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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 11.2.djvu/185

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    1. ORIGÈNE##


ORIGÈNE. ŒUVRES THÉOLOGIQUES

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Ce que nous venons de dire laisse entrevoir les besognes qui attendent le commentateur du De principiis. De très bonne heure, ce livre a été violemment attaqué : il est possible qu’il ait rencontré des contradicteurs avanl même la mort d’Origène. En tout cas, au début du iv c siècle, puis vers la fin de ce môme siècle, puis surtout au temps de l’empereur Justinien, il a été l’objet de critiques nombreuses et souvent justifiées. Sans doute, on ne saurait pas juger équitablement un tel ouvrage en se plaçant au point de vue de l’orthodoxie postérieure : Origène n’a pas pu, en parlant des grands mystères du christianisme, employer un langage aussi précis que celui des théologiens postérieurs aux conciles de Nicée, d'Éphèse et de Chalcédoine, et il a droit aux circonstances atténuantes. Mais on ne peut s’empêcher de signaler dès maintenant la témérité de certaines de ses hypothèses, sinon de plusieurs de ses affirmations : les théories qu’il propose sur les fins dernières en particulier sont loin de trouver appui dans la tradition. Il était dès lors naturel que l'Église ne reconnût pas là son enseignement et qu’elle fût amenée à mettre les fidèles en girde contre de telles doctrines.

Des autres ouvrages théologiques d’Origène, nous ne connaissons guère que les titres, et quelques fragments assez insignifiants.

Nous savons ainsi qu’Origène avait écrit, pendant qu’il était encore à Alexandrie, dix livres de Slromates. Le même titre avait été déjà employé par Clément et il désigne, semble-t-il, un ouvrage de composition assez lâche, dans lequel pouvaient se mélanger les exposés doctrinaux et les commentaires exégétiques. Peut-être ceux-ci y tenaient-ils la première place, s’il faut croire saint Jérôme, qui, dans la lettre à Læta, range cet ouvrage au nombre des écrits relatifs à l'Écriture. Par saint Jérôme et par Origène lui-même, qui y fait plusieurs allusions, nous savons que les Stromates expliquaient des passages du Deutéronome, de Daniel, des lettres de saint Paul.

Le traité Des principes renvoie, à propos de la résurrection, à d’autres livres où l’auteur a traité plus complètement le sujet, De princip., Il, x, 1. Des ouvrages sur la résurrection, qui ont été plusieurs fois combattus pendant l’antiquité, nous avons gardé quelques fragments. Saint Jérôme semble signaler un traité en deux livres sur la résurrection, et deux dialogues sur le même sujet ; mais il ne nous est pas possible de savoir en quoi les dialogues se distinguaient du traité, et nous sommes d’autant plus embarrassés que le même auteur cite quelque part le quatrième livre sur la résurrection.

4° Œuvres ascétiques. —

Origène a laissé deux ouvrages ascétiques : L’Exhortation au martyre, et le livre Sur la prière.

Le premier est un écrit de circonstance. On était en 235 ; la persécution de Maximin venait de commencer ; Origène et ses amis de Césarée, Ambroise et Protoctète, pouvaient à tout instant redouter d'être jetés en prison et conduits devant les tribunaux. De la même plume avec laquelle il avait naguère encouragé son père Léonide, Origène adressa à ceux qu’il aimait quelques pages ardentes pour les exhorter à rendre le bon témoignage au Seigneur. Ces pages évidemment improvisées, écrites tout d’un jet, sont peut-être les plus belles qu’ait jamais publiées le grand docteur, car on y sent vibrer son âme ardente et fière de chrétien authentique. Pas l’ombre d’une déclamation ; une parfaite miîtrise de soi ; une entière sérénité en face des supplices et de la mort elle-même. Origène s’y livre tout entier : à ceux qui seraient tentés de ne voir en lui qu’un philosophe égaré par erreur dans l'Église, il suffirait de lire V Exhortation au martyre pour comprendre leur illusion. Parmi les

Pères, aucun n’a su mieux parler qu’Origène de la grandeur du témoignage rendu par les martyrs.

Le Traité sur la prière, que ne mentionnent ni Eusèbe ni saint Jérôme, mais qui est cité par Pamphile, se divise assez nettement en deux parties : dans les dix-sept premiers chapitres, Origène traite de la prière en général, de sa nécessité et de son efficacité. Les chapitres suivants (xviii-xxx) sont un commentaire de l’oraison dominicale. L’auteur ne se contente pas d’expliquer le texte sacré selon les règles de l’exégèse la plus minutieuse ; il en tire des leçons de vie pratique et d’ascèse ; et celles-ci, vigoureusement tracées, ont contribué à faire de cet ouvrage un des plus fréquemment lus et cités dans l’antiquité chrétienne.

Correspondance.


A tous les écrits que nous venons de citer, il convient d’ajouter une correspondance qui a dû être extrêmement riche et variée. Origène était en relations avec un nombre considérable de ses contemporains ; et la réputation que lui avait value sa science, avait contribué à faire de lui une sorte d’oracle sans cesse et de partout consulté. De bonne heure, on constitua des recueils de ses lettres. Eusèbe pour sa part avait fait un de ces recueils qui ne contenait pas moins de cent lettres ; dans son catalogue, saint Jérôme ne signale pas moins de quatre collections, dont une en neuf livres. Nous connaissons les destinataires de quelques-unes de ces lettres : l’empereur Philippe l’Arabe, l’impératrice Sévéra, le pape Fabien et beaucoup d’autres évêques à qui il démontrait son orthodoxie ; mais nous n’avons plus, dans leur intégrité, que deux lettres d’Origène, adressées l’une à Jules Africain, l’autre à saint Grégoire le Thaumaturge.

La lettre à Jules Africain traite de l’histoire de Suzanne et des vieillards, et en démontre la canonicité : à son correspondant qui affirmait le caractère apocryphe de cette histoire, Origène rappelle que d’autres parties de Daniel, voire d’autres livres reçus par l'Église, dans le canon des Écritures ne figurent pas dans le texte hébreu : l’autorité de l'Église n’estelle pas en définitive supérieure à celle de la synagogue"? La lettre à Grégoire de Néocésarée étudie les relations entre le christianisme et la littérature ou la philosophie profane. Grave problème qui passionnait alors les esprits curieux et qui devait être maintes fois repris par la suite : Origène n’a aucune peine à en fournir la solution définitive : le chrétien peut étudier les sciences helléniques pourvu qu’il ne s’arrête pas à elles, mais qu’il les fasse servir à une intelligence de plus en plus complète de l'Écriture.

Aux ouvrages authentiques d’Origène, dont nous achevons ici la liste, on pourrait ajouter peut-être quelques autres titres : saint Jérôme semble attribuer a Origène un Onomasticon, c’est-à-dire une liste explicative de noms hébreux de personnes et de lieux contenus dans la Bible ; Victor de Capoue cite deux fragments d’un premier livre d’Origène Sur la Pûque et encore un ITspl çuasto :, qui comptait au moins trois livres. Nous n’oserions affirmer avec certitude l’existence de ces ouvrages. « Origène est l’un des trois ou quatre plus grands noms de l’ancienne littérature chrétienne. Pas plus qu’aucun de ses prédécesseurs, il n’a cherché à faire œuvre d’art ; il est indifférent à tout ce qui n’est pas la recherche de la vérité par l’intelligence de l'Écriture. Ses écrits sont issus directement de son enseignement ou de sa prédication ; la doctrine en a été préparée par de vastes lectures et de longues méditations ; la forme en est improvisée ; beaucoup ne sont que des leçons ou des sermons recueillis par les sténographes. La composition y est assez libre, sans toutefois jamais devenir confuse ; l’expression sans recher-