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    1. SACREMENTS##


SACREMENTS. INSTITUTION, EXPLICATIONS CATHOLIQUES

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ajouté quelques éléments nécessaires à leur validité. Le principe de solution des difficultés est que substance i et aleur » des sacrements répondent à des concepts équivalents. Les additions ecclésiastiques sont de simples conditions de valeur mais n’affectent pas la substance des sacrements. Systema sacramentorum, n. 44-49. Toutefois, une difficulté subsiste : comment de simples conditions apposées par l'Église peuvent-elles engager la validité du sacrement ? Cf. Diekamp-Hoffmann, t. iv, p. 23.

c) Institution « in génère ». — (l’est précisément pour faire face aux difficultés historiques que bon nombre de théologiens ont émis l’hypothèse d’une institution immédiate de tous les sacrements par le Christ, institution qui ne déterminerait cependant pas. pour chacun d’eux, les éléments spécifiques de la forme et de la matière, mais en laisserait la détermination à l'Église. Un fait est un fait, et les plus belles argumentations spéculatives n’y changeront rien. Si la matière et la forme de tous les sacrements avaient été déterminées spécifiquement par le Christ, elles seraient demeurées toujours et partout les mêmes. Si donc des changements, mutations ou additions, ont été faits touchant des éléments considérés comme essentiels, c’est que le Christ ne les avait pas spécifiquement déterminés et que la détermination spécifique a dû venir de l’initiative ecclésiastique. Ainsi, tout en sauvegardant la vérité substantielle des sacrements, laquelle dépend de leur institution immédiate par le Christ, on peut admettre que le divin auteur des sacrements a pu laisser à son Église la mission de déterminer quelles paroles, quels éléments matériels pourraient constituer la forme et la matière des sacrements. C’est la thèse exposée assez récemment par le P. Lennerz, S. J., expliquant le Salva illorum substaniia du concile de Trente. Gregorianum, 1922, p. 385-419 ; p. 524-557 (article écrit en langue allemande).

La thèse a de solides appuis dans la tradition théologique posltridentine. Les premiers théologiens qui l’aient envisagée en fonction de l’expression salva illorum substantia ont résolu la difficulté des changements « substantiels » en distinguant l’institution formelle et l’institution matérielle : Huic difficultaii… responderi potest, matériaux et formant hujus særamenti [il s’agit de l’ordre] eo modo quo a Christo fuit institula, non posse mutari ; Christian tamen non déterminasse in individuo materiam et formam materialiter sumptas ; sed solum voluisse, quod conferretur ordo per aliquod signum sensibile significativum potestatis quæ traditur et per verba hoc ipsum exprimentia. De Lugo, De sacramentis in génère, disp. II, a. 5. Et le théologien jésuite invoque ici l’autorité d’Innocent IV que nous avons citée à l’article Ordre, col. 1333. Même distinction entre institution formelle par le Christ et choix matériel des cléments répondant à celle institution chez les Salmanticenses, De sacramentis in communi, disp. VI, dub. i, n. 8 ; cf. disp. II, dub. iv, n. 64 sq. ; disp. III, dub. iii, n. 31 ; chez Gonet, à propos du sacrement de l’ordre, disp. II, a. 3, n. 57 (la tradition des instruments ne diffère que malerialiler de l’imposition des mains) ; chez Billuart, à propos du mariage et de l’ordre, De sacramentis in communi, dissert. I. a. 5, obj. 3. Mais ces auteurs présentent leur solution avec si peu d< souplesse qu’on serait tenté de les ranger encore parmi les partisans de l’opinion précédente.

Les théologiens plus récents, devant les affirmations incontestables de l’histoire, ont apporté plus de nuances dans leurs réponses.

Une première solution est proposée par de Sinc.l, De sacramentis in génère. Bruges, 1926, n. 71 sq. (ancienne édition, n. 91 sq.). Cet auteur accepte de retenir l’idée d’une institution immédiate par le Christ des éléments spécifiques des sacrements, à

condition d’ajouter que cette détermination, tout au moins pour quelques sacrements, ne soit pas sans admettre des variations et additions possibles. Il admet également qu’on puisse se contenter, pour certains sacrements, d’une détermination purement générique des éléments sensibles. On peut vraisemblablement rapprocher de cette solution celle du P. d’Alès, dont on a rapporté l’essentiel à l’article Ordri :, col. 1331. Voir aussi, du même auteur, Salt’a illorum substaniia. dans F.phemerides theologicæ lovanienses. 1921, p. 497-504.

Une autre solution, à peine différente de la précédente, consiste à dire purement et simplement que certains sacrements ont été institués immédiatement par Jésus-Christ, non dans leurs éléments spécifiques, mais uniquement dans leur signification générique : « Le décret [du concile de Trente, salva illorum substaniia] invite à distinguer de l’institution du Christ, qui, par nature, est immuable, la détermination précise de la matière et de la forme qui, sans détriment de la substance du rite, peut s’adapter aux temps et aux lieux. L’institution du Christ est un acte personnel et immédiat du Seigneur, à qui seul appartient de lier la grâce divine à un rite sensible permanent. La détermination de la matière et de la forme in ultima specie a pu être abandonnée à l'Église, agissant à la fois comme interprète infaillible du Christ, pour marquer les bornes de son institution, et comme mandataire fidèle de sa volonté pour régler les modalités du rite, dans les limites de cette institution. » P. Pourrat, art. Sacrement, dans le Dictionn. apologétique de la foi calh., t. iv. col. 1070-1071. On trouvera des idées analogues chez S. Harent, La part de l'Église dans la détermination du rite sacramentel, dans les Éludes, t. lxxiii, p. 315-330. P. Galtier, dont les travaux ont incontestablement établi le fait historique des mutations ou additions dans les éléments « essentiels » des sacrements (La consignation dans les Églises d’Occident, dans Revue d’histoire ecclésiastique, de Louvain, t. xiii, 1912, et La consignation à Carthagc et à Rome, dans les Recherches de science religieuse, Paris, 1911, p. 350 sq.), admet pleinement le pouvoir de l'Église dans la détermination des éléments spécifiques que le Christ a laissés dans l’indétermination. Voir ici Imposition dis mains, col. 1384 sq. ; et Ordre, col. 1323 sq.

On doit citer, dans le même sens, Van Noort, De sacramentis, t. i, n. 101 ; F. Schmid, Die Getvalt der Kirche bezùglich der Sakramente, dans Zeilschr. fur kath. Théologie, t. xxxii, 1908, p. 43-54, 254-288 ; J. de Guibert, Chronique de théologie, dans Revue pratique d’apologétique, t. xix, 1914, p. 211-227 ; A. d’Alès, L’essence du sacrement de l’ordre, dans Recherches de science religieuse, t. x, 1919, p. 116-136 ; J. de Guibert., Le décret du concile de Florence pour les Arméniens, dans le Bulletin de littérature ecclésiastique de Toulouse, 1919, p. 81-95, 150-162, 193-215 ; J. Coppens, L’imposition des mains et les rites connexes, Paris, 1925, p. 403-404 ; Th. Spàôil, Doctrina theologiæ Orientis separati de sacra infirmorum unctione, dans Orienlalia christiana, t. xxiv, 2e part., 1931, p. 146155, etc.

A cette thèse, si favorablement accueillie par les théologiens contemporains auxquels les exigences de l’histoire n'échappent pas, L. Billot a donné un relief spécial, en raison de l’explication théologique qu’il y apporte, (le théologien précise qu' « il suffit que l’institution divine atteigne l'élément constitutif du sacrement sous la raison générale de signe symbolique par ailleurs apte à exprimer une signification sacramentelle certaine (par exemple la transmission d’un pouvoir sacré), (ont en abandonnant à une autorité compétente le choix de. la matière et de la forme