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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 1.djvu/649

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ANGE D’APRÈS LES SCOLASTIQUES

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leur récompense ou de leur péché, comme Verbe de Dieu ; il ne les jugera comme Christ fait homme, que sur ce qu’ils font dans le monde, et sur ce qu’il y a d’accidentel dans leur récompense ou dans leur châtiment. Sum. theol., III", q. lix, a. 6.

ni" opinions de duns scot. — I. Les périodes de l’existence angélique. — Les anges ont été créés tous égaux. IV Sent., l. II, dist. V, q. i, n. 7. Il est probable que Dieu leur a assigné à tous le même temps pour leur épreuve et pour leur récompense ou leur châtiment. Ibid., n. 6. Leur existence peut donc se partager en trois ou en quatre périodes (morse) : 1° la période de leur récompense ou de leur châtiment dans laquelle ils sont ; 2° la période de leur épreuve qui a nécessairement précédé la première, et où ils ont mérité ou démérité ; 3° une troisième période qui a précédé leurs mérites et leurs démérites, et où ils étaient égaux et en état de grâce sanctifiante. Il semble plus probable qu’ils ont été créés en cet état de grâce ; car aucune raison n’oblige à croire qu’ils ont été antérieurement dans un autre état. Cependant la conjecture de certains théologiens, suivant laquelle ils auraient été créés dans l’état naturel et élevés seulement ensuite à l’état de grâce, n’offre rien d’invraisemblable. En ce cas moins probable, il y aurait eu au commencement de leur existence une quatrième période, celle de l’état naturel. Ibid., q. I, n. 6, 7 ; q. il, n. 13.

2. Création et épreuve.

Après ce que nous avons vu des opinions de Duns Scot sur l’intelligence et la volonté des anges, il est clair qu’il ne leur accorde pas l’entière perfection naturelle ni avant, ni pendant leur épreuve. Cf. ibid., dist. V, q. ii, n. 13 sq. Cependant il reconnaît qu’ils ont reçu dès l’origine la connaissance abstractive de Dieu dont ils étaient naturellement capables et qui constituait leur perfection naturelle. Ibid., dist. III, q. ix, n. 8. — Selon lui, la période de leur épreuve a compris plusieurs instants ; car elle a été remplie pour les mauvais anges, par plusieurs péchés successifs, de diverses espèces et de plus en plus graves, et pour les bons anges, par un combat contre le dragon et une victoire (Apoc, xin). Ibid., dist. V, q. IX, n. 9 ; q. H, n. 15 ; cf. ibid., dist. VI, q. vii, n. 16 sq. ; dist. VII, q. unica, n. 6. Le mérite des bons anges est venu de ce combat, comme la faute des démons a consisté à suivre Lucifer. Leur péché a consisté en un amour désordonné d’euxmêmes, ibid., dist., VI, q. il, n. 4, qui leur fit désirer la béatitude d’une façon immodérée. Ibid., n. 5 sq. Ce ne fut point un péché d’orgueil proprement dit, mais plutôt un péché de luxure, puisqu’on peut rapporter à la luxure la délectation désordonnée dans une chose spirituelle, comme la science de la géométrie. Ibid., n. 14. Plusieurs scotistes admirent, comme le fit Suarez, que le péché des démons consista à envier l’union hypostatique du Christ ; cependant ils ne citent aucun texte de Scot en faveur de cette opinion. Frassen, Scolus academicus, in IV Sent., . II, tr. I, disp. III, a. 3, q. iii, n. 36, Paris, 1673, t. ii, p. 181. Mais le docteur subtil dit clairement que les mauvais anges auraient pu se repentir, aussi longtemps qu’ils restèrent dans la période d’épreuve, avant d’être précipités en enfer. IV Sent., l. II, dist. VI, q. vii, n. 17, ad 4°->.

: J. Béatitude. — Les bons anges ont mérité la béatitude

surnaturelle par la manière dont ils ont subi leur épreuve. Leur récompense substantielle ne s’accroît pas. Ibid., dist. VII, q. i, n. 28. On attribue à Scot d’avoir admis que cette récompense substantielle augmente en extension sinon en intensité. Ainsi fait Suarez, Deangclis, l.VI, C. vt, n. 0. Duns Scot, IV Sent., I. II, dist. X ; Reporlala, l. II, dist. X, q. ii, admet en effet un progrèsque Suarez rejette, De angelis, l. VI, c. v, dans la connaissance de l’incarnation au moins par les anges inférieurs ; niais le progrès dans la connaissance de l’incarnation peut être regardé comme accidentel dans la vision béatifique des anges. Cf. Suarez, De angelis, l. VI, c. vi, n. 1 sq. Les

textes du docteur subtil invoqués par Suarez, 7 VSent.l. III, dist. XIV, q. ii, n. 21, peuventdoncs’entendrede la récompense accidentelle des anges. Suarez le reconnaît lui-même. Ibid., c. vi, n. 6. Scot pense, comme saint Thomas d’Aquin, que la récompense accidentelle des anges s’accroît par la connaissance qui leur est donnée successivement de la conversion et des bonnes œuvres des hommes ; mais tandis que saint Thomas estime que cet accroissement est indépendant de tout mérite de la part des anges bienheureux, Duns Scot croit qu’ils le méritent par leur ministère auprès des élus. IV Sent., l. II, dist. V, q. i, n. 4.

4. La grâce a-t-elle été méritée aux anges par le Christ ? — Bien que le docteur subtil soutienne que le Christ se serait incarné alors même qu’Adam n’eût point péché, / V Sent., l. III, disp. VII, q. ni, n. 3, et que son incarnation a été résolue par Dieu avant la prédestination des anges, il pense néanmoins que les grâces données aux anges ne leur ont pas élé méritées par le Christ. Ibid, , dist. XIX, q. unica, n. 6. Cf. les commentaires de Cavelle sur ce passage, n. 7, dans Duns Scot, Opéra, Paris, 1894, t. xiv, p. 717.

iv> opinions de suarez. — 1. Création. — L’angeaurait pu recevoir la béatitude naturelle, au moment de sa création, s’il avait été établi dans un état de nature pure ; mais, ayant été créé dans un état surnaturel et pour subir une épreuve, il n’a pas reçu la béatitude naturelle, puisqu’il était peccable et qu’il ne contemplait ni n’aimait nécessairement Dieu à tous les instants. De angelis, l. III, c. xi.

2. Élévation.

L’opinion la plus probable est celle qui accorde l’état de grâce aux anges dès le moment de leur création. Ibid., l. III, c. iv. Il est plus probable aussi qu’ils se sont disposés dès ce premier moment à l’état de grâce et aux vertus qui l’accompagnent, par des actes surnaturels produits non à l’aide de ces vertus, mais à l’aide de grâces actuelles. Ibid., . III, c. vii-ix. Malgré l’autorité de saint Thomas qui soutient l’opinion contraire, il semble que les anges n’ont pas reçu tous un degré de grâce et de gloire proportionnel à leur perfection naturelle ; car plusieurs ont pu se disposer à l’état de grâce, ou mériter la gloire par des actes plus parfaits que les actes d’autres anges supérieurs par leur nature. Ibid., l. V, c. x. Tous les anges, même les futurs démons, ont fait des actions bonnes et méritoires pendant cette première période de leur existence, et cette période a duré un laps de notre temps qu’il est impossible de déterminer. Ibid., l. V, c. xi, n. 5.

3. Épreuve.

Pendant une seconde période, les bons anges ont mérité une augmentation de grâce et de gloire par diverses bonnes actions, tandis que les mauvais anges méritaient la damnation. Cette épreuve est la guerre que, suivant l’Écriture, Lucifer provoqua entre les anges, en leur proposant de se révolter contre Dieu. Ibid., l. V, c. xi, n. 6 sq. ; c. XII, n. 6. Les anges ont tous reçu des grâces suffisantes pour persévérer pendant cette période ; les mauvais anges auraient pu se repentir après être entrés dans la mauvaise voie ; cependant, en fait, tous ceux qui sont entrés dans cette voie à la suite de Lucifer y ont persisté jusqu’à leur damnation, en raison non d’une impuissance physique, mais d’une impuissance morale. Ibid., l. V, c. xii ; l. VIII, c. I. De même aucun des anges qui sont entrés alors dans la bonne voie n’est tombé’ensuite dans le péché avec les mauvais anges. Cette persévérance de tous les anges qui ont bien commencé cette seconde période vient d’une grâce spéciale, efficace, qui leur a été donnée de Dieu. Ibid., l. V, c. xii.

Cette seconde période de l’existence angélique a été caractérisée non seulement par de nouvelles grâces actuelles, mais encore par une nouvelle révélation. L’incarnation du Verbe a été révélée alors à tous les aiiLies. Il leur a été ordonné de reconnaître le Christ