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SIXTE IV

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Sixte IV. qui au début paraît avoir songé à chercher un refuge en France, reprit bientôt une attitude plus ferme. Il envoya Gabriel Rangoni prêcher la croisade à Naples, convoqua les ambassadeurs de tous les États italiens à Home, envoya des légats à tous les princes chrétiens, mais sans succès. Il décida dans les Etats de l'Église la levée de deux années de dîmes et ordonna des prières partout, hâta, au prix de grands sacrifices, l'équipement d’une Hotte de 25 vaisseaux qui devaient rejoindre la Hotte napolitaine et pourvoir à la sécurité des côtes de l'État pontifical. La chute d’Otrante hâta la réconciliation de Florence avec le pape, comme nous l’avons remarqué. Le 8 avril 1481, Sixte IV publia une encyclique, dans laquelle il engageait derechef les princes chrétiens à se liguer contre les Turcs, et promulgua dans toute l’Italie des bulles d’indulgences, invitant tous les États italiens à concourir pécuniairement et militairement à chasser les Turcs. L’appel du pape fut reçu avec empressement dans toute l’Italie, si l’on en excepte Venise, qui était liée à la Porte par un traité de paix. Pendant que l’on se livrait à tous ces préparatifs, le 2 juin 1481, arrivait à Rome la nouvelle de la mort inopinée de Mahomet II. Le pape en profita pour lancer un nouvel appel aux princes chrétiens. Ce fut en vain. Le 4 juillet, la flotte pontificale fit voile sous le commandement du cardinal Paul Fregoso pour Otrante, où elle se joignit à celle de Naples et aux troupes hongroises. Après une résistance acharnée de la part des Turcs, on s’empara d’Otrante le 10 septembre 1481. Sixte IV engagea son légat à poursuivre le combat contre l’ennemi et à le chasser de l’Albanie et de la Méditerranée, mais il rencontra une résistance obstinée de la part du cardinal Fregoso, qui, au début d’octobre, rentra avec sa tlotte à Civitavecchia et que ni instances, ni menaces du pape ne purent amener à reprendre la lutte. Ainsi se termina cette campagne contre l’Islam, qui aurait pu avoir des résultats bien plus étendus que la prise d’Otrante. si l’on avait voulu exploiter la victoire.

Pendant que le pape se consacrait cœur et âme à la guerre contre les Turcs, son neveu, l’insatiable Jérôme Riario, non content de posséder Imola et une partie des Romagnes, convoitait Naples et, dans ce but, ourdissait un complot avec Venise contre Naples, promettant aux Vénitiens de leur donner l-'errare, depuis longtemps convoitée, s’ils lui prêtaient secours. Sixte IV, qui depuis la trahison de Ferrand de Naples, lors de la guerre avec Florence, cherchait l’occasion de prendre sa revanche, accéda au projet de son neveu, d’autant plus volontiers qu’il avait à se plaindre de son vassal Hercule de Ferrare. L’alliance définitive entre Venise et le Saint-Siège fut contractée à l’automne de 1481. Contre ceux-ci se liguèrent, avec Ferrare, Naples, Milan, Florence, Mantoue, Bologne, Frédéric d’I’rbin et Alphonse de Calabre, fils de Ferrand de Naples. ainsi que les nobles familles de Savelli et de Colonna de la branche Paliano-Genezzano, qui avait reçu de Ferrand les comtés d’Alba, Fucense et Tagliacozzo, convoités par la famille Orsini. On espéra d’abord empêcher, au début de 1482, cette guerTe par l’intermédiaire du cardinal Julien Délia Hovere, autre neveu du pape, qui venait de rentrer de sa mission en France et qui exerçait sur Sixte IV une saye influence ; elle devint inévitable quand Ferrand de Naples lui-même eut ouvert les hostilités ers la mi-avril. Cette guerre fut fatale pour le Saint-Siège, d’autant plus qu'à Rome même s'étaient rallumées les luttes entre les Colonna et les Orsini.

Sous prétexte de défendre les Colonna contre les Orsini. les troupes napolitaines envahirent l'État pontifical et Alphonse de Calabre, secondé par les familles Savelli et Colonna, s’empara de Marino, d’Albano, de Castel Gandolfo et de Civita Lavinia, poussant jus qu’aux portes de Home, tandis que la flotte napolitaine prenait Bénévent et Terracine. L’alarme fut grande à Home. Accusés de trahison, les cardinaux l’rosper Colonna et Jean-Baptiste Savelli furent enfermés au château Saint-Ange, tandis que le pape équipait à la hâte une armée. L’inquiétude du pape augmenta encore, quand il apprit que le prélat aventurier André Zamonelic. archevêque titulaire de Grunca. qui avait été trois fois ambassadeur de Frédéric III auprès du Saint-Siège (en 1478, 1179 et 1480) et qui venait de sortir du château Saint-Ange, s'étant fait passer comme un légat de Frédéric III et comme cardinal du titre de Saint-Sixte, avait promulgué, le 25 mars 1482, dans la cathédrale de Bâle, la célébration d’un concile général dans cette ville. Il était soutenu dans son projet par les princes hostiles à Sixte IV, principalement par Laurent de Médicis et Ferrand de Naples, qui envoyèrent des délégués à Bàle. Comprenant la gravité de la situation, le pape mit tout en œuvre pour empêcher ce concile et faire arrêter l’imposteur. Heureusement, Frédéric III se rangea du côté du pape et somma André de renoncer à ses projets. Ces négociations entre le pape, Frédéric III et la ville de Bàle continuèrent, jusqu'à ce que, abandonné par les princes italiens, qui, après la paix du 12 décembre 1482, s'étaient ligués avec le pape contre Venise, l’aventurier fût arrêté et incarcéré le 18 décembre 1482. Surgit ensuite un conflit de juridiction entre le pape et la puissance séculière, pour savoir s’il devait être livré au Saint-Siège pour être jugé. L’affaire traînait en longueur et l’on n’arrivait pas à une solution, quand elle se termina par le suicide d’André, que l’on trouva pendu dans sa prison le 13 novembre 1484.

On comprend sans difficulté les vifs reproches que Sixte IV adressa à son neveu Jérôme Riario pour l’avoir jeté dans une guerre aussi aventureuse. Tout changea cependant du jour où le capitaine vénitien Robert Malatesta parut à Rome (23 juillet 1482) et prit le commandement des troupes pontificales. Son renom extraordinaire rendit confiance et le peuple le reçut avec une joie délirante. Après avoir repris successivement Castel Gandolfo, Castel Savello et Albano, il défît complètement l’armée napolitaine, le 21 août, dans les marais Pontins, entre Velletri et Nettuno. L’allégresse causée par cette victoire fut troublée par la mort de Malatesta, enlevé par la malaria le 10 septembre. La guerre ne prit cependant pas fin. Le duc de Calabre ne tarda pas à se ressaisir, tandis que son père, Ferrand de Naples, guerroyait contre Cènes, qui s'était alliée au pape, et que Venise cherchait à s’emparer de Ferrare. Toutefois, sur la proposition de Naples, le 12 décembre, la paix fut signée entre Naples et Gênes. Sixte IV fonda en souvenir l'église Santa Maria délia Pace.

Souhaitant une paix durable en Italie, Sixte IV invita Venise à participer à cette paix et à lever le siège de Ferrare. Mais Venise se plaignit amèrement de la conduite de Sixte IV et résolut de continuer la guerre, voulant à tout prix s’emparer de Ferrare. Elle ne réussit qu'à grouper contre elle, au congrès de Crémone, la plus grande partie des États italiens. Aux instances du pape pour faire cesser les hostilités, Venise répondit en rappelant son ambassadeur de Rome et en faisant appel à un concile général. Le 30 avril 1483, Sixte IV publiait son alliance avec Naples, Milan, l-'errare et Florence (outre Venise et, devant la résistance des Vénitiens, il promulguait, le 2 1 mai, la bulle par laquelle il jetait l’interdit sur la République. Les Vénitiens en appelèrent de nouveau ; i un concile général. Les adversaires de enise obtinn ni plusieurs avantages dans leurs combats, mais ils ne purent en tirer profit a cause de leur division. A