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SKARGA PIERRE)
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historique, trop favorable aux Latins. Exaspérés, les Ruthèues achetèrent tous les exemplaires qu’ils purent trouver et les brillèrent. L’auteur devait attendre jusqu’en 1590 pour donner une seconde édition. Entre

temps, il devenait recteur du collège <le Vilna, élevé par son entremise au rang d’académie (1579).

C’est à eette époque que parurent les Vies des saints,

1579. in-fol. Depuis deux ans, Skarga traduisait, résumait, adaptait les six tomes du chartreux Surius. qui, sortis des presses en 1570, axaient été partout bien accueillis. Le traducteur polonais avait ajoute de son eru quelques saints personnages de l’Ancien Testa ment, les saints de Pologne, notamment saint Jean de Kenty, ancien recteur de l’université de Cracovie ( + 1 173). un certain nombre de sermons, et des réflexions morales. In énorme succès vint le récompenser de son labeur. Huit éditions s'écoulèrent de son vivant, chaque fois augmentées ou améliorées ; depuis lors, l'œuvre n’a pas cessé de se réimprimer. Une vingtcinquième édition paraissait en 1900, et une autre encore en 1933-1930. à l’occasion du quatrième centenaire de la naissance de l’auteur. On a appelé les Vies des saints « un spécimen de la plus pure langue polonaise du xvi>e siècle ». Berga, Pierre Skarga, 1916, p. 202.

Mais Wolan n’avait pas rendu les armes. L’année même où les Vies des saints voyaient le jour, il rédigeait une Defensio ccenæ Domini contra Scargam et Turrianum, Losk, 1579, sans la mettre dans le commerce, mais en ayant soin de l’adresser au roi Etienne Bàthory. Possevino, de passage à Vilna quand l'écrit commença d'être connu, composa rapidement une réponse provisoire qui pût être présentée au roi. On ne sait pour quelle cause l’impression de cette réplique fut différée quatre ans. Epislola ad… regem adversus Volcan, Ingolstadt, 1583. De même, Skarga ne réussit-il que trois ans plus tard à mettre sur pied la réfutation qu’il intitula Duodecim arles et imposturee calvinistarum…, contra Yolanum, hujus hæreticæ pestis in Lilhuania archiminislrum, Vilna, 1582, in-4°. En même temps, il portait le débat devant le grand public dans un écrit en polonais intitulé Les sept colonnes de la doctrine catholique sur le T. S. Sacrement de l’autel, 1582.

Quand parurent ces deux ouvrages, leur auteur avait quitté Vilna. En 1579-1581, Bâthory, vainqueur dans une série de combats contre Ivan le Terrible, avait repris la ville lithuanienne de Polotsk et s'était emparé de la Livonie, entièrement dominée alors par le protestantisme, l’our mieux assimiler sa conquête, il avait voulu en chasser l’hérésie et, à cette fin, avait fait appel aux jésuites de Vilna. Skarga avait eu ainsi à établir une mission, puis un collège à Polotsk quillet

1580, juin 1581) ; ensuite il avait dû gagner Riga (mars 1582), où avec quelques Pères il s'était mis à prêcher. Mais tandis que ses compagnons, dans leur ignorance de la langue du pays, pouvaient du moins s’exprimer en allemand, lui, qui parlait mal eette langue, n’avait que la ressource du latin, de sorte qu’il s'était trouvé réduit à un tout petit nombre d’auditeurs. C’est alors que, dans l’impossibilité de parler, il s'était mis a écrire.

Si la mission de Riga fut en somme un échec pour Skarga, il se retrouva lui-même à Cracovie, où il était envoyé en été 1584, en qualité de supérieur, l’ar son talent, par ses hautes relations, il eut tout de suite dans la capitale une influence considérable ; Le soin qu’il prit de la chapelle de la résidence contribua a rendre au culte, dans les différentes paroisses de la ville, un lustre qu’on ne connaissait plus. Bientôt était établie par lui, entre autres œuvres charitables, une confrérie de la Pitié, actuellement encore existante quin 1938), et pour laquelle il composa un manuel de lectures spirituelles. Il entreprenait en même temps de longues

randonnées missionnaires, qui aboutirent à des conversions Importantes.

Skarga prédicateur royal.

En 1587, le roi

Etienne Bàthory étant mort, la diète élut pour lui succéder le jeune prince Sigismond Vasa de Suède. Celuici. qui avait eu des jésuites pour précepteurs, allait se montrer non moins favorable que son prédécesseur à l’apostolat des Pères. Couronné le 27 décembre, il visitait la chapelle île la maison professe dès le 1™ janvier de l’année 1588 et, le même mois, choisissait Skarga comme son prédicateur et théologien. Désormais, celui-ci prêchera chaque dimanche et à toutes les fêtes devant la cour ; à l’occasion, devant la diète. Jusqu'à la fin de sa vie il restera ainsi mêlé indirectement à la politique de son pays ; et son activité prendra assez souvent, de ce chef, un caractère assez particulier.

Son intervention dans l’affaire de l'érection du patriarcat orthodoxe de Moscou (1589) en est un exemple. Il apparaissait à tous les regards que la création de ce patriarcal risquait politiquement de détacher encore davantage les Kuthènes de la Pologne. Aussi est-ce dans un dessein patriotique en même temps que religieux, que Skarga fait paraître à cette occasion : Du gouvernement et de l’unité de l'Église de Dieu, 1590 (en polonais). L’ouvrage peut d’ailleurs êlre considéré comme une seconde édition refondue du livre édité en 1577 sous le titre De l’unité de l'Église de Dieu. Les modifications, qui portent surtout sur les notes de l'Église et la primauté du pape, sont empruntées, d’une manière parfaitement reconnaissable, aux Controverses de Bellarmin, qui avaient vu le jour quelques années plus tôt (1580). A cette source puisera largement désormais le controversiste aussi bien que le prédicateur, encore que, selon l’usage du temps, il ne confesse jamais ses dettes.

C’est encore au nom de la inorale civique et en vue du bien de l'État tel qu’il le concevait, que le jésuite faisait imprimer, anonyme, en 1592, son Avertissement aux évangéliques… et uvis aux catholiques. Analyse dans Berga, loc. cit., p. 231. Une lamentable échaulTourée entre calvinistes et catholiques venait d’ensanglanter Cracovie et d’exaspérer les haines religieuses (mai-juin 1591). Il s’agissait de ramener l’ordre dans les esprits et les cœurs. Rigide et haut de ton, dans le travers de l'époque, l' Avertissement n’apaisa rien mais excita les calomniateurs. Skarga et la compagnie de Jésus ne furent pas épargnés.

Le calme revenu provisoirement et Sigismond III étant allé recueillir l’héritage du roi de Suède son père, mort en novembre 1592, Skarga profita de l’absence prolongée du roi (août 1 593-septembre 1 59 1) pour préparer une édition de ses Sermons des dimanches et des fêles de l’année, qui parut en 1595. Dans la dédicace, il exposait à Sigismond les principes de la politique chrétienne.

Ces principes de politique chrétienne, l’occasion renaissait constamment pour lui de les faire valoir. On a vu plus haut qu’en 1573 un accord s'était réalisé entre tous les dissidents, sous le nom de < confédéral ion de Varsovie », au désavantage très réel des catholiques. Depuis la bagarre de juin 1591, les hérétiques récla maient avec arrogance le procès des violateurs de la « confédération », dans l’espoir d’y impliquer le clergé catholique et notamment les jésuites. Skarga, qui craignait de les voir réussir a la diète de 1595, publia

au début de l’année Le procès de lu confédération l i

tiyme). (/était une reprise des idées développées dans l’Avertissement aux évangéliques et Avis aux cathoh ques. Un inconnu ayant répondu, Skarga donnait l’année suivante un travail plus étendu, intitulé celle fois Le procès de la confédération m<ee lu correction et la réfutation de l’adversaire. Analyse dans Berga, loc. al.. p 237. La thèse était que l’unité de l'État, fondée sur