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1847 MIRACLE, CONSTATATION DU CARACTÈRE SURNATUREL 1848

quelque titre que ce soit : si. au contraire, tout y est convenable, sérieux, portant à la piété, à la religion, à la sainteté : il n’y a aucun cloute : ce préternaturel n’est pas un pré ernaturel diabolique. Si tous ces signes existent simultanément dans le prodige, on pourra avec une certitude morale, le tenir pour un prodige divin. Nous disons, avec le P. de Poulpiquet : si tous ces signes… simultanément ; car. c’est ici le cas ou jamais d’appliquer le principe : bonum ex intégra causa, malum ex quoeumque defectu. Op. cit., p. 116.

, t fortiori devra-t-on aboutir à la même conclusion si l’agent, doué lui-même d’une grande sainteté, accomplit le miracle après avoir invoqué le nom de Dieu, et dans le but de confirmer une doctrine qu’il affirme être révélée et nécessaire au salut : si la religion ellemême en retire des fruits réels pour détruire le règne du démon, réformer les mœurs, accroître le culte du vrai Dieu, etc. S’il n’en était pas ainsi, il faudrait dire que Dieu permet un miracle en faveur de l’erreur et du mal. ce qui serait pour beaucoup une occasion certaine d’erreur invincible, de perdition et de ruine. Ou bien, cliose inconcevable, il faudrait admettre que le démon travaille à sa propre destruction. Cf. Garrigou-Lagrange, De revelatione, t. ii, p. 80-83. L’hypothèse, en certains cas plausible, d’un miracle accompli par un pécheur, un hérétique, peut-être un infidèle, voir ci-dessus, col. 1836, n’a rien de contradictoire avec les règles morales de discernement qu’on vient de rappeler. Si Dieu permet ou veut qu’un tel miracle soit accompli par un agent de cette sorte, il faudra nécessairement que le miracle soit visiblement accompli, non pour confirmer l’erreur, le péché, l’hérésie, mais au contraire pour les condamner et affirmer la vertu et la vraie doctrine. Cf. S. Thomas, Sam. theol.. II*-IF B, q. clxxmii, a. 2, et ad 3um.

3. Les contrefaçons du miracle. Voir J. de Donniot, Le miracle et ses confrefacons, Paris, 1888. — <M l.es faits extraordinaires relevant de l’intervention diabolique pourront, grâce aux critères qu’on vient d'énumérer, être facilement reconnus, tout au moins dans une certaine mesure. On les a étudiés ou on les étudiera en des articles spéciaux. Voir Hypnotisme, t. vii, col. 360 ; Magie, t. ix, col. 1512 ; Spiritisme. — b) D’autres faits sont parfois cités qui, sous la plume de critiques rationalistes, prennent figure de miracles, el, en réalité, sont ou des phénomènes morbides, ou des faits légendaires. Faits légendaires, et sans fondement historique certain, les « miracles » attribués à Vespasien et Hadrien, et rapportés par Tacite et Suétone ; cf. Duchesne, Histoire ancienne de l'Église, t. i, p. 363-364 ; pour ce qui est des « miracles » d’Esculape, voir Mangenot, Les miracles d’F.sculape, dans la llevue du Clergé français, 1917, août-septembre, et les références données à l’art. Mangenot, col. 1840. faits morbides et supercheries, les « miracles » jansénistes du diacre Paris. Voir Walïelært, art. Convulsionnaires dans le Dictionn. apologétique, 1. 1, col. 705. lui lin. rien n’empêche que Dieu accorde des grâces d’ordre temporel, qui n’ont d’ailleurs rien du miracle, même dans les religions autres que le catholicisme, aux i âmes de bonne foi qui crient à Dieu en confiance leur détresse et leur misère ». Hugueny, op. cit., p. 282. Quoi qu’il en soit, la notion et le discernement du vrai miracle sont hors de question en tous ces problèmes historiques qui n’intéressent que de loin la théoogie.

/II. CERTITUDE DES FAITS M l n.('V I.KV X. — I.c problème de la certitude que l’on peut avoir des faits miraculeux dûment constatés se présente sous un double aspect. Quelle certitude peut nous donner de la réalité du miracle la constatation faite d’après les

règles de la critique rationnelle ? Concrètement, quelle

est cet le certitude pour les miracles consignés dans

l'Écriture ou reconnus par l’Eglise après enquête canonique ?

In abslracto.

1. On distingue généralement une

triple certitude : certitude métaphysique, physique, morale. Voir sur la véritable portée de cette distinction. Foi, t. iii, col. 2Il sq. Bien que certains auteurs, notamment J. de Tonquédec, op. cit., p. 227, note 2 el surtout Garrigou-Lagrange, op. cit., t. n. p. 71-78, parlent, à propos de la constatation de certains miracles, de certitude métaphysique, il semble difficile d’acquiescer à leur assertion. Sans doute, dans l’ordre des principes, il est métaphysiquement certain que tel phénomène extraordinaire, par exemple, la résurrection d’un mort, a Dieu pour auteur. Mais la certitude que Dieu a ressuscité tel mort déterminé est une certitude, non de principe, mais de fait, et, par conséquent, certitude physique. Elle suppose, en effet, comme condition préalable, que cet individu est réellement décédé ; et de ce phénomène physiologique, il est impossible d’avoir une autre certitude que la certitude physique. Et encore, c’est là le maximum de certitude, car bien souvent, sinon toujours, étant donné l'étendue de la puissance démoniaque, il faudra faire appel, dans la constatation du fait miraculeux, aux circonstances d’ordre moral dont on a parlé tout à l’heure ; el. de ce chef, la certitude morale est celle qui, le plus ordinairement, pourra être obtenue. Et encore, parce que cette certitude n’est pas le résultat d’une évidence absolue, elle pourra comporter un doute, doute absurde, déraisonnable, mais doute possible, tout comme la certitude de la foi, qui s’appuie sur une évidence extrinsèque. Cf. J. de Tonquédec, op. cit.. p. 225 ; Van Ilove. op. cit., p. 360. Ce dernier auteur fait opportunément observer qu’il n’est pas nécessaire « que l’on puisse reconnaître tous les miracles ou avoir au sujet de chacun d’eux la même certitude… Pour que le miracle soit un signe de la révélation à la portée de toutes les intelligences, il suffit cpie le caractère surnaturel de quelques miracles puisse être reconnu par tous avec certitude, ou même que certains groupes de faits extraordinaires trahissent incontestablement l’intervention divine ». lbid., p. 361.

In concreto.

1. Les miracles de l’Ecriture

Abstraction faite de la consignation des miracles dans l'Écriture, il faudrait simplement, au sujet de la certitude que nous pouvons avoir de leur réalité. retenir les règles qu’on vient de poser. Mais le concile du Vatican lui-même a tenu a fixer sur ce point la vérité. Le troisième chapitre de la constitution Dei Filius s’occupe spécialement des miracles racontés dans l'Écriture, et qui démontrent l’origine divine de la religion chrétienne. Le quatrième canon condamne comme hérétiques ceux qui rejettent en bloc la réalité de ces miracles, la possibilité de les discerner ou leur force probante. « C’est d’une façon indirecte que notre canon définit la réalité des miracles de l'Écriture. Il condamne, en effet, comme hérétiques ceux qui se fonderaient sur une prétendue impossibilité des miracles, pour soutenir que tous les récits de faits miraculeux, même ceux de la sainte Ecriture, doivent être relégués au nombre des fables et des mythes. Mais, en rangeant cette allégation parmi les hérésies, il met par suite au nombre des dogmes de foi catholique l’affirmation que ces récits ne sont ni des fables, ni des mythes, en d’autres termes. l’affirmation que ces récils sont véridiques et que les miracles en question sont réels. En vertu du symbole

des apôtns, la réalité du miracle de la résurrection de JéSUS-Çhrist et de son ascension était déjà au catalogue des vérités de foi catholique. Mais notre canon ne se prononce sur aucun récit particulier. Il se contente de frapper les rationalistes qui nient la possibilité des miracles, et les traitent tous de fables