477 PROBABILISME. AVÈNEMENT, JEAN DE SAINT-THOMAS
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une juste appréciation des choses comme la négligence <ic ces distinctions élémentaires et capitales. Transcrivons ici le raisonnement de Suarez, où par le moyen des mots sont assimilées des choses hétérogènes :
Qui habet du ! >ium negativum voti, rêvera non scit se tiabere votum ; ergo habet ignorantiam negationis de tali voto. Ad hanc enim ignorantiam non est necessarium scire votum non esse ; salis est non scire votum esse…
Sous prétexte donc que dans le doute on ne sait pas, le doute ne ferait plus qu’un avec l’ignorance, qui consiste aussi à ne pas savoir. Il faut dire à l’inverse que .1 —, savoir se vérifie selon deux modes irréductibles, qui son ! l’ignorance et le doute. Le caractère commun
i, deux états de l’esprit est qu’on y est privé d’un
Mieni terme ; mais, de l’un à l’autre, quelle diversitél Le vice du raisonnement est de réduire à un seul
- oncept négatif, comme si non blanc voulait
toujours dire noir.
Ou bien enflnlarègle juridique est fondée suruneconi ep1 Ion de ^obligation comme onéreuse, qu’il faut donc reindre et n’imposeï que si elle est certaine. Mais une telle considération ne peut avoir cours en morale L’obligation n’y est pas plus onéreuse que le bien, sou objet. Il n’j a d’odieux en morale que le mal. Nous retrouvons l’esprit déjà pré ent dans le second argument ci-dessus. Fonder là-dessus la non-obligation du doute est pour le moins hors de propos. Mais on CODD prend que chez qui est imbu de cel esprit les i l
Ment le tour que nous apercevons ici. Nous entre
voyons que le probahilisme ne consiste pas seulement en des thèses. Il exprime un génie nouveau dans la théologie morale.
I.a page que nous venons d’analyser signale donc, uns nous, un moment décisif dans l’histoire qui
nous suivons. Le tutiorisme médiéval et traditionnel
est radicalement évince. El l’Opération consiste eu
somme en la création d’une zone réfléchie de la cous
imorale, ou régneront désormais des principes
auxquels, sans que rien soit changé réellement, on
déclarera le doute couvert i en cerl il ude. le mot de pi.1 tique réservé à celle ci devant la doter du eai.,
requis d’un m ; en compensation, on appel
lera spéculatif le doute antérieur à la réflexion, et qui ne
fail que représenter le rapport de la conscience a la vérité. En l’étude de la conscience probable, au traité des 1. 1rs humains. Suaiez « ’nonce des propositions apl’.i reniées a celles qu’on vient de lire. I a distinction du probable et du douteux, héritage du Moyen Ait. perd d’ailleurs de plus en plus de son intérêt. Et, comme
nous signalions chez Médina ou Vasquez la facilité
nouvelle île passer du doute a la probabilité, dans la position de SuarCZ on tendra a traiter la conscience probable selon les règles élaborées pour le doule. Déjà
les dénominations de doule positif et de doute négatif, rencontrées ci-dessus et volontiers employées par Suarez, témoignent cette attraction du probable dans la sphère du douteux. Au fond, la seule règle d’action devient celle certitude pratique dont nous parlions à l’Instant, en laquelle le probable non moins que le don leux sera aisi ment converti. Aussi, avant exposé les différentes doctrines relatives à l’usage moral de la probabilité, Suarez énonce 1 il : Primo quotiescumque est opinio probabills hanc actio
tiem non esse matant vel pioliibilam vel pi : ecept.un. potest aliquis lonuaic conscicnliani certain vel practicain conforme ! ! ! tali opinion !. De bon. et mal. /non. neL, disp. XII,
sn t. VI, t. IV, p. 151.
El la justification de cette règle nous ramène à l’une des théories ci-dessus exposées, nous découvrant le même esprit :
Quamdiu est judiclum probabile quod nulle sit lex prohl
bens vel pnreipiens actioncm, lalis lex non est sullicicntcr
proposita vel promulgata homini ; unde, cura obligatio sit ex se onerosa et quodammodo odiosa, non urget donec certius de illa constet. Neque contra hoc urget aliqua ratio. quia tune rêvera non est contraria pars tutior in online ad conscientiam neque Ibi est aliquod dubium practicum nec periculum. Ibld.
(Ile dérision intéresse les opinions relatives au droit lui-même. Suarez distingue tris nettement de celles-là des opinions au traitement desquelles il applique une règle contraire :
Quando opiniones versantur circa rei ipsas an sint talil natune ni condition ! *, sape tenetur borna pnefern nionrni certain probabill et probabiliorem minus probabili,
quando SCilicet ex justilia vel cantate tenetur vitarc d.imniini vel 1. Il ommoehun quod in re ipsa subesl. vel periculum ejus. /PiiL. p. I.’.l !.
Prenons acte de l’exception, qui restreint en effet le
probabilisrae de Suarez, comme il a limité déjà la liberté revendiquée dans le doute. Mais la justification
qu’il en propose ne fera que confirmer notre principale objection : (oniuin iiure dlŒrentia tnter ludlchim de jure vel de
le. Sam piiiuum diclf ordmein ad oprrantrm et ouinino
toiiii periculum malttiss ; lecundiim vero dleil ordmem ad rem Iptam ri non tolUt periculum détriment ! qu « .d eat m
//MlL
Sous l’apparence d’une raison, n’est ripas in l’aveu d’un des présupposes constants de Suarezl Et pour tant m hdroit m 1.1 bu mdépendent de l’appréciation du sujet. Il n’est pas vrai qu’on s’abstient de les offenser en effet pane qu’on a décidé que telle ailloli lie les
offensait pas. Pour n’être pas absolument Inflexibles
aux conditions de la conscience, nous l’avons dit, les règles morales n’ont pas néanmoins la souplesse « pie leur prèle Ici Mianz. El la cause eu est qu’elles mretr
rent pour leur compte a la réalité. En sorte que l’antithèse même du fus et de la res que le texte fait valoir est déjà contestable, et c’est.m bénéfice de l’ordre moral entier qu’il y a lieu d’étendre cette exception
au probahilisme que reconnaît Suarez.
lài l’étude de la conscience scrupuleuse, nous ne
relèverons rien, Sauf peut être une tendanceprononcée
a l’indulgence. De ce qui précède, M ressort assez que Suarez < contribué pour une part capitale a l’avène
ment (lu probahilisme. Ses I lirses nr sont pas le simple
développement des données qu’auraient fourmes un
Médina ou un Vasquez. Elles lui appartiennent en propre « i méritent.1 ce théologien dans son sens 1,. plus
fort, pu rapport aux doctrines qui nous occupent, le
titre d’initiateur. Désormais, les thèmes sont poses
dont est fait le prohabil isiiie. Au passage, on aura
reconnu déjà chez Suarez lui même quelques-uns des
principes lavons de s. uni Alphonse. Av.inl de suivre la
diffusion et les vicissitudes de cette théologie nouvelle, il esi utile d’examiner la position d’un grand théolo
gicn qui, s’il n’a 1 ien créé en ce domaine, a confirme de son autorité et de son nom dans une école illustre une doctrine qui J est en réalité absolument cirai,
l" Jean de Saint-Thomas. Comme les précédents, il est pis de l’Espagne, la terre d’élection du probabl Usine. Son Cursus theologicus est repute l’un des coin mentalres les pins pénétrants de la théologie thomiste. Il renseigna a Alcala. a l’université principalement, de lti : ! ii a 1643. L’édition en fut revue par l’auteur 644), jusqu’à la disp NVII1 de la I 11’ivoir
l’art..h v m Svini rHOMAS, t. viii, col. 803). L’étude
de la conscience forme en cette partie I t disp. Nil, au ternie du traité des.nies hum. fins (éd. Vives, t. VI,
p. un ; 193).
Celte étude est très ample, à la manière de l’auteur.
el divisée selon les chapitres ordinaires. Certains ments v relèvent de la tradition thomiste : d’autres, du travail théologique postérieur au Moyen Age, mais