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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 11.1.djvu/567

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    1. ORATOIRE##


ORATOIRE. SPIRITUALITÉ, BÉRULLE

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l’efficace et la vertu qui rend ce mystère vif et opérant en nous… le goût actuel, la disposition vive, par laquelle Jésus a opéré ce mystère est toujours vif, actuel et présent à Jésus… Cela nous oblige à traiter les choses et mystères de Jésus, non comme choses passées et éteintes, mais comme choses vives et présentes, et même éternelles. » Œuvres, p. 1052-1053. Ce sont ces dispositions habituelles qu’il s’agit de mettre en nous, ces états que nous devons essayer de reproduire, que M. Olier honorera dans la fête de V Intérieur de Jésus et de Marie.

On peut, pour plus de clarté, faire quelques applications ; ainsi à la Présentation : « Cette fête est… la dédicace de cette oblation que vous faites de vous à Dieu le Père que vous avez commencer au jour de votre incarnation… Vous faites incessamment cette oblation de vous-même, mais nous ne sommes pas capables, en cette vie mortelle, de la remémorer incessamment. » Ibid., p. 1024. De même, des perpétuels hommages rendus à son Père : « Nousparlons d’une adoration, qui est par état et non par action, d’une adoration qui n’est pas simplement émanante des facultés de l’esprit et dépendante de ses pensées, mais qui est solide, permanente et indépendante des puissances et des actions, et qui est vivement imprimée dans le fond de l’être créé, et dans la condition de son état. » Grandeurs, p. 493. Et surtout de sa passion : « Son cœur est perpétuellement ouvert, éternellement navré, cette navrure de la lance n’est que marque de la vraie et intérieure navrure de son cœur. » Œuvres, p. 1046.

Ces dispositions habituelles du Christ, ces états, il s’agit de les avoir, de les reproduire : « Cette manière d’honorer Dieu par état est. non simplement dans les facultés de l’esprit comme dépendantes des pensées et des actions de l’entendement et de la volonté, mais dans toute la capacité de la créature solide, permanente, indépendante des puissances et des actions et comme imprimée dans le fond de l’âme. » H. Bremond, Hist. litt. du sent, rel., t. vit, p. 131. Le même auteur ajoute : « Le sublime est le pays natal des bérulliens… Agents de liaison entre la grande théologie et la loule dévote, ils ont inventé pour le traitement des plus humbles, une thérapeutique du sublime. » Ibid., p. 134.

d) Pour en arriver là, il faut en effet une vertu plus qu’ordinaire ; l’ascèse du P. de Bérulle, basée sur les idées qu’il se fait du Verbe incarné, en particulier sur la théorie des états de Jésus, sur les dispositions intérieures qu’il faut s’efforcer d’avoir en soi est en effet plus crucifiante que l’ascèse ordinaire :

a. Dans la vie habituelle, on ne doit sans doute rejeter aucun des moyens couramment indiqués pour corriger ses défauts, comme l’examen général ou particulier, mais dans quel but : « Prenons vie, dit Bérulle, en ce mystère de vie (l’incarnation)… vie constante et invariable, comme l’état de ce très haut mystère est invariable dans les variétés des temps, des lieux et des accidents auxquels le Fils de Dieu s’est trouvé sur la terre… tirons de l’état immuable de ce divin mystère, un état de grâce invariable en Dieu. » Œuvres, p. 952.

b. Dans ce que saint Ignace, appelle l’élection, le choix du genre de vie, le retraitant se demande : quelle décision vais-je prendre ? Avec Bérulle il se dit : Dieu < veut que nous ayons une part singulière en ses divers états, selon la diversité de son élection tur nous et de notre piété envers lui. Ainsi, il se partage soi-même à ses enfants… appropriant aux uns sa vie et aux autres sa mort ; aux uns son enfance, aux autres sa puissance ; aux uns sa vie cachée, aux autres sa vie publique… C’est ; i lui de nous approprier aux états… à nous de nous y lier et d’en dépendre, i

Ibid., 940-941. A chacun c’e se demander : Quelle est la part de mon héritage ? »

c. En résumé, l’école bérullienne se plaît à contempler les merveilles de la vie divine dans l’âme de Jésus, puis elle considère que cette vie divine doit découler dans chacun des membres c’u corps mystique de Jésus pour reproduire la vie et la mort du Christ, s’approprier ses dispositions intérieures, ses états. Chacun de nous est et doit bien se représenter qu’il est une nue capacité pour recevoir ; au contraire « Jésus-Christ est une capacité divine des âmes et il leur est une source de vie dont elles vivent en lui… Il les atïermit et les fait croître jusqu’à leur pleine et parfaite consommation en cette unité sacrée qui est le lien et la paix de Dieu et des hommes. » Œuvres. p. 968-970. Ce thème splendide, il le développe avec enthousiasme : « Nous devons regarder notre être comme un être manqué et imparfait, comme un vide qui a besoin d’être rempli… nous devons regarder Jésus comme notre accomplissement : car il l’est et le veut être, tomme le Verbe est l’accomplissement de la nature humaine qui subsiste en lui… Il nous faut lier à Jésus comme à celui qui est le fond de notre être par sa divinité : le lien de notre être à Dieu par son humanité ; l’esprit de notre esprit, la vie de notre vie, la plénitude de notre capacité. » Ibid., p. 1180.

d. Qui ne voit que cette doctrine demande une abnégation complète pour être comprise et vécue ? Le même passage continue par cette conclusion : < Notre première connaissance doit être de notre condition manquée et imparfaite et notre premier mouvement doit être à Jésus comme à notre accomplissement. .. Jamais nous ne devons agir que connue unis à lui, dirigés par lui, et tirant esprit de lui. pour penser, pour porter et pour opérer, faisant état que, sans lui, nous ne pouvons ni être, ni agir pour notre salut. » Œuvres, p. 1180. « H ne suffit à l’homme d’être subordonné, mais il doit être désapproprié et anéanti et approprié à Jésus. » Ibid., p. 914. Les supérieurs doivent t être adhérents à Jésus, adhérents à ses voies, adhérents à son amour ». Nous devons « nous démettre de toute notre suffisance et industrie naturelle, comme n’étant qu’un néant devant Dieu. » Mémorial de direction, p. 50, 59. Il se sert fréquemment eu mot adhérer, adhérence à Jésus, ce qui veut dire être uni, attaché à lui au point de ne faire qu’un avec lui : l’adhérence étant la liaison acceptée, voulue. Il emploie aussi appartenance, application, servitude ; adhérence est plus expressif et plus exact, car < celui qui adhère à Dieu est un même esprit avec lui.

I Cor., vi, 17. L’adhérence en effet : 1° met l’âme dans un état d’assujettissement qui se soumet à la puissance que Jésus a sur nous et lui donne droit de faire en nous et de nous ce qui lui plaira ; 2° en une pureté de regard et d’amour qui lui donne une vigilance et une fidélité pour ne rien faire et ne rien désirer que l’honneur de Jésus : 3° elle élève le chrétien à une vraie imitation c’e sa vie et de ses vertus divines, pour en faire l’image expresse de Jésus. Il faut donc mourir à soi-même pour vivre à Jésus : mystère de mort qui précède un mystère de vie, mort qui rappelle le suprême anéantissement qu’exigent les mystiques pour arriver à l’union complète avec Dieu : " Il nous transforme en ses qualités par sa puissance et il nous rend célestes, resplendissants, lumineux et éternels comme lui. » Grandeurs, p. 317.

Ces idées, il voulut que ses disciples eussent l’occasion de les méditer dans l’office qu’il composa pour la fête qu’on appelle souvent des Grandeurs de Jésti*. mais qui est proprement La fête de Jésus, n’ayant pas pour objet un mystère particulier de sa vie. mais l’union même des deux natures en sa divine personne.

A l’Oratoire, chaque maison, chaque chambre, porte