Aller au contenu

Page:Alfieri - De la Tyrannie.djvu/45

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

l’ingratitude, de l’antipathie, de la désobéissance, de la haine et des crimes des femmes et des enfans envers leurs pères ou leurs maris. De là il arrive que le droit de nuire justement dans les bonnes républiques à celui qui fait le mal, étant réservé aux lois seules, les magistrats exécuteurs de ces lois étant à-la-fois temporaires et électifs, il arrive, dis-je, que l’on craint beaucoup les lois, sans pour cela les haïr, parce qu’elles ne sont personne : on en respecte les exécuteurs, sans trop les détester, parce qu’ils sont en trop grand nombre, et qu’ils changent tour-à-tour ; et il arrive finalement qu’on ne craint ni ne haït véritablement aucun individu.

Mais, au contraire, l’image du tyran héréditaire se présente toujours aux yeux des peuples sous l’aspect d’un homme qui, leur ayant volé une chose très-précieuse, nie audacieusement qu’ils l’aient jamais possédée, et tient continuellement l’épée levée pour empêcher qu’on ne la lui reprenne ; il peut, à la vérité, ne pas frapper, mais qui peut ne pas craindre que le glaive ne tombe sur sa tête ? Les peuples peuvent bien mettre la plus grande insouciance à la lui demander ; mais le tyran ne pouvant jamais s’assu-