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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 11.1.djvu/56

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NESTORIUS, INTERVENTION DE ROME


cpXuocpoûai, bien que la partie dogmatique y attire surtout l’attention. S’élevant d’ailleurs bien au-dessus de la question du Théotokos, Cyrille y définit son concept de « l’union hypostatique », y ébauche une théorie de la « communication des idiomes ». En dehors de cette svcocnç xa0’Ô7r6aTaat, v, il ne voit pas de moyen d’éviter la doctrine hétérodoxe des deux fils. Col. 48 B. L’union des personnes, ëvcoaiç TcpoawTtwv, préconisée par certains (lisez Nestorius), est nettement répudiée comme contraire à l’Écriture. Cyrille veut encore espérer que Nestorius, préoccupé de sauver la paix des Églises, se ralliera au Théotokos et à la formule de l’union hypostatique.

Or, à cette formule, telle qu’il la comprenait et quoi qu’il en fût de la pensée de Cyrille, Nestorius ne pouvait adhérer. C’était lui demander d’accepter, comme il le dira plus tard, « un monstre incompréhensible » et de rejeter la théorie dyophysite en laquelle il avait été élevé. Sa réponse, Epist., v, Tàç (iiv xa6’y)[xwv û6pe’, ç, Nestor., p. 173 (cf. P. G., t. lxxvii, col. 49), ne constitue pas seulement une fin de non-recevoir ; c’est, en même temps qu’une critique du concept cyrillien, une justification par l’Écriture et le symbole de Nicée de sa propre terminologie. Seule l’expression de Christotokos appliquée à Marie, sauvegarde, sans qu’il soit besoin de commentaires, la doctrine des deux natures. L’union de celles-ci s’exprime au mieux, d’autre part, par le mot de ouvâçeia (ttjv toûtcov eîç évôç TrpoawTrau cruvâçetav) ; la comparaison évangélique du « temple et de celui qui l’habite » (cf. Joa., ii, 19) est assez propre à la représenter ; elle justifie une théorie assez particulière de la « communication des idiomes ». Redescendant de ces hauteurs, Nestorius termine sa lettre par une allusion désagréable aux soucis que se fait Cyrille. Tout va bien à Constantinople et les renseignements que l’on possède à Alexandrie se révèlent controuvés. La cour sait à quoi s’en tenir au point de vue dogmatique : « En somme on voit se réaliser chez nous le mot de l’Écriture : « La maison de Saùl (= l’hétérodoxie, mais aussi Alexandrie) déclinait ; celle de David (= la saine doctrine, mais aussi Constantinople ) se fortifiait. » La méchanceté était transparente ; elle était à peine atténuée par les salutations d’usage qui terminaient la lettre.

5. Ainsi les choses prenaient, sur les rives du Bosphore, une tournure fort défavorable à Cyrille. Son administration y était épluchée et sa doctrine aussi. Nestorius lui mandait qu’un synode venait d’avoir lieu où les manichéens (lisez les monophysites) avaient été condamnés, que la cour s’y ralliait. Il était urgent de conjurer le péril. C’est à quoi travaille Cyrille dans les premiers mois de 430 ; il s’agit d’éclairer la cour sur la doctrine de Nestorius et sur celle qu’il professe lui-même ; en même temps il faut s’assurer d’un appui en Occident : Rome va être alertée.

La plume à la main, Cyrille commence par dépouiller toutes les œuvres de Nestorius qu’il a pu se procurer, et constitue le dossier qui l’année suivante sera ouvert au concile d’Éphèse. Tous les passages, où son adversaire exprime une doctrine qui lui paraît suspecte, sont soigneusement rassemblés, puis chacun d’eux est examiné dans une petite dissertation, parfois assez prolixe, où Cyrille discute la position de Nestorius, en montre l’hétérodoxie ou tout au moins le danger, finalement lui oppose ses vues propres. Ainsi naquit le volumineux ouvrage intitulé dans la Collectio Vaticana (son seul témoin) : KocTà tûv NscïTOpfou SuCT<py ; [iicov KSMitôi&koç àv-rfppYjaiç îyyouv oî 7révTe —t6[i.ot, toû àyôou KupîXXou, A. C. O., i, 1, 6, p. 1-106 ; cf. P. G., t.Lxxvi, col. 9-248. A cette arme massive il en ajoute d’autres d’un calibre un peu moins considérable, plus spécialement desti DICT. DE THÉOL. CATH.

nées à la cour. A l’empereur lui-même il adresse le A6yo ; TcpoCTcpwv^uxoç rcspl ttjç ôpôîjç mazzon ;. A. C. O., i, 1, 1, p. 42-72 ; P. G., ibid., col. 1133-1200. Aux deux Augusta, c’est-à-dire à Eudocie, femme de Théodore et à Pulchérie, sœur de l’empereur, il dédie une exhortation de même titre, A. C. O., i, 1, 5, p. 26-62 ; P. G., ibid., col. 1336-1420 ; une autre encore, bien longue, aux deux jeunes sœurs de Fuichérie, Arcadie et Marine, Todç sùasêscrrâTaiç SzgkoIvoaç, A. C. O., ibid., p. 62-118 ; P. G., ibid., col. 12011336. Jusqu’à quel point tous ces personnages étaient-ils capables de vérifier l’exactitude des citations qu’accumulait Cyrille, de suivre sa dialectique en tous les méandres de son argumentation, de s’élever aux concepts métaphysiques où se jouait sa pensée ? Cyrille comptait-il sur quelque exégète pour diriger ses augustes lecteurs ? Ou bien espérait-il seulement que l’ensemble de sa « défense » ferait impression par sa masse, « ce tir de barrage » pouvant enrayer l’action déjà déclenchée ? Remarquons tout au moins que, dans ce volumineux courrier destiné à la cour impériale, l’évêque d’Alexandrie se maintient dans le mode irénique ; il n’attaque pas directement Nestorius, il ne se défend pas lui-même, il expose avec sérénité sa propre pensée, et c’est ici peut-être que l’on en trouvera l’expressionn la plus spontanée. Sauf le monophysisme verbal, toujours sous-jacent à son vocabulaire, c’est d’excellente théologie.

Avec Rome, dont l’appui lui paraît indispensable, il va procéder autrement. Epist., xi, P. G., t. Lxxvii, col. 80-85 ; A. C. O, i, 1, 5, p. 10 ; elle doit être contemporaine des écrits précédents : printemps 430. C’est une accusation en forme qu’il dépose contre le titulaire de Constantinople, ses discours déplacés (exTorax), sa lutte contre le Théotokos, les troubles que son attitude a causés à Constantinople, leur retentissement en Egypte. Le tout est poussé très au noir. Constatant l’inutilité des efforts faits par lui pour ramener le calme, Cyrille demande conseil au pape. Mais, pour éclairer sa religion, il lui fait tenir tout un dossier de l’affaire : ses propres lettres sur la question, un recueil des homélies de Nestorius. Pour en faciliter l’examen, il prend soin d’y joindre les extraits qu’il en a faits (sans doute ceux qui sont réfutés dans YAdv. Nestorium) ; ces extraits, pour plus de diligence encore, ont été traduits en latin. Il n’est pas interdit de faire remarquer le vague des accusations portées contre l’évêque de Constantinople : En dehors de la question du Théotokos présentée d’une manière fort sommaire, col. 81 B, on ne relève que cette vague réprobation : le Christ est blasphémé, 8ua<pY)(i.sÏTxi. Xpicrroç, col. 84 C. Sans doute le dossier envoyé complétait-il ces informations. Et l’envoyé d’Alexandrie, Posidonius. devait fournir oralement les précisions nécessaires.

/II. l’intervention de home. — Ce n’était pas la première fois que Rome entendait parler de Nestorius ; les renseignements divers qui lui étaient venus de Constantinople avaient inspiré au pape Célestin une vive défiance à l’endroit de l’archevêque. Augmentée par l’intervention de saint Cyrille et sans doute aussi par le rapport en règle déposé par le moine Cassien spécialement délégué à l’examen de l’affaire, cette disposition du pape lui dicte à l’automne de 430 un ultimatum adressé à Nestorius et dont les conséquences vont être incalculables.

1° Attitude défiante du pape Célestin à l’endroit de Nestorius. — Aussi bien l’archevêque de Constantinople, dans la première lettre qu’il avait adressée à Rome et dans celles qui suivirent, avait été on ne peut plus maladroit. Epist., i, Nestor., p. 165. Les évêques pélagiens déposés par Célestin s’étaient réfugiés en Orient ; plusieurs d’entre eux, venus dans la

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