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AMÉRIQUE (ÉTATS-UNIS D’). PROTESTANTISME


ner la théologie à son centre, le Christ : d’où son nom de Christoccntrique. Elle insiste sur la divinité de JésusChrist, qui doit être le fondement de toute théologie chrétienne ; vient ensuite l’Église, fondée par le Christ et revêtue par lui d’une autorité divine : comme elle doit durer pendant tous les siècles et emhrasser toutes les nations, elle doit s’adapter à tous les temps et à tous les pays, et par conséquent ses décisions, pas plus que son organisation, ne sont immuables ; la papauté a pu être utile au moyen âge, mais dans notre siècle de liberté une organisation démocratique est préférable. Les ministres de l’Évangile reçoivent leur mission du Christ par l’imposition des mains, mais il n’est pas nécessaire qu’elle soit conférée par des évêques. Les sacrements ne sont pas des signes vides de grâce, comme le voulait Zwingle, mais des signes et des moyens de grâce opérant par la foi, au sens de Calvin. Ce ne fut pas sans résistance que ces idées furent acceptées dans l’Église réformée, et plus d’une fois les chefs du mouvement furent accusés de papisme, parce qu’ils parlaient avec repect des institutions de l’Église romaine : on finit p3r reconnaître qu’ils n’avaient pas cessé d’être protestants.

Comme on le voit les calvinistes (presbytériens, congrégationalistes et réformés) et les unitaires ont fait quelque chose dans le domaine de la théologie : les épiscopaux et les luthériens se sont contentés de recevoir leurs inspirations d’Angleterre et d’Allemagne ; les méthodistes et les baptistes sont plutôt hommes d’action que de doctrine et n’ont rien publié d’original.

Aujourd’hui la théologie américaine, suivant le mouvement allemand et anglais, tend à devenir plus historique et critique que philosophique. Parmi les érudits de renom, on peut citer Charles A. Briggs, que ses idées libérales en matières scripturaires ont fait exclure de l’Église presbytérienne et qui vient d’être reçu par les épiscopaux : il publie, avec la collaboration de D. F. Salmond, la Bibliothèque théologique internationale, et, avec l’aide de Driver et de Plummer, le commentaire critique international. Ses collaborateurs aux Etats-Unis, pour le commentaire critique, sont : G. Moore, professeur au séminaire d’Andover ; H. P. Smith, ancien professeur au séminaire de Lane ; M. R. Vincent et F. Brown, du séminaire de l’Union à New-York ; E. L. Curtis, de l’Université de Yale ; E. P. Gould et L. W. Batten, professeurs à Philadelphie, J. H. Ropes, C. H. Toy, de l’Université Harvard ; W. R. Harper, président de l’Université de Chicago ; J. P. Petcrs, ancien professeur à Philadelphie ; E. D. Burton, de l’Université de Chicago. Pour la Bibliothèque théologique il s’est assuré le concours de H. P. Smith, professeur au collège d’Amherst ; d’Arthur C. Me. Giffert, du séminaire de l’Union ; de F. C. Porter, G. B. Stevens et G. P. Fisher, tous les trois professeurs à Yale ; de Newman Smyth et Washington Gladden, pasteurs congrégationalistes à New-Haven et Columbus. Les volumes parus jusqu’ici montrent de l’érudition et de l’esprit critique, mais bien peu de précision et de logique au point de vue doctrinal.

III. Vie religieuse.

On retrouve dans la vie religieuse des Américains les qualités et les défauts qu’ils montrent dans le commerce ordinaire de la vie : le sérieux, l’activité, l’indomptable et persévérante énergie, l’esprit d’organisation, et, il faut bien le dire aussi, une certaine dose de pharisaïsme, qui leur fait croire aisément qu’ils sont le peuple le plus chrétien du monde. En général ils montrent du respect pour la religion et ses ministres ; il y a sans doute quelques voltairiens qui, comme Ingersoll, mort au mois d’août 1899, insultent et raillent tout ce qu’il y a de plus sacré ; mais c’est là une exception ; les hommes publics, les politiciens euxmêmes, aussi bien que les particuliers sont respectueux à l’égard de la religion, et ceux-là même qui ne croient pas regardent les différentes communions comme des institutions respectables. D’un autre côté on ne trouve

guère chez eux ce que nous appelons la piété ; sans doute les ritualistes ont traduit en anglais quelques-uns de nos ouvrages spirituels, et il y a quelques âmes dévotes qui en font leurs délices, et vivent, comme elles le disent, sous la direction du Saint-Esprit ; mais elles sont peu nombreuses, et en général la vie religieuse se porte à l’extérieur. Des œuvres et des associations nombreuses ont été fondées pour maintenir et propager la foi soit à l’intérieur, soit dans les missions.

L ŒUVRES ET ASSOCIATIONS POUR LES ÉTATS-UNrS EUXMÊMES. — 1. Au premier rang nous plaçons le Sundaysclwol, ou l’enseignement du catéchisme qui se donne régulièrement le dimanche, et quelquefois un autre jour de la semaine. Les sectes qui ont un credo précis, comme les luthériens et les presbytériens, ont, comme les catholiques, un petit catéchisme qu’on explique aux enfants ; les autres se contentent d’un enseignement oral, qui varie selon le catéchiste ; mais presque partout on ajoute à cet exercice la lecture ou l’explication de la Bible, avec carte de géographie à l’appui. Des professeurs de talent préparent des programmes analytiques détaillés, publiés dans des revues spéciales, qui facilitent singulièrement la tâche du catéchiste. La fameuse école qui, chaque année, pendant les mois d’été, se tient sur les bords du lac Chautauqua, à l’ouest de l’État de New— York, a été fondée en 1874 pour former des professeurs de Sundag-school ; et, bien que son programme contienne aujourd’hui toutes sortes d’exercices littéraires et athlétiques, elle demeure fidèle à son but primitif et a établi une multitude de succursales. De plus, un certain nombre d’Eglises luthériennes et anglicanes ont fondé des écoles paroissiales, pour contrebalancer l’influence des écoles neutres ; on y enseigne le catéchisme et l’histoire de la Bible chaque jour.

2. Pour aider les jeunes gens à persévérer, il y a un grand nombre d’associations, en particulier l’Association chrétienne des jeunes gens, organisée à Londres en 1844, et qui s’est répandue rapidement aux États-Unis, où elle compte 237976 membres et possède un capital de plus de 90 millions de francs ; son but principal est de grouper les jeunes gens de toutes les différentes communions chrétiennes, pour leur faciliter la prière et l’étude de la Bible ; mais elle leur fournit aussi les moyens de s’instruire et de se récréer honnêtement. Une association similaire existe pour les jeunes femmes. Elle est de date plus récente, et a déjà enrôlé 35000 membres. La Société de l’effort chrétien s’adresse à la lois aux jeunes gens et aux jeunes filles ; fondée en 1881, dans l’État du Maine, elle s’est répandue si rapidement qu’elle compte aujourd’hui 3276660 sujets, dont les quatre cinquièmes sont aux États-Unis ; les membres s’engagent à prier et lire la Bible en particulier chaque jour, à se réunir chaque semaine pour prier ensemble et, plus solennellement, chaque mois pour renouveler leur acte de consécration ; au reste, ils s’obligent à assister au service divin et à servir leur Église de tout leur pouvoir. Ces sociétés s’adressent à toutes les communions ; mais, de plus, les principales sectes ont tonde des associations spéciales ou dénominationelles ; les méthodistes ont la Ligue Epworth, établie en mai 1889 avec 600 membres et qui en comptait au mois d’octobre 1899, 1800000 ; les épiscopaux ont organisé la Fraternité de Saint-André, qui comprend 13000 hommes, lesquels s’engagent non seulement à prier pour l’extension du royaume de Dieu, mais encore à amener chaque semaine au prêche au moins un de leurs amis. — Certaines communions, comme les luthériens, les épiscopaux et les méthodistes, ont aussi des diaconesses, chargées d’aider les ministres dans le soin des pauvres et des malades et dans l’éducation religieuse des entants et des ignorants. Les ritualistes ont même fondé des ordres religieux d’hommes et de femmes, qui portent l’habit monastique et font des vœux temporaires ; mais