus importante, plus glorieuse et plus préférable, de présider sous l’égide des lois au gouvernement du peuple libre,