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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 1.djvu/631

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ANGE D’APRÈS LES PÈRES

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et justes, élevés à l’état surnaturel, puis éprouvés ; mais ils ne s’accordent pas sur la nature de leur état après l’épreuve. Tous proclament ce principe que Dieu seul est incapable de pécher, àva^âpTirO ; . Or, dans l’Apocalypse, il est question d’anges blâmés pour leur négligence. Ils pensent de plus que la rédemption s’applique sans distinction à toutes les créatures et que le jugement, pour être vraiment général, doit s’appliquer même aux anges. Avec de tels éléments de solution, on comprend que la faillibilité des anges ait été une opinion courante pendant les quatre premiers siècles.

D’après Ignace d’Antioche († 107), les anges doivent croire au sang de Jésus-Christ sous peine d’être jugés.’Eàv |xr) TuaTSiiuaxjiv eî ; tô aî|xa Xpiafo-J, xaxecvoiç xpîfnç Ë(tt ;’v. Smyr., i, 1, édit. Funk, Patr. apostol., TuLingue, 1887, t. i, p. 233. C’est donc qu’après la rédemption leur sort n’est pas encore fixé.

Clément d’Alexandrie croit qu’ils ont été créés avec une nature excellente et élevés à l’ordre surnaturel, mais qu’ils ont dû, pour s’y maintenir, demander la persévérance à Dieu, Strom., vii, 7, P. G., t. ix, col. 45C ; que les négligents sont tombés, ibid., col. 465, que ces derniers ont révélé aux femmes les secrets de l’avenir qu’on devait tenir cachés jusqu’à l’avènement du Christ. Strom., v, 1, P. G., t. ix, col. 2k

Tertullien, sous l’influence du Pseudo-Énoch, prend à la lettre I Cor., xi, 8, 10, et veut que les vierges soient voilées propter angelos. De virg. vel., 7, P. L., t. il, col. 899. Il suppose donc les anges capables encore de succomber.

Origène, bien qu’il connaisse le texte de l’apôtre et qu’il tienne en suspicion l’autorité du Pseudo-Énoch, hésite devant le témoignage de l’Apocalypse. In Luc, xxiii, P. G., t. xiii, col. 1863. Mais il ne croit pas que l’état actuel des anges soit définitif ; car il regarde les âmes des bienheureux comme capables de déchéance et celles des damnés comme capables de salut. Et, appliquant cette théorie suspecte aux anges, il admet une série indéfinie d’épreuves, l’instabilité, la possibilité d’une chute : Platon a trop déteint sur lui. Il est vrai qu’il sent toute la difficulté d’une telle question, qu’il ne l’aborde qu’avec précaution et qu’il ne veut rien définir, ni rien faire passer pour un dogme. De princ., . I, c. VI. 1, P. G., t. XI, col. 165. Il se contente donc de discuter et de dire ce qu’il pense. Ibid., col. 168. Or, sa pensée est que les anges sont actuellement faillibles. Pour ne pas pécher, ils ont besoin du Christ, In Luc, xxxi, P. G., t. xiii, col. 1881, mais ils peuvent pécher, In Matth., xv, 27, P. G., t. xiii, col. 1333 ; ce n’est pas là un dogme de foi. In Matth., xvii, 30, P. G., t. xiii, col. 1571. En effet, l’ange gardien, car c’est de lui surtout qu’il parle, peut offenser l’un des petits qui lui sont confiés ou manquer de diligence dans l’accomplissement de sa fonction. Par suite, selon que les âmes, dont il a la garde, restent fidèles ou déchoient, il est digne d’éloge ou de blâme, In Luc, xiii, P. G., t. xiii, col. 1832 ; selon qu’elles atteignent ou manquent leur salut, il jouit de la vision de Dieu ou est puni. In Luc, xxxv, P. G., t. xiii, col. 1890. Responsable, il a une récompense proportionnelle aux mérites de ces âmes : Secundum meritum enim eorum, quorum angeli sunt, aut semper, aut nunquam, velparum vel plus, faciem Dei cotitemplabuntur. Il doit assister au jugement de l’homme pour qu’il conste si c’est par sa négligence que l’homme a péché. In Luc, homil. xi, 4 ; homil. xx, 3, 14, P. G., t. xii, col. 647, 733, 795. Et que Dieu ait ainsi engagé la responsabilité de l’ange dans le salut de l’homme, c’est ce qu’il ne peut assez admirer. In Num., xx, 3, P. G., t. xii, col. 73. Enfin, il croit si bien à la faillibilité actuelle de l’ange qu’il ne craint pas d’avouer que l’ange peut devenir démon. De prine, 1. 1, c. v, vi ; l. II, c. iii, P. G., t. xi.

Il va sans dire qu’une telle théorie fut un objet de réprobation : Méthodius, Épiphane, Théophile d’Alexandrie, et d’autres l’attaquèrent vigoureusement : mais elle n’en laissa pas moins des traces. C’est sous son influence que Didyme enseigna que la rédemption s’est étendue jusqu’au monde des anges. In Petr., iii, 22, P. G., t. xxxix, col. 1770. C’était un des disciples restés fidèles. Mais les Cappadociens avaient plus de liberté. Malgré cela, Basile, qui regarde les anges comme sanctifiés en même temps que créés, se contente de les dire difficilement portés au mal, 8-ja[xeraGï]T01 Ttpb ; xaxi’av. In Psal., xxxii, 4, P. G., t. xxix, col. 333, 334. Car s’ils restent unis à Dieu, persévèrent et ne tombent pas, c’est uniquement au Saint-Esprit qu’ils le doivent. De Spir. Sancto, xix, 49, P. G., t. xxxii, col. 158. Grégoire de Nazianze, après les avoir traités de àxivvyrovç ^ Su<rxivf|TO’jç, Orat., xxviii, 31, P. G., t. xxxvi, col. 72, les déclare jat) àxivYJTovK, à).Xà S-jiwv^tou ; . Orat., xxxviii, 9, col. 321. Ailleurs, il semble leur accorder comme à Dieu le privilège de l’impeccabilité. Orat., XL, 7, P. G., t. xxxvi, col. 336. L’auteur des Dialogues, attribués à Césaire, pense différemment. Dial., i, q. xliv, P. G., t. xxxviii, col. 912.

Cyrille de Jérusalem n’hésite pas. Sans aller aussi loin qu’Origène, il admet que les anges commettent des fautes que Dieu doit leur pardonner, Cat., il, 10, P. G., t. xxxiii, col. 416, mais des faufes légères qui ne sauraient leur faire perdre la vision béatifique et ne les rendent pas justiciables du jugement, attendu qu’ils doivent y paraître, non en coupables, mais en témoins. Ibid. L’auteur des dialogues De Trinitate, i, 24, parmi les œuvres de saint Athanase, P. G., t. xxviii, col. 1153, à la question : les anges peuvent-ils pécher ? répond affirmativement.

Parmi les Pères latins, saint Ambroise, écho de saint Basile, prétend qu’ils ont besoin de la grâce pour ne pas errer et ne pas tomber dans le vice. In Psal., cxviii, serm. viii, 29, P. L., t. xv, col. 1306. Il les suppose donc faillibles. Saint Hilaire les dit, au contraire, perpétuant mandatorum cuslodiam pro naturæ suæ firmilate rctinentes. In Psal., cxviii, 10, P. L., t. ix, col. 522. Saint Jérôme repousse le sentiment d’Origène sur la possibilité pour un ange de devenir actuellement un démon, mais il admet la possibilité d’une infidélité ; il assure, en conséquence, qu’au jugement les anges auront à rendre compte de leur mission et qu’ils seront punis, s’ils ne l’ont pas remplie exactement. In Mich., VI, 1, P. L., t. xxv, col. 1206.

Avec saint Augustin, la question change de face. Dieu, dit-il, a créé les anges simul eis condens naturam et largiens gratiam. De civ. Dei, xii, 9, P. L., t. xli, col. 357. Ils jouissent donc, dès l’instant de leur création, de la contemplation du Verbe. De Gen. ad lit., il, 17, P. L., t. xxxiv, col. 270. Sur ce point il est d’accord avec la plupart des Pères. Mais, à leur différence, il se prononce pour l’immutabilité des anges dans le bien. C’est dans la’Trinité que la sublimité des anges a son origine, sa beauté, sa béatitude ; elle vit dans l’éternité de Dieu ; elle brille dans la vérité de Dieu ; elle jouit dans la bonté de Dieu. De civ. Dei, xi, 24, P. L., t. xli, col. 338. Or, jouir sans aucun trouble du bien immuable, de Dieu même, loin du doute qui hésite, loin de l’erreur qui abuse, être assuré d’une éternelle jouissance, c’est la félicité éternelle, dont nous croyons d’une loi pieuse que jouissent les anges de lumière. De civ. Dei, xi, 13, P. L., t. xli, col. 329. Un tel bonheur n’est que la récompense de leur fidélité, De civ. Dei, XXII, 1, P. L., t. xli, col. 752 ; félicité immuable qui doit être le parlage des saints. Ibid. Car, lorsqu’on est dans cette cité, on n’en peut plus déchoir, comme on n’en est plus déchu depuis la chute des anges rebelles. Kncliir., 57, P. L., t. xi, , col. 259. Les anges, en effet, ont toujours été assurés de leur éternelle félicité, depuis la chute des démons. Enchiç., 29, P. L., t. xi., col. 246. Oue l’on discute si l’on veut, mais à la condition que, dans les