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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 14.1.djvu/369

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    1. SAGESSE##


SAGESSE. AUTEUR

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'j’r/f], VOÛç), font défaut dans le livre de la Sagesse, là même où le pseudo-Salomon avait l’occasion toute naturelle de les mettre en évidence. Sap.. i. 1 ; Vin, 1 !) sq. ; i. 15 ; xv, 11. Le logos sapientiel, ix, 2 ; xvi, 12 ; xviii, 15, la « parole o de Dieu, n’est qlie la volonté créatrice, comme en maint autre endroit de l’Ancien 'l’est aillent, et lion le nécessaire moyen terme personnel de Philon entre Dieu et le monde créé. L’opinion philonienne que la matière et le corps sont l’unique source du mal n’est pas non plus professée dans Sap., i, 1 : viii, 19-20 ; ix, 15. Enfin, le mode d’exposition est bien différent aussi entre les deux auteurs. Celui de la Sagesse se montre très réservé dans l’emploi de l’allégorie et n’use de la prosopopée que pour Salomon, auteur fictif du livre, ne donnant jamais la parole aux personnages bibliques, d’ailleurs innomés, dont il fait mention ; tandis que Philon interprète le texte biblique lui-même allégoriquement dans le sens de ses doctrines philosophieo-religieuses et met dans la bouche des personnes qu’il évoque de longues effusions tout émaillées de réminiscences classiques. Grimm, op. cit., p. 22-21 ; Heiniscb, p. xxix-xxx. Cf. aussi Dict. de la Bible, t. v, col. 1352-1353.

Il ne saurait être question non plus de Philon l’Ancien que Josèphe, Cont. Ap., i, 23, mentionne parmi les écrivains païens qui ont parlé des juifs, et qui, en dépit de toute vraisemblance, aurait traduit, ou remanié des proverbes salomoniens : opinion professée par nombre d’auteurs catholiques et protestants, tels que Bellarmin, Muet. loc. cit. ; cf. Lorin, Præf. in lib. Sap., Comm., Lyon, 1(107, p. X ; Cornélius a Lapide. Prœf. in lib. Sap., Comm.. Anvers, 1638, p. 1 ; Drusius, De Henocho, Franeker, 1615, c. xi : Sapientise auctorem pularem Philonem non juniorem, qui sub Cajo vi.ril. sed seniorern, qui vixit sub templo secundo et scripsil librum de anima, qui memoratur in libro Juchasin ; Buddée, Tntroductio ad historiam philosophiez Hebrœorum, Halle, 1702, p. 77 sq.

L’hypothèse d’un auteur essénien ou thérapeute écrivant la Sagesse pour recommander l’ascétisme absolu, Sap., iii, 13-14 ; iv, 1, enseigner la préexistence de l'âme, viii, 19-20, promouvoir l’adoration du soleil, xvi, 20-28, prôner la thérapeutique naturelle, I, 14, ne peut être que le fruit d’une exégèse artificielle de ces passages : Pfleiderer, Die Philosophie (1rs Heraklit von Ephesus, Berlin, 1886, p. 306 sq. et 358 ; Zeller, Die Philosophie der Griechen, t. ni b, Leipzig, 1903, p. 296 ; Eichhorn, Einleitung, Leipzig, 1795, p. 134 sq., 150 ; Gfrôrer, Philo und die alex. Theosophie, t. ii, Stuttgart, 1831, p. 205 sq. ; Dahne. Geschichtliche Darstellung der jùd. alex. Religionsphilosophie, t. ii, Halle. 1834, p. 170, note 90.

Enfin, notre livre ne pourrait-il être l'œuvre d’un auteur chrétien : Weisse, Reden liber die Zukunft der evangel. Kirche, Leipzig. 1849, p. 2 :  !.. sq., et Die Evangelienfrage, Leipzig, 1856, p. 206 sq., vraisemblablement du docteur alexandrin Apollos, collaborateur de l’apôtre Paul, tout de suite après la grand persécution exercée contre les juifs, à Alexandrie, sous l’empereur Caligula (38-40 ap. J.-C.) : Noack, Der Ursprung des Christenthums, t. i. Leipzig, 1837, p. 222 sq.? C’est

qu’en effel le livre fait un emploi répété, pour designer Dieu, du nom de l'ère, Sap., II, 10 ;, I ; t, 10 ; xiv, 3 ; qu’il professe, I, 13-1 1 et m. 23-24, au sujet de la « mort » non voulue de Dieu, une doctrine qui dépasse l’horizon religieux du judéo-alexandrinisme ; qu’il fait allusion, xiv, 7. au < salut, a la « jusl [ce ici ahlic par le bois i de la croix du Christ ; qu’il est rangé, enfin, par l’auteur du Canon de Muratori au nombre des

écrits du Nouveau Testament (Weisse). C’est aussi (Noack) que le livre contient, dans la section dite du » juste., n. - le premier témoignage historique de l’impression que firent la personne de Jésus et son

sort, en même temps que les espérances attachées à son entrée en scène pour le jugement du Seigneur sur les peuples du monde » ; que la remarque de xiv, 17, sur les honneurs divins rendus aux images de princes lointains se rapporte à l’ordonnance de Caligula et aux événements qui en lurent la suite ; que le Salomon du livre n’est autre quc le Christ, le roi messianique conduisant son peuple à l’empire dans le Royaume <1< Dieu. Cf. aussi Plumptre, The writings af Apollos, dans VExpositor, 1875, t. i, p. 329-318 et 109-435. Ces écrits seraient la Sagesse avant, et l'épître aux Hébreux après la conversion du célèbre docteur. îi faut observer cependant que la signification du nom de l'ère désignant Dieu, comme aussi la qualification de fils de Dieu décernée au « juste », ii, 13, 18, ne dépassent point celles qui dans l’Ancien Testament définissent en d'étroites limites la paternité divine à l'égard du juste Israélite, ou la filiation de celui-ci par rapporl à Dieu rémunérateur, Sap., v, 5, ou protecteur d’Israël, ix, 7 ; xii, 14, 21, etc. Il en est de même de la « mort dans le monde » qui porte une empreinte tout à fait judaïque, cf. Gen., n et ni. Encore que plus d’un l'ère de l’Eglise et divers auteurs ecclésiastiques aient appliqué à la « croix » le mot $> ! >Xov, XIV, 7, ce ne fut de leur propre aveu qu’au « sens mystique ». Dans la « section du juste », il-v, le sens typique devait aisément et, du reste, légitimement s’otîrir également a la pensée des Pères. Beaucoup d’entre eux, et non des moindres, cf. S. Augustin, De civit. Dei, t. XVII, c. xx, P. L.. t. xi.i, col. 554 sq. (Sap., n. 12-21), y voient en effet une « prophétie » plus ou moins directe des rapports de Jésus-Christ avec ses adversaires juifs et de sa mort sur la croix par leur entremise. Il n’en est pas moins vrai que le mot Stxcaoç doit s’entendre dans le livre de la Sagesse au sens collectif, dans tous les passages, cf. le pluriel Sivcoucov de iii, 1 avec le singulier Stxaioç dans iv, 7 sq., le premier étant, de plus, identique au second en ii, 10, 12, 10 et 22. On ne peut concevoir, d’autre part, qu’un auteur chrétien ait pu caractériser les ennemis de Jésus, les adversaires du juste, comme des athées, libres-penseurs, et non comme ce qu’ils furent en réalité d’après l'Évangile même, des partisans outrés de la Loi ; cf. Joa., xix, 7. Les juifs eurent réellement beaucoup à souffrir, surtout à Alexandrie, de la persécution sanglante provoquée par Caligula ; mais l’auteur du livre n’expose dans le passage invoqué, xiv, 10-20, qu’une vue de caractère quasi-hypothétique et visiblement de nature générale, sur l'évliémérisme dans les cultes païens depuis longtemps répandu et pratiqué aussi bien chez les Séleucides ( fiacrivécoç Œoû). cf. II Mach., xi, 23, que (liez les l’toléniées. Gsol Giorripeç, sans plus de rapport à un fait historique qui aurait été alors d’actualité. Aucun argument, enfin, en faveur de la composition de la Sagesse par un auteur chrétien, ne peut être tiré du canon de Muratori qui en tout état de cause l’attribuerait au plus tard à Philon.

A l’exclusion de celle d’un des traducteurs de la Bible alexandrine, ou d’Aristobule, ou de Philon, ou d’un essénien. ou d’un thérapeute, ou d’Apollos, faut il donc à jamais désespérer de reconnaître dans le li re de la Sagesse la main d’un personnage par ailleurs connu, voire déjà illustre, ef dire de ce livre ce qu’Origène écrivait de l'épître aux Hébreux : t[ç 8à ô ypà+aç… tô |j.Èv àÀr/lsç (-)zbç oÏSev ? Non, peut être. Due élude plus serrée du but que poursuivait l’auteur, dans les circonstances particulières qui ramenèrent à l'écrire, eu égard surtout aux lecteurs qu’il se propo sait d’atteindre et de convertir à ses propres vues, peut encore, nous le croyons, avoir quelque chance d’aboul ir et nous met I re à même de prononcer un nom tenu, du reste, en grande vénération et comme écrit.