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    1. SACREMENTS##


SACREMENTS. LE MOT

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être iv, (i. 0so<Te6£’! aç (i.uaTr, ptov, ibid., p. 396, rien de saillant dans les autres emplois de pL’jrrT7jp !.ov, vii, 2 ; vin, 11) ; x, 7 ; xi, 2, 5, i’ft/7L, p. 402, 404, 408, 110.

Chez les I’ères apologistes, il serait pareillement difficile de trouver le mot |i.ua-rr ; piov employé avec le sens moderne du mol o sacrement ». Le sens ordinaire se rapporte aux « mystères » païens, avec une note d’infamie à l’égard des faits et Restes attribués aux faux dieux. Cf. Athénagore, Lcgatio, n. 4 (mystères d’Eleusis), n. 28, 32, P. G., t. vi, col. 897 B, 956 C, 964 A ; Théophile, Ad Autolycum, I. I, n. 9 (mystères d’Osiris), ibid., col. 1037 C ; Tatien, Adv. Grsecos, n. 8, ibid., col. 825 A. Justin est plus abondant. Dans le Dialogue, « il emploie fréquemment ii, u(rr()piov, « sens caché », comme synonyme de parabole, de symbole, de type. Il dit par exemple que « le mystère de l’agneau était le type du Christ ». Dial., xl, P. G., t. vi, col. 562 B. Il appelle mystère le sens typique ou allégorique de certaines prophéties. Dial., xxiv, xi.iv, i. wiii. i.xxviii, i.xxxv, cxxxviii, col. 528 B, 569 B, 633 D, 660 C, 680 A, 793 A. Il parle assez souvent du mvstère de la croix. Dial., lxxiv, xci, evi, c.xxxi ; Apol., i, xiii, col. 649 B, 692 B, 721 C, 780 C, 318 A, c’est-à-dire de sa signification et de sa valeur sotériologique. Dans V Apologie, il signale l’immoralité des mystères païens, cf. Apol., i, xxv, xxvii ; Apol., II, xii, col. 365 A, 372 A, 464 C ; il mentionne, en l’approuvant, un écrit destiné à montrer que le christianisme ne connaît pas ces sortes de mystères, Apol., i, xxix, col. 373 A ; en même temps, il soutient la thèse que les prophètes mal compris ont suggéré certaines idées aux inventeurs des mystères de Bacchus, Apol., i, liv, col. 409 AB, et que les mystères de Mithra sont une imitation diabolique du rite chrétien de l’eucharistie. Apol., i, lxvi, col. 429 A. Cf. F. Prat, op. cit., p. 392-396.

En ce qui concerne saint Irénée, la traduction latine de son ouvrage offre des exemples de mysterium, traduction vraisemblable de jjma-rrypiov. Voir plus loin, col. 492. À l’exemple d’Irénée, saint Hippolyte n’emploie guère le mot « mystère » qu’en connexion avec l’hérésie des gnostiques qui s’étaient appropriés ce terme. Philosophumena, Proœmium, P. G., t. xvic, col. 3017 B ; cf. S. Irénée, Cont. luvr., t. I, c. i, n. 1 ; c. xx, n. 3, P. G., t. vii, col. 437, 657.

Chez Clément d’Alexandrie et chez Origène, nous trouvons une première adaptation du mot mystère aux croyances et pratiques religieuses du christ ianisme. Sans doute, ces auteurs connaissent les « mystères » de la gnose ; mais ils lui ravissent ce mot pour lui donner un sens chrétien. Clément appelle mystères le culte rendu aux faux dieux. Cohortalio ad gentes (Protreptique), c. iv ; cf. c. ii, P. G., t. viii, col. 152 li, 76 15. C’est que le mystère est une représentation des choses sacrées par des signes sensibles. Ainsi les mystères des Égyptiens. Strom., t. V, c. vii, P. G., t. ix, col. 68 H. Cꝟ. t. II, c. xiv, t. viii, col. 997 C. Le passage se fait donc facilement à la désignation des vérités et des pratiques chrétiennes par le mot mystère. L’initiation chrétienne constitue les « petits mystères » préparant la connaissance des grands. Strom., t. IV, c. I, t. viii, col. 1216 C. Ainsi les « mystères » du Christ sont cachés aux profanes, Strom., 1. Y, c. ix, t. ix.col. 88 C. Qui plus c t, ils ont été cachés aux prophètes eux-mêmes, et le Christ ne les a livrés qu’en paraboles. Strom., VI, c. xv, t. ix, col. 348 C. Commentant Is., n, K), Clément enseigne qu’on ne doit pas révéler les « mystères de la foi ». Strom., t. V, c. x, t. ix, col. 93 sq. Et tous ces mystères doivent être enseignés mystiquement, zy. vjnzrjpiy. |A>.><rnxcô< ; TrocpaStSoToa, Strom., t. I, c. i, t. viii, col. 701 C.

On pourrait relever chez Origène une exégèse analogue du mot « mystère ». Il suffit de rappeler ici la

distinction des simples et des parfaits, voir ici t. xi, col. 1514 sq., pour saisir toute l’adaptation faite au christianisme des mystères de la gnose.

On comprend plus facilement comment désormais le mot mystère, sans perdre aucune de ses autres significations, pourra être appliqué aux rites sanctificateurs. Saint Jean (Jirysostome l’explique parfaitement : « Il y a mystère, quand nous considérons des choses autres que celles que nous voyons… Autre est ici le jugement du fidèle, autre celui de l’infidèle. Moi, j’entends que le Christ a été crucifié et aussitôt j’admire son amour pour les hommes ; l’infidèle l’entend aussi et estime que ce fut folie… L’infidèle connaissant le baptême, pense que ce n’est que de l’eau ; moi, ne considérant pas simplement ce que je vois, je contemple la purification de l’âme effectuée par l’Ksprit-Saint. L’infidèle estime le baptême comme une simple lotion faite sur le corps ; moi, je crois qu’il rend aussi l’âme pure et sainte, et je pense au sépulcre, à la résurrection, à la sanctification, à la justice, à la rédemption, à l’adoption des fils, à l’héritage céleste, au royaume des cieux, au don du Saint-Esprit. » In / am epist. ad Cor., hom. i, n. 7, P. G., t. lxi, col. 55. On trouve semblables doctrines chez saint Épiphane, Hwr., xl, n. 2, P. G., t. xi.i, col. 680 CD.

Évolution sémantique du mot » sacramentum » chez les Pères latins.

— On peut se demander comment le mot jjuj<rrr)pt.ov a été traduit de préférence par sacramentum, alors que d’autres termes, tel arcanum, pouvaient paraître plus indiqués.

La solution de ce problème dépend, avant tout, de l’usage qui fut fait, en langue latine, du mot sacramentum appliqué aux choses religieuses du christianisme. Les auteurs qui se sont appliqués à cette étude sont assez nombreux. Dans l’introduction générale du recueil Pour l’histoire du mot « sacramentum », I. Les anténicéens, Louvain, 1924, le P. de Ghcllinck en fait une énumération exhaustive, depuis les lexiques et dictionnaires philologiques jusqu’aux travaux spéciaux et aux monographies, en passant par les dictionnaires bibliques et théologiques et les histoires des dogmes. Deux études monographiques paraissent surtout devoir retenir l’attention, celle de Valentin t irone, Sacramentum oder Begrif] und Bedeulung von Sac rament bis zur Scholastik, Brilon, 1853, et celle de H. von Soden, Moa-^ptov und Sacramentum in der erslen drci Jahrhunderten der Kirche, dans la Zeitschrijt fur die A’. T. Wissenschajt, t.xii, 1911, p. 188-227. On doit ajouter aujourd’hui les trois monographies du recueil publié sous la direction du P. de Ghellinck, savoir Tcrtullien, par Emile de Backer, Cyprien et ses contemporains, par J.-B. Poukens, S. J., et Les derniers anténicéens, par G. Lebacqz, S. J., et J. de Ghellinck, S. J.

Dans la langue latine, sacramentum désigne juridiquement l’argent qui, déposé à X’œrarium par la partie qui perd le procès, est consacré par le fait même à la divinité. Militairement, c’est le serment prêté par les recrues à leur entrée au service. Mais dépôt ou serment sont des engagements vis-à-vis du dieu ; argent déposé et personne assermentée sont désormais chose ou personne consacrées. L’existence du sacramentum militiæ, parfois attestée par un signe (/iilci signaculum) a exercé par son symbolisme une certaine influence sur la notion de mystère qui s’est attachée au concept du sacrement chrétien.

1. Tertullien.

En cette matière, Tertullien fut un initiateur, dont la prépondérance s’affirme incontestée. Sa pensée sur le sacramentum marque une évolution certaine : elle part du sens classique de sacramentum militise. S’inspirant de la militia Christi, si souvent exploitée par saint Paul, Tcrtullien applique le mot sacramentum au baptême, qu’il considère