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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 1.djvu/650

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ANGE D’APRÈS LES SCOLASTIQUES

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fait homme pour leur chef et l’auteur de leur salut, et de l’adorer comme Dieu, Lucifer a prétendu que cette excellence était due à sa nature ; lui, et les mauvais anges qu’il entraîna, refusèrent d’obéir, pendant que les bons anges se soumettaient. C’est en quoi a consisté l’épreuve des anges. Ibid., l. V, c. XII, n. 13 ; In tertiam parlem, dist. V, sect. iv, n. 18.

4. Béatitude.

Les mauvais anges ont été précipités en enfer aussitôt après avoir consommé leur péché. De angelis, l. VIII, c. n. Les bons anges sont entrés dans la béatitude éternelle aussitôt après leur épreuve ; la possession de cette béatitude constitue la troisième période de leur existence. De angelis, l. VI, c. i-m. Suarez attribue aux anges bienheureux, dès le premier moment de leur béatitude, une connaissance complète de tous les mystères de la foi qui devaient être révélés aux hommes avec l’Évangile, mais il incline à leur refuser la connaissance du jour du jugement. Ibid., l. VI, c. v. Cette manière de penser s’imposait à lui du moment qu’il admet que l’incarnation a fourni l’objet de l’épreuve des anges et que leur élévation leur a été méritée par le Christ. Il suit l’opinion de saint Thomas sur l’augmentation de leur bonheur accidentel, sans mérite de leur part. Ibid., l. VI, c. v-ix.

5. L’élévation et la béatitude ont-elles été méritées aux anges par le Christ ? — Suarez soutient non seulement que le Christ est le chef des anges, In tertiam partent, disp. XXIII, sect. i, n. 6 ; mais encore que c’est lui qui leur a mérité toutes les grâces et la gloire qu’ils ont reçues : il considère cette conclusion comme la conséquence de l’opinion que l’incarnation aurait eu lieu, alors même qu’Adam n’eût point péché. Ibid., disp. XLH, sect. i.

Le péché d’Adam, selon lui, a été la cause non de l’incarnation mais de la rédemption. C’est pourquoi le Christ n’a point racheté les anges qui ont péché. Ibid., disp. XL1I, sect. n. Il est le sauveur des anges, c’est-à-dire l’auteur de leur salut et de leur glorification, non leur rédempteur. Si l’on objecte que les anges pas plus que les hommes n’auraient dû entrer dans la béatitude avant le Christ, leur sauveur, Suarez répond que les anges n’étant point pécheurs, ni exclus du ciel comme les hommes pécheurs, n’avaient pas besoin d’attendre leur rédemption pour y entrer. Il convenait au contraire qu’ils reçussent leur récompense sans aucun retard et par conséquent avant l’avènement du Sauveur. De angelis, l. VI, c. il, n. 9.

VI. Rapports mutuels des anges. Hiérarchie. Illumination. Langage. — i° saint thouas d’aquin. — i. Hiérarchie. — Saint Thomas suit l’Aréopagite sur la question de la hiérarchie des anges. La hiérarchie est une principauté sacrée. Du côté du prince qui est Dieu, il n’y a qu’une seule hiérarchie embrassant les anges et les autres créatures raisonnables qui sont sanctifiées. Du côté des sujets, il faut distinguer autant de hiérarchies qu’il y a de groupes qui reçoivent d’une manière différente les ordres du prince, comme on distingue les cités qui sont soumises à un même prince, mais ont reçu de lui une législation différente. Les hommes connaissant les lois divines d’une manière différente des anges, forment une hiérarchie différente de celle des anges. Les anges à leur tour ayant une intelligence plus ou moins puissante, et connaissant les lois divines de manières diverses, sont partagés en trois hiérarchies. La première saisit ces lois comme elles procèdent du premier principe universel qui est Dieu. La seconde hiérarchie les saisit comme elles dépendent des causes universelles créées, qui sont déjà en assez grand nombre. La troisième hiérarchie les saisit comme elles s’appliquent à chaque être et dépendent de ses causes particulières. Sum. theol., I a, q. cviii, a. 1. Chaque hiérarchie contient, à son tour, trois ordres dilfèrents par leurs actes et leurs offices : un ordre supérieur, un

ordre intermédiaire et un ordre inférieur, que saint Denys a parfaitement distribués en plaçant dans la première hiérarchie les séraphins, les chérubins et les trônes ; dans la seconde, les dominations, les vertus et les puissances ; dans la troisième, les principautés, les archanges et les anges, ibid., a. 2, 5, 6, division à laquelle peut d’ailleurs se ramener celle de saint Grégoire ; car si celui-ci place autrement les principautés et les vertus, c’est parce qu’il ne donne pas à ces termes le même sens que saint Denys. Ibid., a. 6, ad 4um. Chaque ordre renferme à son tour beaucoup d’anges différents, mais que nous ne pouvons distinguer à cause de l’ignorance où nous sommes de leurs offices. Ibid., a. 3. Cette distinction des anges en hiérarchies et en ordres est fondée, dans sa préparation, sur leurs dons naturels qui les disposaient à leur degré d’élévation surnaturelle, et dans son achèvement, sur leurs dons surnaturels et la vision intuitive que Dieu leur accorde de son essence. Ibid., a. 4. Elle persévérera donc après le jour du jugement sous ces deux rapports, mais non pour le ministère confié aux anges de mener les hommes à leur fin. Ibid., a. 7. Les hommes peuvent entrer dans les divers ordres des anges, non en prenant leur nature, mais en méritant au ciel une gloire qui les égale à l’un ou l’autre ordre des anges. Ibid., a. 8.

2. Illumination.

On dit qu’un ange est éclairé ou illuminé par un autre lorsqu’il reçoit de lui la connaissance d’une vérité ignorée du premier et connue du second. Sum. theol., l a, q. cvi. Il n’y a pas illumination mais simple locution, lorsqu’un ange manifeste ce qui dépend de sa propre volonté ; pour qu’il y ait illumination, il faut qu’il s’agisse d’une vérité qui a pour seule règle l’intelligence divine. Ibid., q. cvii, a. 2. Un ange inférieur n’illumine jamais un ange supérieur ; car cela serait contre l’ordre établi de Dieu, ibid., a. 3 ; mais un ange supérieur peut éclairer un ange inférieur, et il le fait de deux manières : d’abord il fortifie sa puissance intellective en se tournant vers lui, comme un corps plus chaud augmente la température d’un corps froid dont il se rapproche ; ensuite il met à sa portée, par des divisions convenables, ses concepts trop universels pour être saisis en eux-mêmes par l’ange inférieur. De cette manière il explique à l’ange inférieur ce que celui-ci ne pouvait concevoir, comme un maître explique à ses disciples les principes généraux par leurs applications particulières. Ibid., a. 1. Cette illumination n’a point pour objet l’essence divine dont tous les anges bienheureux ont la vision, mais seulement la raison des œuvres de Dieu qui sont manifestées plus ou moins aux anges et dans la mesure où ceux-ci sont plus parfaits. Ibid., a. 1, ad l um. Cependant cette illumination ne saurait jamais rendre la connaissance des anges inférieurs égale à celle des anges supérieurs, ibid., à. 4 ; jusqu’au jour du jugement les anges supérieurs recevront sur le monde et l’élection des élus de nouvelles révélations qu’ils pourront communiquer aux anges inférieurs par illumination. Ibid., a. 4, ad 3um. Malgré cette action de l’ange supérieur sur les anges inférieurs, il ne saurait mettre leur volonté en mouvement, puisqu’il ne leur manifeste pas le bien universel qui est Dieu, mais uniquement des biens créés. Cependant par la manifestation de ces biens créés et de leurs rapports avec Dieu, il peut incliner leur volonté en leur persuadant d’aimer ces créatures, ou bien Dieu à qui elles se rapportent. Ibid., a. 2.

3. Locution.

Les anges se parlent dans l’illumination ; ils se parlent aussi pour se manifester ce qui dépend de leur volonté ; c’est pourquoi un ange inférieur peut parler à un ange supérieur. Ibid., q. cvii, a. 2. Saint Thomas attribue à ce qui est intelligible le pouvoir de se manifester à l’intelligence, lorsque rien n’y met obstacle. Or il n’y a à la manifestation des conceptions d’un ange, d’autre obstacle que sa volonté qui a