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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 1.2.djvu/29

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APOLOGÉTIQUE (XVIIIe SIÈCLE) — (XIXe SIÈCLE)

ibU.

remarque dans le Traclatus de vcra religione, de Builly (1730-1808). Nous ne pouvons omettre, parmi les auteurs auxquels leurs œuvres acquirent encore une certaine notoriété, Louis Joly (1712-1782) qui, dans ses Remarques critiques sur le dictionnaire de Bayle, in-fol., Dijon, 1748, nous a laissé un utile correctif de ce dangereux recueil ; ni le P. Antoine Guénard (1726-1806) qui fixa si nettement et si finement, dans le Discours sur l’esprit pliilosopliique, in-4°, Paris, 1755, « les caractères qui le distinguent et les bornes qu’il ne doit jamais franchir ; » ni Barruel (1741-1820) qui, dans les Lettres provinciales philosophiques, 5 in-12, 1781, prit sa revanche, contre les encyclopédistes, de l’immortel et inique pamphlet de Pascal contre sa Compagnie, ni surtout le chanoine Gérard (1737-1813), plus célèbre que tous les autres par ce roman où l’on vit une confession et une autobiographie, et qui était destiné, dans l’intention de son auteur, à venger le christianisme en montrant les excès où conduit fatalement l’incrédulité : Le comte de Vaimont ou les égarements de la raison, 5 in-8°, Paris, 1801. Cette période se termine par le nom d’un bon prêtre, modeste, énergique, d’esprit élevé et de noble caractère qui emprunta aux philosophes les éléments d’un plaidoyer en faveur du catholicisme. S’il ne peut se défendre de quelques préjugés ecclésiastiques de son temps, l’abbé Émery (1782-1811) fit œuvre utile en publiant : L’esprit de Leibnitz, ou recueil de pensées choisies sur la religion, la morale, l’histoire et la philosophie, 2 in-12, 1772 ; Le christianisme de F. Bacon, in-12, 1799, et les Pensées de Descaries, in-8°, Paris, 1811.

En somme, l’année catholique compta au xviiie siècle ungrandnoinbredecombattantsauxquels ne manquèrent ni le courage ni la science, mais ils livrèrent plus d’escarmouches que de batailles, leurs armes trop souvent vieillies ne portèrent pas, et s’ils ne furent pas entamés dans leurs positions, ils n’obtinrent que de rares victoires indiscutées et définitives ; en un mot, l’apologétique fut abondante et généralement médiocre.

VI. APOLOGÉTIQUE. XIXsiècle, en France. — Pour

faciliter les recherches et grouper les renseignements, nous distinguerons, sans attribuer à cette division une valeur absolue : 1° les maîtres de l’apologétique au XIX e siècle ; 2° les apologistes de la chaire ; 3° l’apologétique doctrinale ; 4° l’apologétique philosophique ; 5° l’apologétique historique ; 6° l’apologétique scientifique ; 7° évoques apologistes ; 8° publicistes apologistes ; 9° des ouvrants récents d’apologétique.

1. Les maîtres de l’apologétique.

François-René de Chateaubriand (1768-1848) est le « premier écrivain du xixe siècle, disait Villemain dans l’ordre du temps et de la gloire » . Sa démonstration de la religion révélée est contenue dans le Génie du christianisme, 5 in-8°, Paris, 1802, dont les principes sont vérifiés, confirmés et appliqués en plusieurs autres ouvrages de l’auteur, tels que : Les martyrs ou le triomphe de la religion chrétienne, 1809 ; les Éludes historique » , 1831, et la Vie d, Rancé, 1833. Le titre primitif du Génie du christianisme en fait bien connaître l’objet : Des beautés poéliquet ri morales de la religion chrétienne ci tir sa su/ « o) </' sur tous les autres cultes de lu terre. L’ouvrage fut une très opportune réaction contre la philosophie artificielle et inintelligente de Voltaire, une réhabilitaBon du sentiment religieux, de l’importance el île la leur des problèmes qu’il fait naitre. On a relevé l’imprécision de certaines formules, la faiblesse de cer taims preuves, mais l’auteur avait atteint son but : for1 9 contemporains à accorder leur attention respectueue auchri tianisme, leur montrer qu’ils lui devaient " reconnai unts pour ses bienfaits, leur révéler les poésie et d'émotion qu’il renferme, son accord avec 'a nature et la civilisation, enfin sa beauté propre, absolument différente de la beauté' antiqu

d’un caractère si transcendant qu’on en pouvait conclure sa vérité et son origine surnaturelle.

Bien qu’il fût né avant Chateaubriand, le comte Joseph de Maistre (1753-1821) publia plus tard que lui ses principales œuvres. Le pape, Lyon, 1819, très vigoureuse réfutation du gallicanisme et, malgré ses omissions, ses inexactitudes, ses exagérations, très solide traité sur les droits du souverain pontife. Mais Les soirées de Saint-Pétersbourg, parues après la mort de l’auteur, Paris, 1828, sont le meilleur titre de gloire de cet admirable écrivain. Elles ont pour objet de démontrer et de justifier le gouvernement de Dieu sur le monde, d’expliquer le mal physique comme le châtiment du mal moral. Malgré les paradoxes où il se complaît parfois, J. de Maistre se montre penseur original, éloquent et profond. Son émule, Ambroise de Bonald (1754-1840), nous a laissé une substantielle et diverse réfutation de Rousseau et de Montesquieu. C’est un métaphysicien un peu froid, mais aux formules nettes. Il a beaucoup écrit. Il faut signaler ici, comme nous appartenant plus spécialement, La théorie du pouvoir politique et religieux dans la société civile, 3 in-8°, Constance, 1796 ; La législation primitive, 3 in-8°, Paris, 1802, et les Recherches philosophiques sur les premiers objets de nos connaissances humâmes, 2 in-8°, Paris, 1818. Les traditionalistes empruntèrent à ces ouvrages les lignes et les arguments de leur système. Le rôle de la tradition et de la société y est démesurément accru, mais ils abondent en considérations vraies et en rétlexions graves qui fixent l’esprit et lui suggèrent des idées.

Félicité de Lamennais (1783-1854) a exercé une action très active, très efficace. L’Essai sur l’indifférence en matière de religion, 4 in-8°, Paris, 1817, bouleversa les esprits et les cœurs. Le premier volume était une vaillante charge contre l’incrédulité : les trois derniers volumes sont de beaucoup inférieurs, contiennent les principes du lidéisme (voir ce mot) et préludent aux excès qui entraînèrent l’auteur parmi les révoltés, les apostats et les panthéistes. Il conçut, en philosophie, des ambitions démesurées, mais son Esquisse d’une philosophie, 4 in-8°, Paris, 1841 -1846, d’où on a extrait une remarquable Philosophie de l’art, garde des traces du merveilleux talent éclatant et âpre dont il avait fait preuve à ses débuts.

II. Les apologistes de la chaire.

Il y avait beaucoup moins d’idées nouvelles mais beaucoup plus de sagesse dans les discours de Denis Frayssinous (1765-1842) dont les Conférences sur la religion ou Défense du christianisme, 3 in-8°, Paris, 1825, sont un développement ordonné des principales questions qui se rapportent à la foi : vérités naturelles, certitude, témoignage, notes de la révélation, Jésus-Christ, etc. La langue est nette et rappelle parfois la prose du grand siècle. Mais l'éloquence devait revêtir l’apologie d’un magnifique vêtement dans la chaire de Notre-Dame de Paris où, successivement, Ravignan, Lacordaire, Félix, Monsabré, d’Hulst, répandirent sur les preuves de la religion l'éclat de leur parole. Lacordaire (1802-1861), dans ses Conférences de Notre-Dame de Paris, 4 in-8°, Paris, auxquelles il faut adjoindre ses Conférences de Nancy, 2 in-12, Paris, 1900, et ses Conférences de Toulouse, Paris, 1857, s’attache principalement à la démonstration du christianisme par ses effets, Il est hors de pair par l'émotion el la ie, l’ardeur et l’enthousiasme, le succès et l’influence. Le P. de Ravignan (1795-1858), dans ses Conférences, 4 in-8°, Paris, 1868, a va il manifesté sa profonde vie intérieure et son zèle persuasif. Le R. P. "Félix (ISH11891) développa, pendant quinze ans, la parole de saint Paul : Crescamus in illo per omnia qui es ! capui G/n-is tirs, Eph., IV, 15, en (les discours exactement divisés el purement écrits, avec ordre et logique, Conférences. Le progrès par le christianisme, etc., 17 in-8°, Paris, 1858 sq. Son successeur est encore heureusement i-