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ROUMANIE. ORTHODOXIE ET UNION


moins nombreuses encore leurs œuvres apologé tiques.

Celle année-là, lTiifi. on publia à Râmnicul-Vâlcei, un nouvel ouvrage anticatholique : Livre ou lumière avec témoignages probants relatifs à la Babylone mystérieuse qui est Rome, fie notre saint l’ère NU, archevêque de Satan, paru sans te règne de l’illustre prince la Scarlai Grégoire Ghica Voévode [en roumain !. L’intention de l’auteur est de démontrer que la scission entre l’Église romaine et les Églises orientales n’est due ni au hasard, ni à une cause quelconque, mais s’est produite à la suite d’une révélation divine.

Si les patriarches et autres dignitaires grecs, hôtes inévitables de la cour des voévodes roumains, furent les ennemis acharnés de l’union, les écoles grecques, longtemps à peu prés les seules écoles des principautés moldo-valaques, furent à leur tour des foyers de haine anticatholique et surtout antilatine. En voici quelques preuves.

En 1775, à Halle, parut une Réponse d’un orthodoxe à un frère au sujet de la domination des catholiques (’Atc6xp’. ciç ôpOoSô^ou tivoç Tûpôç —uva ocSeXçÔv Tiepl —rrjç tùv xa-roXixwv [sic] Suvoca-rsiaç). L’auteur de cette brochure, Nicéphore Théolokis, était alors métropolite de Kazan CRussie) et quelque temps auparavant professeur à l’académie grecque de Iassy. Voici comment cet évêque dépeint ses frères orientaux unis au Saint-Siège :

« Cinq ou dix individus débauchés, en réalité

aveugles et étrangers à leur race, qui se trouvent dans un collège à Home, écrit-il ; une dizaine ou une centaine de pauvres gens tailleurs de manteaux ou de capotes à Angora et autant à.Messine : à peu près deux cents Albanais, soldats du roi de Naples ; un ramassis d’étrangers, une centaine tout au plus, venus de divers pays et installés à Venise comme négociants : trois Valaques ignorants, désignés par l’almanach de Vienne comme évêques unis, avec probablement leur troupeau composé de ces malheureux Valaques qu’ils ont, il y a quelques années, arrachés à leur mère, l’Église orthodoxe, et sans leur consentement, car ce sont des gens de basse condition, simples, ignorants, incapables de comprendre ce qu’est l’union, >

Le métropolite Nicéphore Théotokis ajoute encore une note à ce tableau si peu fait pour unir les cœurs dans la charité et les esprits dans la vérité. Il cite le cas d’un évoque uni venu à Brasov en 17(ii) avec une escorte militaire. Le prélat aurait menacé du fouet tous (’eux qui n’adhéreraient pas à l’union. Le curieux historien de l’union en Transylvanie oublie de mentionner les bret leurs, agents de l’orthodoxie en ce pays, en particulier le moine Sophrone. vicaire du Saint-Synode de Larlovitz. Nicéphore Théotokis dénigre non seulement l’épiscopat « uniate » de Transylvanie, mais encore l’évêque uni de Muncaciu et Maramuros, Mgr de Lamillis, qu’il appelle Decamil ".Il l’accuse de se déguiser en négociant et d’enseigner le plus possible en roumain et en serbe à Semlin et de prêcher l’union. Cet ouvrage de Théotokis fui réimprimé en roumain cl en grec a Bucarest ( 1829).

Lu 1X21, éclate la révolution nationale de Théodore Vladimiresco. De tous les coins du pays, comme un vent de tempête, s’élève le cri : « Les Grecs en Grèce et les Roumains en Roumanie. » Les Turcs alors suzerains des provinces moldo-valaques lurent obligés de tenir compte du sentiment populaire. Les princes phanarioteS durent abandonner leur t rône de Mold.’ie et (le Munténle ci des dynastes autochtones prirent

leur succession. Des mesures lurent décrétées contre l’accaparement de l’Église roumaine orl hodoxe par ces Grecs insatiables. Boyards et évêques, sont a la tête du mouvement ; Grégoire IV. métropolite d’Ungro Valæhic (1 825), reconnaît que le pays « a souffert delà malice des Grecs, >yi jour où ils se sont Implantés sur

notre terre : l’on sait l’état lamentable où ils ont réduit les monastères de nos provinces ». Le document rappelle ensuite les effroyables sommes d’argent versées aux princes grecs et à leurs ministres, dont le total es ! si élevé que non seulement la métropole et les évêchés, mais aussi les monastères sont écrasés de del tes ».

Le protosyncelle Naïun de Râmnic visite les métochia du monastère Saint-Pantalémon et de la métropole de Bucarest, Il les trouve abandonnés, ruinés, dépouillés. Le skyte de Belejoïa, métochion de la métropole, n’a même plus de clôture : l’église a été transformée en écurie et l’ambon est couvert de fumier.

lui 1840, cet état de choses ne s’est guère amélioré et nous en avons un témoignage dans le passage d’un rapport du prince Barbu Stirbei : « Heureux le monas-I ère dans lequel on peut voir une lampe allumée devant l’autel ! Heureuse l’église où brûlent quelques cierges et où un prêtre en haillons sans traitement vient encore célébrer la messe ! » Le voévode Sturdza, prince de Moldavie, reçoit à cette époque un firman de Constantinople ordonnant « que tous les popes grecs soient chassés et expulsés » et « que soient détruits les fondements de tous ces maux, c’est-à-dire les écoles grecques ». L’ordre de la Sublime Porte était bien fondé et cependant nul ne l’exécuta. Bien du temps s’écoulera avant que soient éloignés du pays ces « popes grecs », dont l’administration cependant était une véritable ruine pour le pays, et c’est seulement en 1864 que le prince Luza Voda procédera à ce nettoyage nécessaire. Quant à l’école et à l’esprit d’intrigue byzantins, sources des malheurs roumains, on les y retrouve même aujourd’hui. De cet esprit de haine des Grecs contre le catholicisme nous trouvons d’autres témoignages dans des publications ultérieures. Par exemple : L’encyclique de Photius, patriarche de Constantinople aux évêques orientaux et deux discours concluants au sujet de la procession du Saini-Espril, par saint [sic] Grégoire Palamas, archevêque de Thessalonique |en roumain], Buzau, 18 : 52. Dans cet ouvrage, Photius et les autres responsables du schisme grec sont représentés comme des anges de paix et les (tapes de Rome ainsi que tous les Occidentaux comme la cause de tous les malheurs de la chrétienté.

La liste serait longue des manifestations de cet état d’esprit haineux. Nous n’en retiendrons que deux qui sont actuels. De nos jours, l’archevêque d’Athènes, Lhrysostome Papadopoulos, accusé à tort ou à raison d’usurpation par ses propres fidèles, ne laisse pas d’èl re considéré comme une autorité en théologie par les clercs de l’Église roumaine orl hodoxe. Ses œuvres anticatholiques sont traduites en roumain et abondamment commentées. La même considération est réservée aux ouvrages similaires du malheureux prêtre français devenu pope russe pravoslave. Vladimir Guet tée.

Comment s’étonner, en de telles conditions, de voir d’une part annihilées toutes les tentatives d’union comme celle de Malt bien Besarabe. prince de Munténie (1640), dont l’intermédiaire auprès de Borne élait le missionnaire croate Raphaël l.evakovich et d’entendre d’autre part d’humbles et zélés prélats roumains comme Joseph d’Arges qui, dans son Brei exposé îles dogmes divins, monastère de Ncamlu. 1816, traite encore les Roumains unis de chats-huants t et de < chauves-souris ». oiseaux de nuil qui aiment les ténèbres » et < redoutent la lumière ». Samuel Mien, Georges Sincaï, Pierre Maïor, Jean Budal Deleanul, gloires les plus pures de la littérature roumaine sont contemporains de l’auteur du Bref exposé. On ne saurait les accuser d’aimer les ténèbres et de fuir la lumière.