Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.1.djvu/340

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
665
666
PELAGE 1er


parler d’Ibas n’est d’ailleurs guère différente de celle d’Amphiloque, ni même de celle de Cyrille dans sa lettre aux Orientaux. C’est donc bien à tort qu’on veut accuser Ibas de nestorianisme, ou encore qu’on lui reproche d’avoir parlé d’ « une vertu » (ce qui devrait l’innocenter totalement) : saint Épiphane ne s’est pas exprimé différemment. Mais, poursuivent les détracteurs de la lettre, Ibas a prononcé contre l’attitude de Cyrille à Éphèse des paroles injurieuses, il a déclaré que la haine avait poussé Cyrille à agir contre Nestorius et que Cyrille l’avait fait déposer avant l’arrivée de l’épiscopat d’Orient et sans enquête préalable ; d’où l’on conclut qu’Ibas a excusé Nestorius. Bien à tort, réplique Pelage. Ibas a dit tout simplement que Cyrille, qui voulait faire approuver ses capitula, a brusqué le cours ordinaire des assemblées synodales ; il a déclaré que c’est pour cette raison que les Orientaux, une fois arrivés à Éphèse, le retranchèrent, lui et les siens, de leur communion. Autre accusation contre Ibas : il a écrit que Nestorius ne put rentrer à Constantinople parce qu’il y était détesté, en particulier, par les principaux de la ville. Mais, répond Pelage, ne doit-on pas comprendre, d’après la lettre elle-même, que la cause de cette haine, c’était précisément l’attaque du dogme par Nestorius ? Nouveau chef d’accusation : la lettre d’Ibas contient l’éloge de Théodore de Mopsueste et de ses écrits. Qu’on s’en prenne donc, riposte Pelage, aux lettres de Jean d’Antioche et au concile de Chalcédoine et à Cyrille. On lui reproche encore d’avoir écrit sed confitentur in templo et in eo qui in hoc inhabitat, qui est unus Jésus Christus. Pareille phrase, explique Pelage, peut s’entendre dans un sens excellent : on en trouverait d’équivalentes dans saint Jean Chrysostome et dans saint Augustin. Ibas, qu’on veuille bien s’en convaincre, écrivait à un ami, il ne composait pas un précis de théologie ; de plus, à Chalcédoine, aucune protestation ne s’éleva contre sa lettre ; nul n’incrimina ses opinions dogmatiques, nul ne protesta contre l’éloge qu’il faisait de Théodore. D’où il résulte, conclut notre auteur, que l’adversaire visé derrière Ibas, c’est le concile, c’est le pape saint Léon, tacitement anathématisé par Vigile. A partir de cet endroit, et jusqu’à la fin, Pelage s’en prend violemment à Vigile, dont il n’avait prononcé le nom, jusque-là, que tout à fait incidemment. Pour jeter le discrédit sur la lettre d’Ibas, on a imaginé une nouvelle argumentation, assez singulière, d’ailleurs, puisque dans un endroit, on expose qu’Ibas aurait promis d’anathématiser sa lettre parce qu’injurieuse envers Cyrille et ses capitula et que, dans ces conditions, le concile ne pouvait la recevoir ; dans un autre endroit, par contre, on soutient que la lettre n’est pas de lui. Qu’on relise donc, reprend Pelage, les actes du procès d’Ibas : on y verra clairement que le premier chef d’accusation relevé contre lui regardait non point Cyrille, mais la foi ; que les juges se déclarèrent satisfaits de son serment d’anathématiser Nestorius, le maître d’impiété : que, plus tard, il confirma, devant les Pères de Chalcédoine, sa condamnation de Nestorius. Où donc trouve-ton, dans tout cela. I race d’une condamnât ion de la lettre d’Ibas ou d’une rétractation de ce qu’il avait dit contre l’attitude de Cyrille ? Et pourtant voila quelles argut Les ont développées Vigile et ses

satellites, les dictatures Pierre’et Tullianus. Il résulte I

de là que c’est a juste titre que l’on prend la défense

["rois-Chapitres et que le troisième fudicalum de Vigile s’avère totalement Inopérant.

I.e livre VI débute par un bref rappel de l’histoire

de l’Église d’Alexandrie depuis la morl de Marcien (février 457) Jusqu’à la consultation des évoques prescrite par l’empereur Léon. l’empereur qui

sondait leurs dispositions, les évêques répondirent qu’on devait s’en tenir au verdict prononcé à Chalcédoine sur les condamnés et les réhabilités ; au premier rang de ces derniers étaient Eusèbe de Dorylée, Ibas et Théodoret, victimes de Dioscore : le concile les vengea de l’injustice qui leur avait été faite par le pseudo-concile d’Ephèse ; d’autres, au contraire, durent présenter des marques de repentir. Cette parenthèse achevée, Pelage reprend son plaidoyer. Condamner Ibas et Théodoret, c’est approuver le concile de Dioscore, qui jugea Ibas sans l’entendre. C’est bien en vain que les satellites de Vigile veulent tourner la difficulté et prétendent, dans le « judicalum de la troisième indiction », que l’évêque d’Édesse a renié sa lettre. Par suite de son inconstance, Vigile nous ramène au temps de Dioscore ; qu’on accepte son a troisième judicalum » et les décisions de Chalcédoine se trouvent annulées. Enfin, Pelage revient sur la prétention qu’ont les hérétiques de s’abriter derrière Cyrille et de se poser en vengeurs de sa mémoire. Il répète l’argument dont il s’était déjà servi plus haut, à savoir que les Pères du concile étaient mieux au courant que qui que ce fût des opinions et de la conduite de Cyrille. De plus, ajoutet-il, le fait de louer un orthodoxe ne confère pas un brevet d’orthodoxie et l’opposition à Cyrille ne parut pas aux Pères constituer, à elle seule, un crime d’hérésie. Dans ce cas-là, il faudrait donner à Eutychès, à Dioscore, à Sévère, qui se réclamaient hautement de Cyrille, un brevet de catholicité. Mais, d’un autre côté, si on est hérétique parce qu’on s’en prend à Cyrille, quelle place devra-t-on assigner aux évêques orientaux qui le séparèrent de leur communion, quelle place à Isidore de Péluse et à Gennade ? Mais aussi quelle place réserver à Cyrille qui refusa de nommer saint Jean Chrysostome dans les diptyques, à son oncle, Théophile, qui déversa sur le saint évêque des torrents d’injures. Sur une phrase de Théophile, notre mémoire s’arrête brusquement. Dans une lettre, postérieure de quelques années aux événements que nous avons relatés, Pelage apportait, sur la composition de son mémoire en faveur des Trois-Chapitres, ce témoignage précis : …et sex libros in defensionem capitulorum clausus per diversa monasleria et exilia non habens codicein, sed quæ mihi scripto diversi hæretici… secrelo mittebant. Neues Archiv, t. v, 1879, p. 651. La détention, la difficulté de se procurer des livres, voilà bien les deux plaintes qui reviennent le plus souvent dans la « défense ». D’autre part, et à diverses reprises, Pelage nomme trois actes de Vigile relatifs aux Trois-Chapitres. Le titre qu’il leur donne, les citations qu’il en fait, permettent de dater, avec assez de précision, notre plaidoyer ; le premier de ces actes, appelé par lui « premier judicatum », se laisse iden tifier avec ce que nous appelons le judicatum de Vigile (Il avril 548) ; le second est désigné sous l’ex pression de judicatum de la première indiction » : c’est notre Constitution (14 mai 553) ; le troisième. Contre lequel va toute sa colère et la violence de son argumentation, désigné par lui comme i troisième (udicatum « ou papier de la seconde Indiction >. doit eiie Identifié avec l’acte du pape Vigile portant confirmation de ce qui s’était fait, durant l’été contre les Trois-Chapitres. Sans doute possible, Pelage avait devanl les yeux cette ratification du concile donnée par Vigile le 2A février 554. D’où il suit qu’on ne risque guère d’errer eu datant le mémoire du <ii. nie Pelage « les premiers mois de l’année 554 ; on ne peut guère préciser davantage Bientôt après, l’aperçut que la prison et la colère sont dmui

conseillères ; nous allons le voir, maintenant,

regretter sa défense des Trois-Chapitn