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SEMI-PÉLAGIENS. RÉPLIQUE DE S. AUGUSTIN

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lument > >ur commencer et, a plus forte raison, parfaire aucune œuvre méritoire. Mais vraiment, disaientUs, peut-on compter comme une œuvre, connu' une action la simple dém irche (spontanée et indépend inte de la grâce) du malade qui demande à êtreguéri.' L’appel de Dieu s’adresse à une âme : « Crois ! tu seras sauvée » ; il y a dans ces mots un précepte et une olïre ; c’est à cause de l’accomplissement du précepte ((.rois !) que l’offre reçoit ensuite sa réalisation. Si le précepte est accompli, on voit bien par quelle force c’est : c’est grâce au libre arbitre, don de Dieu, qui garde assez d’efficace pour vouloir au moins être aidé, n’y ayant point de nature si dépravée qui ne puisse vouloir être sauvée. — Nous avons déjà relevé dans Cassien cette préoccupation de réduire autant que possible l’importance du mouvement autarcique de la volonté humaine, llilaire en signalant cette tendance s’est montré sagace observateur.

2. Comparaison entre le signalement de iantiaugus(inisme fourni par Prosper et l’exposé fait par Cassien. — En instituant cette comparaison, il ne faut pas perdre de vue qu’un certain intervalle de temps sépare les Collationes de la rédaction de ces deux lettres ; que d’autre part l’exposé des Collationes est surtout ironique, tandis que les deux lettres signalent l’esprit marseillais tel que l’a fait la discussion autour du De correplione. La comparaison ne laisse pas néanmoins de révéler l’analogie des doctrines.

a) Considération tirée de la volonté salvifique universelle. — Prosper et llilaire marquent avec précision que les théories générales et particulières des antiaugustiniens sont commandées par la considération de la volonté salvifique universelle. Cette volonté divine a pour conséquence que « tous ceux qui le veulent peuvent se sauver ». La prédestination n’est qu’une prescience qui enregistre à l’avance les réponses faites par les volontés humaines aux invites de la grâce. La prédestination unie prævisa mérita est rejetée comme source de quiétisme ou de désespoir.

C’est bien ce que l’on trouve dans la Collation XIII, c. vu et vin (ci-dessus, col. 1806), où l’affirmation de la volonté salvifique universelle vient interrompre assez malencontreusement la marche des idées.

b) Le processus de l’action salvifique. — D’après les deux Epistolie, voici comment, selon les contradicteurs d’Augustin, il se déroule pour ceux qui entendent la prédication évangélique, laquelle est vraiment l’appel de la grâce. Le libre arbitre, fait d’intelligence et de vouloir, qui n’a pas été totalement lié par la faute originelle, incline telle âme à écouter l’appel divin et a y répondre. Ceci est le fait d’un pouvoir naturel, le bon usage d’un bien de la nature. Par ce bon usage. l'âme appelée par Dieu se met d’elle-même en route vers Dieu. Ainsi ceux qui le veulent répondent à l’appel divin et par là même méritent les grâces ultérieures de Dieu.

Dans les Collationes, ce point de vue existe aussi, encore qu’il s’exprime avec moins de précision. A plusieurs reprises on y lit que le libre arbitre n’est pas aussi corrompu par la faute originelle que certains voudraient le faire croire ; que, la nature étant cllemême un don de Dieu, ses bons m mvements doivent être finalement rappariés a Dieu ; que c’est d’elle, au moins en certains cas, que procède le bon mouvement initial qui attire et mérite la grâce divine. Seulement. soucieux d'échapper au reproche de pélagianisme, Cassien insiste beaucoup sur l’infinie petitesse de l’effort b u m un compare i avec l’in ti nie grandeur de la grâce qui vient le récompenser ; pratiquement doue la e reste gratuite. Ces précautions sont signalées par la lettre d'1 lilaire ; m lis, à lire al tentivem snt la le1 tre <le Prosper, elles ne sont pas le fait de tous. Ce dernier

n’hésite pas a dire que plusieurs de ses confrères s’en gagent, quoi qu’ils disent, quelquefois même en le disant, dans la voie du pélagianisme.

c) La distribution de la grâce. — On n’a tenu c i apte jusqu’ici que des ; 'un, s à <] ni parvient extérieurement l’appel divin. Pour elles, le développement ultérieur de l’action salvifique tient à la manière dont elles ont réagi, dans leur spontanéité, à cette invite de Dieu. Mais il y a des âmes auxquelles cet appel extérieur ne parvient pas : enfants avant l'âge de raison, païens dans le pays desquels l'Évangile n’est pas prêché.

Les deux Epislolse signalent la réponse que l’on faisait, en 129, à cette difficulté. On s’en tirait par la considération de mérites (ou de démérites) hypothétiques et, si l’on veut. « futuribles ». A tel enfant, Dieu n’a pas fait la grâce du baptême parce qu’il prévoyait que, s’il eût vécu, il aurait fait mauvais accueil à l’appel divin. Dieu a fait que la connaissance de la vérité religieuse fût acquise à telle contrée, en tel temps, parce qu’il a prévu le ban accueil qui serait fait à la prédication des prophètes de l’Ancien Testament (c’est le cas des Ninivites prêches par Jouas) ou des missionnaires du Nouveau. Il n’a pas fait cela pour d’autres, parce qu’il avait prévu le mauvais accueil qui aurait été réservé à ses appels.

Nous n’avons pas relevé de traces perceptibles de cette doctrine sophistique dans Cassien, qui, d’ailleurs, traite moins de la répartition de la grâce que de son mode d’action. Mais il est aisé de comprendre comment la discussion entre augustiniens et antiaugustiniens a pu amener ces derniers, dans leur désir de supprimer tout mystère, à cette invraisemblable théorie.

d) La distinction des cas d’espèces. — - Il reste à signaler une nuance importante entre l’exposé des lïpistolte et la doctrine des Collationes. En ces dernières, on insiste beaucoup sur la différence de l’action de la grâce selon les individus. Dans les uns la grâce suit, en d’autres elle précède l’effort humain ; les uns sont, pour ainsi parler, contraints à suivre l’appel divin ; dans les autres la bonne volonté est simplement encouragée et soutenue par la grâce. Cet cITort pour distinguer les cas d’espèces n’est pas aussi sensible dans la doctrine analysée par les Epistolse.

e) La distinction entre t auxilium quo > et auxilium sine quo non ». — - Le rejet que font les Marseillais de la distinction augustinienne entre la grâce d’Adam », auxilium sine quo non, et la » grâce de l’homme déchu », auxilium quo, rejet que signale expressément llilaire, n. G, ne se rencontre pas dans Cassien, au moins en propres termes, mais en réalité l’insistance continuelle de celui-ci à faire de la grâce et de la volonté libre des forces comparables et parallèles, montre bien que, pour lui, la grâce de l’homme déchu est, pour l’ordinaire, un auxilium sine quo non, nullement un auxilium quo, ou, comme diraient les modernes, une grâce efficace par elle-même.

En définitive, le signalement fourni à Augustin par ses deux partisans des doctrines cultivées dans les milieux marseillais n’a rien de trompeur. Ce que l’ros per et llilaire donnaient comme les enseignements positifs de Saint-Victor, c'était bien ce que l’on retrouvait, plus ou moins dilué, dans l'œuvre considérable de Cassien.

1° Lu réplique de suint Augustin. - L'évêque d’Hippone ne se déroba pas aux demandes de ses partisans, et se mit aussitôt à la rédaction d’un ouvrage considérable qui exposerait ses vues sur les questions soulevées à Marseille. C’est bien eu effet un seul ouvrage en deux livres que le double traite intitule ! > prœdestinatione sanctorum et De dono perseverantise, /'. L., t. i. iv. col. 959-992 ; t. xi.v. col. 993-1034 ; l’habitude de les considérer connue deux morceaux