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PÉNITENCE. SAINT THOMAS, LA CONTRITION


théologiens avaient voulu sauvegarder, même en attribuant à la seule contrition l’efficacité rémissive des péchés, saint Thomas l’explique clairement en établissant la liaison de la vertu et du sacrement de pénitence.

Il est entendu qu’aucun péché n’est irrémissible, tant que le pécheur est en vie : quelles qu’aient été ses fautes, il peut toujours se convertir. La pénitence efface ces fautes, et cette loi universelle ne souffre pas d’exception. III a, q. lxxxvi, a. 1. De la part du pécheur, cette pénitence comporte — on l’analysera plus loin dans le détail — un acte libre de repentir et d’amour de Dieu. ia-II 16, q. lxxxvi, a. 2 ; In IV am Sent., dist. XIV, expos, text. ; Cont. gent, t. III, c. eux ; De malo, q. vii, a. 2, ad 3um. Ce mouvement du libre arbitre est nécessaire, conformément à la nature de l’homme : le péché actuel, en effet, consiste en un acte de volonté personnelle ; l’acte de réparation, pour les adultes, devra donc être un acte volontaire. De veritate, q. xxiv, a. 1, ad 19um ; q. xxviii, a. 3, ad 17 ura ; Sum. theol., IMI », q. lv, a. 4, ad 6um ; q. cxiii, a. 3 ; a. 7, ad l « m.

Mais, par suite de l’incarnation et de la rédemption, Jésus-Christ a seul le pouvoir d’obtenir de Dieu la rémission de nos fautes : seul, par sa passion, il a pleinement satisfait à la justice de Dieu. Toute grâce de justification dérive de sa grâce de chef. Il peut appliquer les fruits de sa passion à qui il veut et de la minière qu’il a déterminée. Cf. III a, q. xlix, a. 1 et 3 ; ([. viii, a. 5 et 6. Or, c’est à l’Église que Jésus-Christ a confié le retour en grâce des pécheurs baptisés : il a pour eux institué un sacrement spécial, ayant pour but de remettre les péchés commis après le baptême. III a, q. lxxxiv, a. 7. « Remettre », disons-nous avec saint Thomas, et non pas seulement déclarer remis. Aussi la pénitence est-elle bien la planche de salut après le naufrage. Ibid., a. 6.

Par conséquent, la pénitence-vertu ne pourra obtenir de Dieu la rémission des péchés commis après le baptême que si elle s’achève en pénitence-sacrement, soit en réalité, sait, dans le cas d’impossibilité, en désir. Cont. gznt., t. IV, c. lxxii. La vraie contrit Ion — quels que soient d’ailleurs le degré et la nature de cette contrition — inclura donc la résolution de recevoir le sacrement de pénitence. Suppl., q. i, a. 1. La vraie pénitence doit chercher une compensation à offrir à Dieu ; dans ce but, elle va librement se soumettre au jugement du prêtre, pour en recevoir l’indication d’une satisfaction appropriée. Elle s’achève ainsi dans la pénitence-sacrement. Suppl., q. vii, a. 2, 3.

Ce n’est pas encore assez. On pourrait concevoir que la vertu de pénitence serve simplement de préparation au sacrement. Dans le baptême, par exemple, le sacrement est constitué indépendamment des sentiments de pénitence qui y amènent le catéchumène adulte. Mais, dans le sacrement de pénitence, rien de tel : la pénitence entre dans la composition même du nie sacram îtatel. D’intérieure qu’elle est quand on la prend isolément, elle devient extérieure et prend valeur de signe sacramentel, d’abord parle fait qu’elle l’accompagne parfois de douleur sensible, mais sur|i iree qu’elle se manifeste par la confession et par la satisfaction. Ainsi, par leur intermédiaire, la pénitence intérieure se trouve engagée dans le rite extérieur ; elle constitue ainsi la matière du sacrement, i laquelle s’ajoute l’absolution du prêtre qui achève le sacrement et lui donne la vertu d’agir. III a, ’I LXXXIV, a. I et 2 ; q. XC, a. 1 3 ; In I’"' » Sent.,

dtol XVI, ., i, a, 1. qu. i : dist. XXII, q. n. a. 1,

qu, 2, ad l", n. C’est encore la nature des choses (pu demande qu’il en soit ainsi, Dans la pénitence, l’homme

obtient le bénéfice (le la vertu de la passion du Christ

telon la mesure de ses actes propres qni sont la matière le la pénitence IIP », q. lxxxvi, a. i. ad >" m.

3. Acte/ ; de pénitence et actes de vertu de la pénitence.- —

La vertu de pénitence supposant l’infusion ou l’existence de la charité dans l’âme (il n’y a pas de vertu morale infuse sans la charité), ne pourront être actes de vertu de pénitence que les actes accompagnés de charité : « Quant à l’acte et à l’inclination habituelle de charité, ils sont donnés en même temps que l’acte et l’inclination habituelle (aclus et habitus) de la pénitence et que l’inclination habituelle (habitus) des autres vertus. En effet (cf. I^II 36, q. cxiii, a. 7, 8), au moment de la justification de l’impie, le mouvement du libre arbitre vers Dieu, acte de foi animé par la charité, et le mouvement du libre arbitre contre le péché (acte de pénitence) sont simultanés. Cependant, de ces deux actes, le premier a sur le second une priorité de nature, car c’est en vertu de l’acte d’amour de Dieu que l’acte de vertu de pénitence s’oppose au péché. Le premier acte est donc la raison et la cause du second. » III a, q. lxxxv, a. 6. Il en est ainsi dans toute justification, soit extrasacramentelle, soit sacramentelle. C’est la grâce opérante qui possède la priorité sur les mouvements libres de la volonté dans l’ordre de la causalité. Cf. q. i.xxxvi, a. 4, ad 2um ; I a -II », q. exi, a. 2.

Mais il peut exister dans l’âme des actes de pénitence, qui ne soient pas encore actes de vertu de pénitence. Ce sont les actes qui préparent, dans l’ordre du temps, les actes et l’inclination habituelle de la pénitence-vertu : actes de foi, d’espérance sans charité, actes de crainte servile. III a, q. i.xxxv, a. 6. L’attrition, en tant qu’elle n’est pas encore informée par la charité, est un de ces mouvements de pénitence qui précèdent dans l’ordre du temps la justification : acte de pénitence, mais pas encore acte de vertu de pénitence. Voir plus loin, col. 980. Toutefois, dans le langage de saint Thomas, comme dans celui des théologiens anciens, la simple attrition, même s’appuyant sur un motif inférieur au motif de charité, est déjà un acte de vertu de pénitence, en celui qui possède la charité : « En celui qui a la grâce (sanctifiante), toute douleur du péché est contrition ; comme pareillement, tout acte de foi, joint à la grâce habituelle, est un acte de foi formée. » De veritate. q. xxviii. a. 8.

Contrition.

L’étude des éléments du sacrement

de pénitence, d’après saint Thomas, présuppose l’assertion fondamentale suivante : Comme dans tous les sacrements, « dans la pénitence se trouve aussi un premier élément, qui n’est que sacrement (sacramentum tantum), à savoir les actes extérieurs posés, tant par le pécheur pénitent que par le prêtre qui absout, puis un second qui est à la fois effet sacra mentel et sacrement (res et sacramentum) et, enfin, un troisième qui est simplement effet sacramentel et n’est pas sacrement (res tantum). la rémission du péché. Le premier élément, pris dans son intégrité, est cause du second. Le premier et le second réunis sont d’une certaine façon, cause du troisième. 1 1 1°, q. i.xxxiv. a. 1, ad 3um : cf. In / V » m Sent., dist. XIV, q. i, a. 1, qu. 1 ; dist. XXII. q. ii, a. 1.

t. Définition et nature. Le mot contritio, broiement, indique, par une métaphore saisissante, l’état du pécheur qui abandonne complètement toute affection pour le péché, que son propre sentiment rete nail a la manière d’une solide continuité, On peut en donner différentes définitions, selon qu’on envisage

la substance de l’acte, son mode d’activité, son prin

clpe ou ses effets Saint Thomas s’arrête de préférence .i celle qui envisage la substance de l’acte : la contrl

lion est mie douleur voulue de nos pèches, jointe a la résolut ion de nous confesser et de donner tatlsfac lion. Cette définition montre bien comment la cou

trition est un acte de la vertu de pénitence et a la