L523 QUESNEL. ATTAQUES CONTRE LES « RÉFLEXIONS MORALES
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de Polignac de l’avoir desservi auprès du pape ; bientôt conseillé par des amis, qui comptaient toujours sur lui, il reprit courage : il oublia les injures que lui avait attirées la suppression de Port-Royal et de nouveau il lit cause commune avec Quesnel pour la défense du livre condamné par Home.
2o Le mandement des évêques de Luçon et de La Rochelle. — L'évêque de Luçon. Yaldérics de Lescure, et l'évêque de La Rochelle, de Champflour, publièrent, le 10 juillet 171(1. un mandement collectif qui condamnait le livre des Réflexions. Les deux évêques montrent que les cinq propositions sont contenues dans le livre de Jansénius et que ces propositions sont rééditées dans le livre de Quesnel ; d’autre part, ils prouvent que la doctrine de Jansénius et de Quesnel est opposée à la doctrine de saint Augustin. Ce mandement est un véritable traité de la grâce dirigée contre les théories nouvelles.
Les historiens jansénistes assurent que Fénelon fut l’instigateur de cette démarche des deux évêques, afin d’atteindre le cardinal de Noailles, approbateur du livre condamné. Lue correspondance entre l’abbé de Langeron, ami et commensal de Fénelon, et l’abbé Chalmette, chanoine de La Rochelle, prouve que Fénelon connut le projet de l'évêque de La Rochelle, auquel il donna même des conseils. Le 23 décembre 1707, Langeron écrit : « Je croisqu’il est bien utile de faire quelque démarche contre le jansénisme dans le diocèse de La Rochelle, mais, afin que la chose soit utile, je crois qu’il faut joindre à la censure, qui est un coup d’autorité, l’instruction, qui est un moyen propre pour la persuasion. » Correspond, de Fénelon, t. iii, p. 150. Il précise encore, le 23 juin 1708 : " M. l’archevêque de Cambrai pense comme moi et il trouve que, dans la censure qu’on fait d’un ouvrage, il ne faut citer aucun passage que ceux qui renferment évidemment l’erreur qu’on attribue à l’ouvrage et qui ne peuvent être détournés à un sens catholique sans leur faire violence. » L’instruction pastorale fut communiquée à l’abbé Langeron, qui en fait l'éloge dans une lettre du 2(i avril 1710, bien qu’il fasse quelques remarques. Correspond, de Fénelon, t. iii, p. 262-263, 268-270.
Deux ans plus tard, dans une lettre à la maréchale de Noailles, qui voulait le réconcilier avec le cardinal, Fénelon écrit : « Je n’ai eu aucune part à ce mandement ; si j’y avais part, je le dirais sans embarras ; les évêques ne m’ont point consulté sur cet ouvrage ; il n’y a eu aucun concert entre eux et moi ; je n’ai vu le mandement que comme le public et après son impression. « Ibid., t. iv, p. 8, lettre du 7 juin 1712. L’est un défi à la vérité, écrit M. Le Roy, car « Fénelon a connu le projet des deux évêques ; il les a encouragés ; il a travaillé à leur compte et mis à leur service tout son entourage d’abbés et de théologiens rompus à la casuistique. Bien mieux, c’est lui qui, après avoir corrigé le mandement, fixe les conditions et choisit l’heure de la publication. » Op. cil., p. 331. Ht. pour faire mieux accepter sa thèse, M. Le Roy, empruntant des traits à Saint-Simon, peint les deux évêques comme notoirement incapables de l’aire ce mandement : ils sont « de vrais animaux mitres », follement ultramontains et livrés aux jésuites. M. de La Rochelle « était l’ignorance et la grossièreté mêmes, sans esprit, sans savoir et sans aucune sorte de lumière, sans monde encore moins, un homme de rien et un
véritable excrément de séminaire ». De son côté, h'
5 mai 1711, Quesnel écrit à M. Schort : » Ce sont des évêques sans lumière et sans science ». Correspond, de Quesnel. I. II, p. 1513. Ces traits sont fort exagérés, ainsi que le jugement sans nuances que M. Le Roy porte sur la responsabilité de Fénelon, car la correspondance de Langeron prouve seulement que Fénelon
connut le projet des deux évêques, mais non point qu’il ait inspiré ce projet et corrigé le mandement.
Les deux évêques envoyèrent leur mandement au pape, avec une lettre dans laquelle ils déclarent qu’ils ont voulu « montrer que les Réflexions morales de Quesnel reproduisent la doctrine de Jansénius et que Quesnel s’est proposé de mettre en français, à la portée des fidèles, ce que Jansénius avait fait dans la langue des savants ». Correspond, de Fénelon, t. iii, p. 285-288. Le pape les félicita par un bref du 1 juillet 1711. Ibid., p. 105-1(1(1.
Le cardinal de Noailles. qui avait approuvé le livre de Quesnel, était nettement mis en cause ; or, disenf les historiens jansénistes, les deux évêques firent répandre leur mandement dans le diocèse de Paris en février 1712 ; des affiches furent placardées sur les murs de la cathédrale et jusque sur les portes du palais épiscopal, et cela par les soins des deux neveux des évêques de Luçon et de La Rochelle qui se trouvaient au séminaire Saint-Sulpice. La vérité est moins dramatique.
L’imprimeur de La Rochelle, pour vendre l’ouvrage, envoya des exemplaires dans les grandes villes du royaume el, en particulier, à Paris ; le libraire de Paris Ht annoncer l’ouvrage par des affiches qui furent placardées sur toutes les places, au coin des rues, su les portes des églises et jusque sur le palais de Noailles. La fit au avoue que, comme il était question d’un ouvrage approuvé par le cardinal, « il y avait de l’indécence à la placarder jusque sur la porte de son archevêché ». Cet oubli des convenances donna lieu à un fâcheux incident. On persuada â Noailles que les deux évêques n’avaient attaqué le livre de Quesnel que parce qu’il l’avait approuvé ; il devait donc se défendre contre des injures faites à sa personne. Aussitôt, sans interroger le libraire qui vendait le mandement, sans aucune enquête, Noailles ordonna au supérieur de Saint-Sulpice d’expulser du séminaire les deux neveux des deux évêques. M. Léchassier déclara en vain au cardinal que les deux jeunes gens étaient innocents du fait qu’on leur imputait, car ils n’avaient eu aucune part à l’affichage. Ce fut inutile. Comme le dit SaintSimon, Noailles commit la faute capitale du chien qui mord la pierre qu’on lui jette et laisse le bras qui l’a ruée ». En même temps, par une contradiction singulière, Noailles affectait de croire que l’ordonnance n'était point l'œuvre des deux évêques, mais d’un faussaire ou d’un mystificateur.
Sur ces entrefaites, l'évêque de Gap, Perger de Malissoles, publiait, le I mars 1711, un mandement pour s’unir aux deux évêques, et ceux-ci recevaient de nombreuses lettres qui leur conseillaient de protester contre l’injure faite â tout le corps épiscopal en leur personne et pour un sujet qui intéressait non point le cardinal de Noailles, mais la saine doctrine, puisque le livre des Réflexions mondes avait été condamné. Ces deux évêques écrivirent au roi, le 11 mars, pour se plaindre du procédé injuste de Noailles à l'égard de leurs neveux ; ils accusent le cardinal d'être le fauteur des nouvelles doctrines par l’approbation qu’il a donnée au livre de Quesnel : ils ne l’ont point attaqué personnellement : » Tout notre crime est d’avoir con damné un livre qui inspire la révolte et l’erreur et que Noailles a eu le malheur d’approuver. Ils souhaitent que Noailles retire son approbation et sa protection à un livre qu’il ne peut plus soutenir que par des voies de fait, absolument indignes de son caractère » et ils écrivent ces mots : - Les plus grands maux de l'Église sous les empereurs chrétiens Sont cnus des évêques des villes impériales, qui abusaient de l’autorité que leur place leur donnait. C'était dur. La lettre fut envoyée au P. Le TeHier, qui félicita les deux évêques ; mais la lettre fut rendue publique, et Noailles. indigné