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    1. PÉCHÉ ORIGINEL##


PÉCHÉ ORIGINEL. L’ÉPOQUE BYZANTINE

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précisions, les déterminations et les distinctions que nos scolastiques d’Occident ont introduites. A partir du xive siècle, on constate cependant une influence discrète de la théologie latine, due principalement aux traductions d’écrits augustiniens et thomistes qui commencent à circuler à cetle époque.

Vue d’ensemble.

1. Existence du péché d’origine.

— Elle est unanimement et continuellement aflirmée tant dans les écrits d’ordre dogmatique que dans les sermons et homélies et aussi dans les écrits ascétiques et mystiques. Les prédicateurs en parlent et en décrivent les suites lamenlahles, spécialement dans les homélies pour la fête de l’Annonciation, où il est de règle de tracer un tableau d’ensemble de l’économie divine du salut. Les canonisles commentent les canons de Cartilage contre l’hérésie pélagienne — il s’agit des deux premiers canons dits de Milève, en réalité deCarthage(418), quidanslasériedes canons africains, approuvés par le concile in Trullo, portent les numéros 1Il et 112, ou bien 120 et 121 — et aussi le canon 1 du concile d’Éphèse (131) contre Célestius. Cf. Balsamon, Zonaras et Aristène, P. G., t. cxxvii, col. 349-352 ; t. cxxxviii, col. 365-370 ; Matthieu Blastarès, Syntagma alphabeticum, A. P. G., t. cxliv, col. 1049 BC ; l’hérésie deCélestius consistait à nier que les petits enfants tiennent d’Adam le péché originel : où yàp ètpsXxovTat. tvjv TrpoyovixYjv ht, ’ASdeji. à[i.apxîav.

Variés sont les noms par lesquels est désignée la faute originelle. En tant qu’elle est le péché même d’Adam transmis et imputé à ses descendants par la génération charnelle, elle est appelée proprement le péché originel, rj 7rpoyov[XY) àpiapTia. Plus souvent, elle reçoit le nom de Trpoyovixôv ou TcporcaTopixciv à|j.âp-TY )(ji.a, et ce mot désigne alors l’état peccamineux, le péché à l’état habituel hérité d’Adam, par opposition au péché actuel, suivant la force propre du mot àfxâptyjjjloc. Une appellation fréquemment employée est celle de tache originelle, 6 7ïpoyovi, xô< ; p’Jiroç. D’autres dénominations sont prises des effets du péché et nous avons alors les termes de corruption, cpOopâ ; chute, 7ITCOCTIÇ, TtTÔ>[xa ; mort de l’âme et du corps, Gàvaxoç ; misère originelle ou paternelle, 7) TcpoTîaToptxT) TaXa17r « pia ; malédiction ou sentence de condamnation, àpâ, xaTapa, xardcxpiaiç. Enfin, ce péché est parfois considéré comme une dette de la nature humaine à l’égard de Dieu, tô XP^OÇ "rijç cpûaewç.

2. Nature.

Les théologiens byzantins se sont rarement posé la question, si souvent agitée en Occident : En quoi consiste le péché originel en lui-même, en tant qu’il est distinct de ses suites, mortalité, concupiscence ?

La plupart adoptent le point de vue objectif de saint Jean Damascène : Le péché originel, c’est le péché même d’Adam en tant qu’il est justement imputé par Dieu à toute sa postérité. L’humanité est considérée comme un seul homme qui a péché en la personne de son chef physique et représentant moral. De par la loi de nature nous étions tous virtuellement contenus en Adam, et, en ce sens, nous avons tous péché en lui ; sa faute est devenue la nôtre. Cette conception, qui est de beaucoup la plus simple et que tout le monde doit admettre en quelque façon, ne mérite point le reproche que certains lui font, de ne pas expliquer comment le péché originel est propre à chaque enfant d’Adam, unicuique proprium. Il nous est aussi propre que nous est propre la nature humaine reçue par la génération charnelle. Nous encourons l’inimitié de Dieu offensé parla prévarication d’Adam, parce que nous sommes quelque chose d’Adam et que nous lui sommes unis par la nature que nous recevons de lui. Quant à chercher à expliquer cette mystérieuse solidarité, les Byzantins ne paraissent pas l’avoir tenté. Tout au plus trouverons-nous quel que comparaison dans le genre de celle-ci, proposée par Théodore Abou-Qurra (| 820) : « Au dire des agriculteurs, si l’on plante une branche de vigne détrempée d’huile, la vertu de l’huile se fait sentir jusque dans le fruit, c’est-à-dire le raisin. Il eu est de même d’Adam : il avait reçu une nature immaculée ; niais l’ayant contaminée par le péché et les passions, il nous la communique en cet état : outci) xal ô’-J.x. TT7.p7.Laoov t^jv cpûatv xocOapdv, ê)(pavev aùrrjv tS à ; xapTÎa xal toiç Ttàttem, xal SieSôOt) etç ôi-iâç’r t tïo16t » )ç. » > Upusc, vi, P. G., t. xcvii, col. 1524 A.

Les divers théologiens.

Quelques citations

choisies des principaux théologiens montreront l’objectivité de cette vue d’ensemble.

1. — On a pu relever chez Photius un ou deux passages qui paraissent mettre en question l’existence même du péché originel. Dans la Question lxxxiv à Amphiloque, P. G., t. ci, col. 552-556, expliquant le passage de l’épître aux Romains : in quo omnes peccaverunt, e<p' Tràvrsç fjjiapTOV, il rejette la traduction de saint Jean Damascène : in quo, c’est-à-dire : per quem (SC où), et conclut en disant : sç’ci tc&vtec, rçwap-rov, c’est-à-dire : parce que tous ont péché ù l’imitation de leur père : voilà ce qui attire sur eux le njême supplice. Ayant imité sa conduite, ils se sont attiré la même condamnation : xal yàp / ; xoivcovîa

TYJÇ TCpà^ECOÇ SIC T7JV XOOVtovlaV aÙTOUÇ TT)Ç xaTaSixTjç

Guvqkccazv. Théodoret avait dit quelque chose de semblable sur le même passage, et Photius s’inspire vraisemblablement de lui dans la question présente. C’est, en effet, une habitude chère aux Byzantins de transcrire les textes anciens sans trop regarder au contenu. Aussi n’est-il pas rare de rencontrer, dans leurs écrits, de véritables contradictions ! Un autre passage, de même signification et se rapportant au même texte scripturaire, est signalé par Hergenrôther, Photius von Konstanlinopel, t. iii, p. 466, et provient d’une chaîne exégétique. S’il est authentique — et l’on sait quelle prudence s’impose en pareille matière (cf. R. Devreesse, Chaînes exégétiques grecques, dans le Supplément au Dictionnaire de la Bible, t. i, col. 1083-1234) — il doit provenir de la même source, c’est-à-dire de Théodoret. On se tromperait du tout au tout, si l’on voulait trouver en ces deux passages la véritable pensée de Photius sur le péché originel. De nombreux passages de ses écrits authentiques nous montrent qu’il ne s’est pas écarté, sur ce point, de la doctrine commune de l’Église byzantine. Ainsi dans sa Bibliothèque, cod. liii-liv. P. G., t. ciii, col. 91-98, il retrace brièvement l’histoire de l’hérésie pélagienne tant en Occident qu’en Orient, et la traite de dogme impie. Ailleurs, il parle souvent de la chute commune de la nature humaine, de la transmission du péché et de la chute à toute la nature humaine, de la domination universelle du péché originel. Cf. Homil. in nativitatem Dei genitricis, P. G., t. en. col. 547-562 : tyjç àvGpcomvr] ? cpùo-scoç twv irpoyovixcov à[j.apT7)[i.âTCûv tco xpaTst 8eo > ouXci>(J.Év7)Ç. —’H ttjç ôqixp-TÏaç airopà ôXco tw yévei —apaçuetera. Et encore, Ad Amphil., q. c.xci, P. G., t. ci, col. 924 CD : àv6pa>-{vr 7raaacpùaiçÛT : ô/p£(oç’ï'oùâ|j.apTrjj J iaTOç. Dans une Homélie sur i Annonciation publiéepar S. Aristarchis, ’DcotIo-j Xôyoi xal ôu.iXîai, t. H, Constantinople, 1901, p. 372374, il est dit que « Marie donne sa propre beauté à notre nature informe, souillée par la tache originelle » : tt)v ïjfjisTspav aaopçov ISéav, îjv ô tûj —poyôvcov xaTsx7)Xl8coas pÙTtoç, tco otxsuo èvxyXauo’J ? r { t xàXXet.

2. — Au XIe siècle, Théophijlacte de Bulgarie, commentant le c. v de l’épître aux Romains, expose d’une manière remarquable le dogme du péché originel : « Le but de l’Apôtre, dit-il, est de démontrer que ceux qui n’avaient pas mangé du fruit défendu et n’avaient pas péché, à l’exemple d’Adam, étaient