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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 11.1.djvu/262

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NICOLAS 1er (SAINT


royaume de Louis le Germanique) Jaffé, n. 2880 (la lettre n’esl pas conservée, mais est signalée par les Annales de Fulda, an. 868, Monam. Germ. hist.,

Script., t. i, p. 380) et nu souverain lui-même. Jaffé, n. 2883 (texte récemment édité dans Motuun. Germ. hist., EpisL, t. vj, p. 610), L’archevêque de Mayence,

Liulberl devrait jouer en Germanie le même rôle qu’Hincmar dans la France occidentale. Peut-être Nicolas avait-il l’intention de réunir à ce sujet un grand concile a Home. Mais il mourait quelques semaines plus tard, le 13 novembre, sans avoir su, probablement, que tous ces efforts étaient désormais Inutiles. A Constantinople, la politique avait guéri elle-même les maux qu’elle avait causés : la révolution de palais qui, le 23 septembre 867, avait mis un terme au règne de Michel, avait porté un rude coup à Photius, lequel fut destitué peu après ; le 23 novembre 867, Ignace était solennellement restauré sur le siège patriarcal. Ainsi se terminait la premier acte de cette longue tragédie de Photius. On a dit ailleurs, voir art. Jean VIII, comment le pape Hadrien II continua la politique de son précécesseur, comment le pape Jean VIII fut amené a l’abandonner. Du moins, en la personne de Nicolas, le Siège apostolique avait-il été amené à formuler les principes qui, selon lui, dominaient la question, c’est à savoir l’autorité de Rome dans toutes les grandes questions qui intéressent les Églises particulières, son droit à dirimer non seulement les problèmes doctrinaux mais les conflits de personne, sa fonction d’instance suprême à qui doivent en définitive aboutir tous les appels.

2° Nicolas l" et l’Occident. — Ce sont très exactement les mêmes principes que Nicolas I er applique dans les affaires d’Occident. Ici encore, pour faire prévaloir les droits du Siège romain, il a dû entrer en conflit aussi bien avec les puissances séculières qu’avec les grands dignitaires ecclésiastiques.

1. Rapports avec les souverains temporels. Le divorce de Loihaire II. — On se tromperait, d’ailleurs, en voyant dans Nicolas I er un théoricien de ce que l’on est convenu d’appeler la théocratie médiévale ; rien chez lui qui s’apparente à la théorie du « pouvoir direct ». Si l’on peut signaler quelques interventions de sa part dans des affaires strictement politiques, ce n’est qu’à titre d’arbitre dont le jugement a été sollicité par les parties. C’est le cas en 859 ; après que Louis le Germanique a envahi les États de son frère Charles le Chauve, celui-ci fait appel à l’intervention du pape, comme Hadrien II le rappellera en 870, Jatîé, n. 2926 ; et Louis le Germanique doit s’expliquer à Rome. Jaffé, n. 2679. Six ans plus tard, quand les deux frères ennemis se réconcilient à l’entrevue de Tusey (865), c’est au tour du roi de Lotharing-e, Lothaire II, de craindre les entreprises de ses deux oncles. Il envoie Liutfrid en Italie pour demander les bons offices du pape par l’intermédiaire de l’empereur Louis II : petens illmn apud apostolicum (le pape) obtinere qttatenus pro co palruis suis epistolas mitteret, ut pacem servantes de regno suo nullum ei impedimentum (acerent. Quod et Hludoivicus irnperator obtinuit. Annales Hincmari, an. 865, P. F.., t. cxxv, col. 1221 B. Et, dans la circonstance, le pape avait d’autant plus de mérite à intervenir en faveur de Lothaire, que ses deux oncles prenaient prétexte, pour justifier leur pression, des scandaleuses résistances de leur neveu aux décisions pontificales dans l’affaire de son divorce. Par où l’on voit clairement que Nicolas est encore fort loin de la conception médiévale, qui fait du bras séculier l’exécuteur des jugements d’ordre spirituel rendus par la papauté. Ces deux interventions sont uniquement provoquées chez lui par le sentiment de l’équité naturelle : de même « encore une démarche antérieure (862-863) par laquelle il réconcilie Charles

le Chauve avec ses lils. Jaffé, n. 270 :, . 2728. Ne va-t-il pas de soi que le successeur de Pierre doit, autant qu’il est en lui, faire régner le droit, la justice et la paix ?

C’est du même point de vue que doit se juger l’altitude du pape Nicolas I »  » dans l’affaire du divorce de Lothaire IL Mais celle-ci eut de si importantes répercussions, et dans des domaines si divers, qu’elle doit être exposée avec quelques détails.

a) Le divorce de Lothaire II. Les complaisances i/ l’épiscopat lorrain. — Marié peu après son avènement, en 855, à Theut berge, qu’il n’aimait pas et qui, de plus, était stérile, le jeune roi de Lotharingie, Lothaire II, ne tarda pas à retourner à ses premières amours et à s’afficher publiquement avec son ancienne maîtresse Waldrade. Mais ce qu’il voulait surtout, c’était faire rompre son mariage légitime pour donner à la femme qu’il aimait le titre d’épouse et de reine ; on peut dire que ce sera l’obsession de tout le règne de ce malheureux prince (855-869). Pour tout le détail de cette question, voir R. Parisot, Le royaume de Lorraine sous les Carolingiens (843-923), Paris, 1899, p. 142-324.

Dès 857, les pires calomnies sont mises en circulation sur le compte de Theutberge. Antérieurement à son mariage, elle aurait eu avec son propre frère Hubert, abbé de Saint-Maurice en Valais, des relations incestueuses et d’un genre assez spécial. Coupable de ce crime, Theutberge aurait perdu, d’après une opinion courante à cette époque, tout droit à se marier ultérieurement ; son mariage avec Lothaire était donc nul. Sans tirer d’ailleurs, immédiatement, toutes les conséquences de cette accusation, Lothaire enferme sa femme dans un monastère. Mais l’année suivante, 858, les grands du royaume le contraignirent à reprendre celle-ci ; un « jugement de Dieu » auquel s’était soumis le champion de Theutberge ayant prouvé l’innocence de l’épouse calomniée. La réconciliation ne dura guère. Toujours décidé à obtenir le divorce, Lothaire emploie les pires moyens pour arracher à Theutberge l’aveu de sa culpabilité. L’ayant obtenu, il se décide à soumettre l’i lïaire au jugement de ses évoques.

Jusqu’à ce moment, le procès semblait être demeuré une affaire purement civile, où les grands du royaume surtout avaient dit leur mot. En janvier 860, au contraire, c’est l’épiscopat lorrain qui la prend en main dans un concile réuni à Aix-la-Chapelle, et dont les meneurs semblent êtreGunther etThietgaud, les deux archevêques de Cologne et de Trêves. Se rendant compte de la gravité de la question, les prélats invitent le roi à s’abstenir désormais de toute relation conjugale avec Theutberge et autorisent celle-ci à prendre le voile. Mais ils ne se sentent pas assez assurés pour prononcer la nullité du mariage ; ils voudraient bien prendre l’avis de leurs confrères voisins. Cf. Mansi, Concil., t. xv, col. 547 B. — L’ne seconde réunion, à Aix encore, à la mi-février, ne donne pas de résultats plus précis. La reine avoue son crime avec Hubert, les évêques décident qu’elle l’expiera par une pénitence publique et la réclusion dans un monastère. Il faudra ensuite aviser aux moyens de mettre le roi à l’abri du péril d’incontinence qui menace sa jeunesse. Les évêques toutefois n’osent pas aller encore jusqu’à annuler le mariage du souverain, et à l’autoriser à en contracter un autre. Communication du tout est adressée au pape par une lettre un peu embarrassée et néanmoins correcte. Mansi, Lbid., col. 548 sq.

Nous ne savons ce que répondit le pape ; mais le courant de cette année 860 et l’année 861 amenèrent un développement considérable de l’affaire. D’une part, l’archevêque de Reims, Hincmar, y entrait avec résolution et publiait la longue consultation intitulée