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OCCAM. ORIGINALITÉ


Doctor venerabilis, auquel renvoie plusieurs fois Occam, n’est autre que Lupold de Bebenburg (voir ici, t. ix, col. 1143) dont le traité De juribus regni et imperii avait paru en 1339. Occam, d’ailleurs, se sépare sur plusieurs points de l’auteur allemand.

8. An rex Anglise pro succursu guerræ possil recipere bona ecclesiarurn, Scholz, t. ii, p. 432-453, doit dater de 1338-1340. La réponse d’Occam est affirmative ; l’autorisation du pape pour la levée de ces subsisdes n’est pas nécessaire.

9. Tractaius de jurisdictione imperatoris in causis matrimonialibus, Goldast, t. I, p. 21-24, très brève consultation rédigée en 1342, comme le mémoire de même titre attribué à Marsile de Padoue (voir ici, t. x, col. 158). L’authenticité de l’un et de l’autre écrit a été contestée ; S. Riezler croit que celle du traité d’Occam est vraisemblable, sinon au-dessus de toute contestation. Loc. cit., p. 256. La thèse de l’auteur est que, la preuve de la nullité du premier mariage de Marguerite Maultasche étant faite, il n’y a pas lieu de recourir à l’autorité du pape pour une déclaration de nullité. A la vérité, il s’agit bien ici d’une de ces causes que se réserve la curie romaine ; mais cette réserve ne peut priver l’empereur de ses droits souverains. Ici l’auteur, élargissant le débat, comme il l’avait fait dans le traité précédent, explique de manière catégoriqu » 2 ses idées sur l’origine et les limites de l’autorité pontificale. Il faut transcrire ce passage qui résume aux mieux les idées d’Occam à ce moment.

Dicitur itaque, quod quamvis romanus episcopus sit vlcarius Christi, non successor proprie, et ideo Christo in potestate sit insequalis, cum potestas vicarii potestati illius cujus vices gerit non debeat adsequari jundeetlimitatam habet a Christo, ut omnia possit de jure quæ nec legi divin », nec legi naturre reperiuntur adversa. Si enim talem haberet plenitudinem potestatis, qualem Sedem apostolicam occupantes sibi damnabiliter usurparunt, et quam plures adulatorie et erronée sibi tribuere moliuntur, omnes mortales es>ent servi sumnii pontilicis, secundum districtissimam acceptionem vocabuli servi, quod libertati evangelicæ legis, quæ in Scripturis divinis legitur sive scribitur, apertius adversatur : et ideo talis assertio est inter hæreses merito computanda. Loc. cit., p. 24.

10. Le Dialogue, Goldast, t. ii, p. 398-957 (Scholz, t. ii, p. 392-395, a donné quelques compléments), est de beaucoup, dans le domaine qui nous occupe, l’œuvre la plus considérable d’Occam. A la vérité, il faut en défalquer la IIe partie, p. 740-770, qui n’est autre chose que le De dogmatibus papæ Johannis, et qui a d’autant moins de titre à figurer ici qu’elle n’a rien d’un dialogue, alors que tout le reste de l’ouvrage expose les idées de l’auteur sous forme de questions posées par un disciple et résolues par un maître..

La première partie, divisée en sept livres, roule autour de la question des définitions en matière de foi et particulièrement de la détermination de l’hérésie. Bien que l’exposé s’oriente tout entier vers la preuve de l’hétérodoxie de Jean XXII et des conséquences qu’il en faut tirer, il soulève une masse de problèmes d’ordre général : infaillibilité du pape, du concile, de l’Église ; procédure à suivre au cas où un pape tomberait dans l’hérésie. Le tout est exposé, comme d’ordinaire chez Occam, sans que l’auteur semble prendre parti, et il faudrait, pensons-nous, une étude fort attentive de ces pages compactes pour en dégager la pensée à laquelle se rallie le frère mineur révolté contre Jean XXII.

La troisième partie est restée incomplète. Elle aurait dû comprendre neuf traités ; les deux premiers d’ordre théorique, les sept suivants s’annonçant comme devant exposer les « gestes » des principaux acteurs du drame : Jean XXII, Louis de Bavière, Benoît XII, Michel de Césène, Ot Guiral (le ministre général substitué à Césène, voir son article), Guillaume d’Occam

et enfin d’autres personnages secondaires. Tout cet ensemble d’ordre historique n’a pas été rédigé, ou ne s’est pas conservé. Seuls existent les deux premiers traités, l’un, divisé en quatre livres, sur l’autorité du pape et du clergé ; l’autre, en trois livres, sur les droits de l’empereur. Ici encore le mode de composition, où se balancent continuellement la thèse et l’antithèse, rend bien difficile toute affirmation sur la pensée de fond de l’auteur. Se ralliait-il sur l’origine, la signification, l’étendue du pouvoir pontifical au radicalisme de Marsile de Padoue ? Voir ici, t. x, col. 159 sq., et surtout col. 162. Nous ne le pensons pas, et le 1. IV du premier traité : Utrum Christus constituera Petrum principem et prælatum vel non ? nous paraît aboutir à une affirmation de l’origine divine du pouvoir de Pierre et indirectement de ses successeurs. Ce qu’Occam conteste, c’est l’indéfinie extension des pouvoirs que théologiens et canonistes ont découverts dans la méditation des textes scripturaires qui fondent les droits du pontife romain. Semblablement sa doctrine sur les droits que possède l’empereur en matière spirituelle et spécialement dans l’élection du pape, nous semble tout uniment ériger en thèse ce qui s’était passé à Rome en avril 1328. Il reste que le Dialogue constitue un formidable arsenal où les adversaires de la papauté et les partisans de la prépotence du pouvoir civil trouveront de quoi s’approvisionner.

11. Tractaius de electione Caroli IV, inédit ; quelquei fragments seulement ont été publiés soit par Hôfler, Aus Avignon, ꝟ. 14 sq., soit dans le traité consacré par Conrad de Megenberg à la réfutation de ce pamphlet d’Occam. Voir Scholz, t. ii, p. 349-363. C’est une attaque contre l’élection de Charles IV, représenté comme la créature de la cour d’Avignon, une attaque aussi contre le serment que l’empereur a dû prêter au pape.

12. Tractaius de imperatorum et pontificum potestate, Scholz, t. ii, p. 453-480, à compléter par "W. Mulder dans Arch. franc, hist., t. xvii, 1924, p. 72-97. Occam sent le vide se faire autour de lui et s’adresse à l’opinion pour présenter sa défense. C’est donc bien un De/ensorium, mais qui tourne vite à l’attaque. Dans aucun autre de ses ouvrages, Occam n’a pris aussi violemment à partie la papauté et le système curialiste. Débarrassée de tout l’appareil des discussions scolastiques. sa pensée s’exprime avec une netteté qu’elle n’a nulle part ailleurs. Il ne conteste pas l’institution divine de la papauté, ni les droits de celle-ci à régir les choses spirituelles, en conformité, d’ailleurs, avec le droit naturel et la loi divine positive. Mais il s’élève avec violence contre les prétentions de « l’Église d’Avignon » à diriger les choses temporelles, et tout spécialement l’empire. Sur celui-ci l’Église n’a aucun pouvoir, ni en vertu du droit des gens, ni en vertu du droit civil ou canonique, ni même en vertu de la coutume. Occam, du reste, n’entend pas non plus subordonner l’Église à l’empire ; en dehors de cas exceptionnels où les circonstances justifient une intervention de celui-ci sur celle-là et réciproquement, il préconise une coordination et une coopération des deux pouvoirs.

Les idées d’Occam sur toutes ces matières n’ont pas fait encore, que nous sachions, l’objet d’études approfondies, tenant compte des changements que l’évolution des événements y a nécessairement introduits. Des difficultés énormes s’opposent à un travail de ce genre.

É. Amann.

III. Originalité philosophique et théologique d’Occam. — Étant donnée l’insuffisance actuelle du travail critique, il serait imprudent de vouloir discerner le point de départ d’Occam et l’ordre dans lequel se sont formées ses pensées. Nous avons noté à l’article Nominalisme quelques traits essentiels de