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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 11.2.djvu/422

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1977
1978
PARALIPOMÈNES (LIVRES DES). BUT


III. But. I.’auteur du livre des Paralipomènes, ou le voit d’après l’analyse qui précède, rapporte des événements, relatés déjà, pour la plupart, dans des livres historiques antérieurs, ceux surtout de Samuel et des Rois. La question se pose tout naturellement de savoir dans quelle intention il a repris cette histoire île Juda. On ne saurait, avec les anciens exégètes, admettre qu’il n’avait d’autre but que de compléter les récits déjà existants et de combler leurs lacunes ; s’il en était ainsi, pourquoi leur aurait-il si souvent emprunté ce qu’il rapporte des mêmes événements ? I.a réponse à la question est, en partie du moins, déjà donnée par ce coup d’œil jeté sur le contenu des Paralipomènes, où toutes choses sont envisagées du point de vue religieux ou mieux sacerdotal, où tout l’intérêt, en définitive, se ramène à cette vie d’Israël qui a son centre dans le culte du Temple de Jérusalem. A ces préoccupations religieuses s’en joignent d’autres, d’ordre politique ou plutôt dynastique. La détermination des unes et des autres importe, on le conçoit, à la connaissance du caractère même de l’œuvre du Chroniqueur et des conséquences qui peuvent en résulter pour l’interprétation de l’histoire qu’il nous a transmise.

But religieux.

Ce but apparaît tout d’abord

dans la nature même des événements rapportés : dans l’ensemble, ils sont d’ordre religieux. C’est ainsi que le règne de David, décrit du point de vue surtout profane dans le IIe livre de Samuel, apparaît au I" livre des Paralipomènes, employé principalement à l’organisation du culte et à la préparation de la construction du Temple. Il n’en va pas autrement pour le règne de Salomon : construction et dédicace du Temple, organisation de son service y tiennent de beaucoup la première et la plus importante place. Pour les autres rois, leur histoire est surtout celle des événements religieux qui ont marqué leurs règnes ; tout ce qui s’y rapporte est l’objet de longues descriptions, qu’il s’agisse de fêtes liturgiques ou de la participation des prêtres et des lévites à tel ou tel événement, même profane, une guerre par exemple : des réformes religieuses, entreprises par de pieux rois, le Chroniqueur est plus amplement informé que le livre des Rois ; Josaphat, Ézéchias et Josias nous apparaissent, dans son œuvre, sous les traits de zélés réformateurs du culte de Jahweh

Les événements eux-mêmes d’ailleurs, qu’ils soient d’ordre profane ou religieux, sont envisagés du point de vue religieux ; régis par Dieu, ils en manifestent les volontés ou en réalisent les jugements. Un rapport de causalité est établi entre l’attitude religieuse des rois ou du peuple et le sort qui leur est réservé ; de même pour les individus : le sort et la conduite de chaque homme sont en étroite connexion ; tout bien, tout bonheur est la récompense de la piété comme tout malheur est le châtiment du péché. De tels rapprochements, sans doute, ne font pas défaut dans d’autres livres, dans ceux des Rois, par exemple, mais ils n’y sont ni aussi fréquents, ni aussi étroits. Pour s’en rendre compte, qu’il suffise de comparer ce qui est dit au sujet des mêmes rois dans les livres des Rois et dans ceux des Paralipomènes ; d’Asa, par exemple, III Rcg., xv, 13, et II Par., xvi, 2-3, 9-10, 12 ; de Josaphat, III Reg., xxii, 49, et II Par., xix, 2-3, xx, 35-37 ; ou de Joas, IV Reg., xii, 18-19, et IIPar., xxiv, 17-19. Particulièrement significative à cet égard est encore la comparaison entre ce qui est dit du règne de Manassé au IVe livre des Rois, xxi, et au IIe livre des Paralipomènes, xxxiii, 1-20 : au récit du premier, le Chroniqueur ajoute la mention du châtiment qui devait correspondre à l’impiété de Manassé, à savoir la déportation à Babylone, xxxiii, 11, et celle de sa conversion en exil et de son zèle contre les dieux étran gers à son retour dans son royaume, qui lui valurent un règne de 55 ans, plus long qu’aucun autre en Juda. Le jugement ainsi porté sur les rois du point de vue religieux envisage souvent leur attitude relativement au culte, à l’observation ou à la violation de ses prescriptions.

Très grande, en effet, est la place réservée ua culte dans les Paralipomènes. Tout ce qui a trait au Temple, à sa construction, à son organisation, à son service, est longuement raconté. C’est d’abord l’arche de Jahweh et ses différents transferts jusqu’à la monta gne de Sion, où David a le dessein de lui élever un abri digne du Dieu d’Israël, I Par., xvii. C’est ensuite l’énumération détaillée des préparatifs en vue de la construction du Temple et des recommandations de David à Salomon à son sujet, I Par., xxi-xxii, xxvinxxix ; le récit de sa construction et la description de son ameublement et de sa dédicace se poursuivent dans six chapitres du IIe livre des Paralipomènes, ii-vn, tandis que sont minutieusement notés les travaux entrepris par Joas, Ézéchias et Josias pour le relever des ruines, de l’abandon, dans lequel l’avaient laissé les rois impies, et les purifications rendues nécessaires parles profanations qui l’avaient souillé.

Le personnel de la maison de Jahweh est, de même, l’objet de descriptions détaillées : les différentes classes de lévites, de prêtres, de chanteurs et de portiers, représentées comme établies par David, sont longuement énumérées, I Par., xxm-xxvi. L’activité de ces serviteurs du Temple n’est d’ailleurs pas limitée aux horizons de la maison de Jahweh ; certains événements intéressant la vie de la nation en subissent l’influence. C’est ainsi que, lors du schisme des dix tribus, prêtres et lévites du royaume d’Israël, par leur adresse à Roboam, affermissent sa cause, II Par., xi, 13-17 ; c’est ainsi encore que Josaphat envoie les lévites par le pays pour y enseigner la Loi, II Par., xvii, 8-9, et les adjoint aux prêtres et aux chefs des maisons d’Israël pour les jugements de Jahweh et les contestations, II Par., xix, 8-11 ; on sait enfin la part importante prise par les lévites dans le couronnement de Joas et le meurtre d’Athalie, II Par., xxiii. Les chanteurs et les musiciens, dont la place est toute marquée aux cérémonies du transfert de l’arche, I Par., xv-xvi, ou de la dédicace du Temple, II Par., v, 12-13, apparaissent encore dans l’armée de Josaphat pour célébrer Jahweh, II Par., xx, 19, et au couronnement de Joas, II Par., xxiii, 13.

Si religion et cultet iennent une si grande place dans l’œuvre du Chroniqueur, ce n’est pas tant souci d’historien que d’apôtre, préoccupé sans doute de faire connaître une religion dont les manifestations prouvent assez l’origine et la valeur, mais surtout d’amener et de conserver des fidèles à cette religion et à ce culte. Pour y parvenir, il faut inspirer un grand respect de la Loi, celui qu’avaient les ancêtres d’Israël, pieux observateurs de ses prescriptions ; certes, sa violation par les rois impies surtout n’a été que trop fréquente, mais la règle générale est demeurée la conformité à la Loi et, si parfois la tradition conservée au livre des Rois semble l’oublier, le( hroniqueur sait s’en rendre indépendant ; la comparaison de quelques passages parallèles souligne son souci d’édification, cf. I Reg., i, 1, et I Par., vi, 28, 34 ; II Reg., vi, 14, et I Par., xv, 27 ; III Reg., iii, 4, et HPar., i, 3 ; III Reg.. ix, 25, et II Par., viii, 12-13 ; IV Reg., xv, 7, et II Par., xxvi, 23,

Du même souci procéderont certaines omissions. Tels épisodes de la vie de David sont discrètement passés sous silence ; ainsi en est-il des troubles, des trahisons et des meurtres qui ont marqué son accession au trône ; ainsi en est-il encore de ses difficultés familiales, de la révolte d’Absalon, de ses fautes, de ses