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PRUDENCE. SA NATUR]

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Le discernement moral est œuvre de raison.

Le prudent, dit saint Thomas, est celai qui sait prévoir le bien fondé, les circonstances et les conséquences d’une action future, d’une action qui n’existe pas encore, mais qui sera éventuellement réalisée. Cette action n'étant pas encore posée, le prudent non seulement l’imagine, mais il la fait naître et vivre dans sa pensée telle qu’elle devra exister, selon les exigences de la loi morale et en adaptation exacte avec les circonstances qui la verront se déroule r. Dans la 1 ensée « lu prudent, cette action, entrevue comme devant être accomplie, M présente en comparaison avec des actions contraires Inopportunes et dont l’idée et le < ! <mi sont hj oussés, que le choix raisonnable et volontaire se porte sur l’action la plus valable et la plus conforme à la loi onstances. 1 II ». q. xlvii, a. 1. I ne telle prévision, qui table à la rois sur les normes morales et mit les opportunités des choses et desévénvient qu’à la raison ; car seule la raison pétri établir des comparaisons et lésa] précier. L’animal, qui n’a pas de raison, ne compare et ne 1 révoil

l juxtapose des sensations immédiates ondes

souvenirs, mais sans établir de liaison raisonhée ; ce qui fait la liaison dans son in agination, ce n’est pas n de l’esprit — car il n’a pas d’esprit — mais le déterminisme de l’instinct ou l’automatisme habituel auquel on l’aura plié par dressage. Que ce u instinct, l’animal se répète toujours ; il ne crte rien, n’invente rien, ne 1 eut saisir l’adaptation d’un moyen à un but, le ra] 1 oit d’un effel à une L’homme, au contraire, en face de buts qu’il tine librement, est sans cesse occupé à créer des moyens nouveaux, à combiner des actions originales nves ; il sul stitue aisément une manière d’agir a une autre, et xi raison n’est | as vite à court d’ex] édientv

ri surtout dans le ( onseil intérieur, quand il s’agit

d’une action particulièrement embarrassante, que le

miment prudentiel s’accuse comme une œuvre

de raison. Il arrive que, dans un (as donné, nous ne

s que faire : plusieurs alternatives se présentent

conséquerces avantageuses ou désavantæs ; | fur savoir quel parti prendre, de multiples nnements sont nécessaires, avec affrontement de leurs conclusions ; car il faut tout voir, envisager les mult ects, tenir compte des points de vue

I our aboutir à une solution certaine et unique, il faut travail et souplesse d’esprit. Il est donc clair que le discernement prudentiel est auvre de rai-Saint Thomas, toc cit.. ad 2um.

ri la foine du raisonnement intérieur de la prudence ? En voici un exemple simple : Il ist défendu de faire tort a autrui et de s’en venger injustement. Or, cette médisance qui me vient à l’esprit a

s de cet individu lui ferait toit et serait une Injustice. Donc, cette médisance ( st défendue. » La majeure du syllogisme est une règle morale < : énérale

i.ir Uns ; elle roliie de la loi naturelle et en nu me t< mps de la loi positive di ine : car celle-ci, exi-’la ( t-arité à l’éjraid d’autiui. exipe d’al ord et en même t( mj s la juM u e. La mineure du syllogisme Sent perspicacité de la raison qui comprend que dénoncer telle ou telle faute secrète (liez quelqu’un c’est n ettre une médisance. De tels raisonnements sont nuels dans notre conscience. Nous réfléchissons à ne nous devons faire, a ce que nous devons ne 1 as 1 rendre attitude en face de tel ou tel ( Si le ras est ( n 1 arrassant, 1 ou s deman du t. n 1 - 1 our réfléchir. <’< st à Mue 1 our raisonner, choisir, et I nah n ent a’.ir d’apri s < et te détermination. Manifestement, la prudence est œuvre de ral-Pour dirigi verner moralement toutes les ma ie. il me faut co m pre ndre, délibérer, juger, employer activement mon Intelligence. Mais de quelle intelliꝟ. 1. < s’agil 111

La prudence est œuvre de raison pratique.

Notre raison n’est pas toujours occupée à dirigei moral cmenl nos actions. I Ile s’applique encore au savoii spécu latif. I n ii s’agisse de connaissances philosophiques qui jugent du pourquoi des choses, qu’il s’agisse de connaissances scientifiques qui contrôlent des Unis et établissent Us lois qui Us régissent, l’espril cherche uniquement la vérité ; il s’applique à connottre poui ttre, sans que l’objet de son savoir ail aucune relation avec dis Uns Immédiates d’action. Par exemple, celui qui apprend lis mathématiques pour passer un examen a sans doute pour fin éloignée la réussite de cet ex amen, mais, comme fin immédiate, il veut seulement savoii pour savoir, trouver la d< istration des théorèmes, indépendamment de ce qu’il fera tout a fin nie quand il quittera son étude, quand il aura à débrouille 1 la grave diffie ulté dont il a laissé le souci pour se livrer au travail intellectuel. Au contraire, la raison pratique est un discernement, une délibération intérieure ordonnée à poser une action, pour savoir si décidément on la fera ou si l’on ne la fera pas. Ibid., a. 2.

La raison spéculative et la raison pratique ne sont pas en nous deux facultés différent » s ; ci st notre même raison qui a deux façons distinctes de s’appliquer à connaître : connaître le iai (Us choses par curiosité de savoir et connaître ce que l’on va faire en jugeant et en déterminant la raison de le faire. Dans Us deux cas. nous cherchons la vérité, mais pas la nu me ( s| èce de vérité. Pans la spéculation, il s’agit de concevoir exactement ce qui est. de conformer, de mesurer son esprit à une réalité, à une éi ité telle qu’elle est. Pans la raison pratique, il s’aj.it de vérifier, de mesurer une action à faire à une Un préalablement conçue et voulue. Ces deux manières d’appliquer la réflexion de notre esprit s’accusent si différentes qu’une manière nous est souvent plus facile et plus connaturelle que l’autre, (ncore que nous usions fréquemment des deux. Suivant les tempéraments, les dispositions de nos facultés de connaissance sensible et intellectuelle, suivant ;.ussi l’entraîne ment des habituât s contractées au cours de notre formation intellectuelle <t de notre éducation, notre intelligence va plus Facilement soit dans le sens spéculatif, soit dans le sens pratique. Il y a des. 1 us spéculatifs, abstraits, peu pratiques et, à l’opposé, il y a des {.eus pratiques, peu portés à la spéculation et au savoir scientifique, nais habiles, avisés, experts à trouver la meilleure solution dans u s (as ( mbarrassants et Us difficultés de la vie. Tans le discernement prudentiel, ce qui est mis en œuvre ce n’est pas la raison spéculative, irais la raison pratique. Ce savoir-faire est différent de la science morale, qui ( m ploie la raison spéculative. Il j a des moralistes qui dissert ent savamment du fondement du devoir, des lois de la moi aie. mais qui ne sa( ni guère raisonner, pour U ur 1 ropre (enduite, de ce qu’ils onl à faire OU a ne ] as faire.

Je dis que la prudence ne suppose pas la science l biloso] bique de la morale. Toutefois, elle 1 rc’sup] ose obligatoirement une certaine science morale, au n m s Ja connaissance des obligations morales, « le la, loi de I I’D, d< 5 1 m i ( | le s du 1 éraloLiie. des ( ommai ! ( ! < n le ni s de l’Église, de leurs obligations générales. On doil 1 ( rf < ( t ion ner cette connaissance, aussi minutieuse et détaillée que 1 ossible, de son devoir religieux, indi Iduel, social et familial : il j a toujours à apprendre sur ce point. Le discernement prudentiel a son point de dé part, xi base de raisonnement en cette connaissance exacte et claire des prescriptions morales. Mais, toul en étanl lu a cette connaissance, il est lui-même un judicieux et lucide jugement appliqué à voir, dans lis