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SE MIRATIONALISTES

1852

morale en Allemagne au temps du philosophisme et de la restauration, 1700-lSôO, Strasbourg, 192C.

L’attitude du semi-rationalisme est plus nuancée. Ses partisans croient Fermement à l’existence de la révélation surnaturelle et professent que les vérités révélées sont inaccessibles à la raison humaine, au moins dans son état actuel, et ne peuvent par conséquent être pénétrées par celle-ci quant à leur essence. Estimant que la philosophie scolastique ne saurait constituer la substructure rationnelle du dogme, le semi-rationalisme a recours à la philosophie de son temps, tant pour fournir le fondement rationnel des vérités révélées que pour servir a leur présentation notionnelle. C’est ce recours à une philosophie se mouvant dans la ligne du rationalisme qui a été la cause des erreurs qu’on reproche au semi-rationalisme.

II. Principaux représentants. l" Stattler. — L’ancien jésuite Stattler (1728-1797) est le premier qui ait tenté de donner à l’exposé du dogme une substruelure rationnelle moderne. Il crut l’avoir trouvée dans la philosophie de Christian Wollï. laquelle n’est guère qu’une présentation scolaire des conceptions de Leibniz. Plusieurs publications de Stattler furent mises à l’Index. On y a relevé un certain nombre d’erreurs (par exemple la négation de la justice indicative de Dieu, le bonheur de l’homme présenté comme l’unique fin de la création) qui sont dans la ligne de la philosophie anthropocentrique du xviiie siècle et qui se retrouveront plus tard chez Hermès. Pour ces raisons, Stattler semble pouvoir être considéré comme semi-rationaliste, tout adversaire de VAufklârung qu’il ait été. Voir ici Stattler, et aussi Eschweiler, Die ztvei Wege der neueren Théologie, Hermès und Scheeben, Ratisbonne, 1920, p. 120.

Hermès.

Quand la Critique de la raison pure

de Kant eut ébranlé l’autorité dont jouissait la philosophie de WolIT, le criticisme kantien obtint rapidement droit de cité dans les universités catholiques d’Allemagne. Hermès toutefois est le seul qui ait tenté d’asseoir la théologie catholique sur la base de la philosophie criticiste.

Georges Hermès (1775-1831) part du doute critique. A en croire Schrôrs et Eschweiler, ce doute n’est pas réel, mais seulement méthodique, Hermès n’ayant pas prétendu que, pour acquérir la certitude du fait de la révélation, il soit nécessaire de le mettre d’abord réellement en doute. Mais, comme Hermès s’exprime de telle façon que ses lecteurs peuvent facilement être incités à croire que le doute réel et positif leur était recommandé, Schrors reconnaît que Grégoire XVI l’a condamné à bon droit comme fauteur du doute positif. Cf. Schrôrs, (ieschichte der kalholisch-theologisehen Fakultât zu Bonn, 1818-1831, Cologne, 1922, p. 88 sq. ; Kschweiler, op. cit., p. 126.

Pour Hermès la connaissance rationnelle est bornée au contenu de la conscience et ne saurait saisir l’essence des choses. La raison théorique ne connaît la vérité que subjectivement, poussée par une sorte de nécessité physique, en vue de satisfaire les besoins de l’intellect supérieur ( Vernunft). C’est en vertu de cette nécessité physique, orientée vers la satisfaction des besoins de l’intellect supérieur, que l’homme acquiert la certitude de l’existence de Dieu. Celle théorie de la connaissance à base criticiste est employée par 1 lermès pour démontrer la réalité de la révélation. Selon Hermès, l’homme doit accepter la révélation parce qu’elle

est susceptible de lui faire réaliser sa dignité humaine a son plus haut degré, l’homme ayant le devoir d’admettre des vérités même incertaines, si elles sont capables de l’amener à réaliser cette dignité, il est évident que cette démonstration de la révélai ion s’inspire de la critique de la raison pratique de Kant. Son xubjectlvlsme la rend impropre à servir de base ration

nelle à la foi chrétienne, dont elle méconnaît radicalement la nature.

1 ulile i son principe criticiste qui dénie a la rai. on la faculté de saisir l’essence des choses, Hermès ne s’est pas essayé à la pénétration rationnelle des vérités révélées. Pour lui, le contenu de la révélation est un bloc immuable, fixé par Dieu dès l’origine, que le croyant doit accepter tel quel. Aussi s’est-il toujours refusé à enseigner l’histoire des dogmes ; il lui déniait le droit à l’existence. Sa théologie dogmatique (Christkatholische Dogmatik) n’est qu’un exposé purement positif, peu original et peu correct des vérités théologiques. Les erreurs, qu’on y a relevées concernent principalement l'état originel de l’homme, le péché originel, la justification, la fin de la création. Elles n’ont aucune connexion avec ses principes criticistes. Hermès les a empruntéer aux théologiens allemands du xviiie siècle, en particulier à Stattler. Sur ce détail voir Eschweiler, op. cit., p. 120 ; pour l’ensemble de la doctrine hermésienne, voir ici l’art. Hermès, t. vi, col. 2288 ; pour son interprétation et sa « situation » historique, voir Eschweiler, op. cit., p. 80 sq.

Hermès fut fort loué et fort admiré de son vivant. Nombreux sont ses contemporains qui croyaient lui être redevables de la solution définitive du problème des relations de la foi et de la raison. L’hermésianisme acquit rapidement la prépondérance dans les facultés de Bonn, de Hrestau et de Braunsbcrg, ainsi qu’an grand séminaire de Trêves. Esser et Elvenich, tous deux disciples de Hermès, propagèrent sa doctrine à la faculté de philosophie de Bonn, et Droste Hulshofî, professeur à la faculté de droit de la même université, s’efforça d'établir la doctrine du droit sur la base de rhennésianisme.

La doctrine de Hermès avait aussi rencontré de sérieux adversaires. L’ancien franciscain Binterim, qui fut curé de Bilk près de Dusseldorf et qui jouissait d’une grande autorité, n’avait jamais goûté ni Hermès ni son enseignement. Les rédacteurs du Katholik, formés à l'école de Licbermann, reprochaient à Hermès les erreurs contenues dans sa dogmatique. Les tenants du mouvement romantique, qui voyaient dans l’irralionalisme de Schelling la base solide, de la théologie catholique, critiquèrent le rationalisme et le subjectivisine de la théologie hermésienne. La polémique fut très vive et finalement l’affaire fut portée à Rome. Ie 26 septembre 1835, par le bref Dum acerbissimas. adressé à l’archevêque de Cologne, le pape Grégoire XVI condamna Hermès pour avoir mis le doute positif à la base de toute recherche t béologique et pour avoir considéré la raison comme la norme principale et l’unique moyen permettant à l’homme de parvenir à la connaissance des vérités surnaturelles. Le bref dans Denz.-Bannw., n. 1618 sq.

Les mesures énergiques prises par l’archevêque de Cologne, Droste zu Vischering, amenèrent la rapide disparition de l’hermésianisme. Beaucoup de ses partisans comme Elvenich et Baltzer, prof esseur à Brestau, adhérèrent plus tard à la doctrine de Giinther.

Sur la polémique concernant I fermés, voir Schrors. Geschichte der kalholisch-theologisehen Fakultât, p. 326 et passim. Du même, la monographie sur l’hermesieii Braun, publiée en 1926 sous le titre W. Broun, l'.in vergessener Fûhrer ans der rheinischen Geisiesgechichte des XIX, Jahrhunderts ; du même. I<>lner W’irren, 1927.

3° Ganther (1782-1863). Gunther a voulu réaliser l’idéal de Schlegel en donnant un exposé raisonne des vérités révélées, reposanl sur une solide base philosophique. Comme Schlegel, il considérait le panthéisme

de Hegel Comme l’antipode du christianisme. I.a plu lOSOpble SCOlastique étant a ses yeux infectée de semi panthéisme, il la jugeait inutilisable tant pour la