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l’unité religieuse, exige la répression de toute dissidence dans la foi, l’hérésie n’ayant droit à aucune existence ou protection légale, doctrine qui sera jusqu’au bout maintenue et qui se retrouve par exemple dans le Discours sur la confédération (anonyme), imprimé en 1607.

Non moins que l'épineuse question de la confédération de Varsovie, la question ruthène, on l’a dit déjà, préoccupait grandement Skarga. Depuis l'érection du patriarcat de Moscou, les tractations avec Home en vue de l’union ne s'étaient pas ralenties, et le 23 décembre 1595 avait été publiée la bulle d’union Magnus Dominas et laudabilis. Il ne semble pas que le théologien du roi v ait été mêlé directement. Mais. quand un synode fut convoqué à Brest pour procéder à l’acceptation de la bulle (octobre 1596), il y assista officiellement et s’entremit de toutes manières pour gagner à l’union les partisans du jeune Cyrille l.ucar. Témoin de la séparation des uniates et des Ruthènes orthodoxes, il en dressa et rendit public une sorte de procès verbal. Le synode de Brest, 1597, à quoi les plaintes et les allégations fausses des orthodoxes l’obligèrent bientôt d’ajouter une Défense du synode de Brest, et plus tard un Avertissement aux Ruthènes de religion grecque, 1610.

Un autre danger que la clairvoyance de Skarga ne pouvait méconnaître et qui, à ses yeux, conférait à l’union un intérêt vital pour la nation, c'était le péril turc. Par l’occupation de la Hongrie, en 1595, Mahomet III était devenu presque le voisin de la Pologne : grave motif pour le pays de ne pas affaiblir ses forces dans la division ; grave motif aussi d’adhérer à la ligue anti-ottomane que proposait le pape Clément VIII, et au sujet de laquelle il envoyait a Varsovie, en 159C, le légat Gætano. Mais les efforts du légat, comme les adjurations du prédicateur royal, se brisèrent devant l’apathie des dirigeants. La diète réunie en février 1597 pour discuter la question de la ligue, ne put aboutir à aucune conclusion. C’est sans doute sous l’impression de ce navrant échec, comme le pense M. Berga, op. cit., p. 2-17, que lurent écrites alors les huit harangues politico-morales auxquelles Scarga donna le titre de Sermons de diète et qui sont, à coup sûr, son œuvre la plus représentative, la plus connue aussi.

On a cru jusqu'à ces dernières années que les Sermons de dicte avaient été effectivement prêches. Selon M. A. Berga, qui les a traduits en français (Les sermons politiques du P. Skarga, Paris, 1916), ils représentent au contraire une (envie, de caractère oratoire, sans doute, mais écrite, composée suivant un plan très homogène (encore qu’avec des matériaux antérieurement élaborés) et rédigée en l’année 1597, après la session de la diète. C’est par une fiction que Skarga pouvait qualifier de sermons de diète » une série de morceaux dont toutes les idées avaient élé si souvent développées par lui dans des sermons prononcés en temps de diète ou a d’autres occasions. On conçoit d’autre part, qu’arrivé a la soixantaine et avant derrière lui une carrière qui l’avait astreint à examiner au jour le jour, en patriote, en moraliste, en prêtre, les problèmes politiques du temps, il ait voulu condenser le fruit de ses méditations sous la forme vivante qui lui était familière, pour en constituer une sorte de message a son pays. Les Serinons de dicte sont exacte ment cela : somme de morale politique chrétienne, animée d’un souille religieux et patriotique incomparable. Il y est question successivement : 1. de la sagesse nécessaire à une assemblée délibérante ; 2. du devoir de dévouement à la pairie ; 3. « le la concorde civile ; I. du fondement religieux de l'État et de la nécessité de le

maintenir intact ; 5. 'les maux qu’amène la tolérance de l’hérésie ; 6. du juste équilibre de la liberté des

citoyens et de l’autorité I larchiquc, et du tort que

cause au bien commun l’affaiblissement du pouvoir royal ; 7. du respect dû aux lois, à condition qu’elles soi. 'lit justes ; 8. de la répression des péchés publics. Dire que tout, dans ce corps de doctrine, a la même valeur, serait excessif ; mais ce qui y force le respect et l’admiration, c’est le courage avec lequel l’auteur adjure les dirigeants de son pays de mettre de côté leur particularisme pour ne prendre conseil que des exigences de l’intérêt public, dont ils sont responsables devant Dieu. Spécialement remarquables a cet égard, les sermons 2. ! i et (i ; ce dernier surtout, qui. en dénonçant avec vigueur la politique d’une aristocratie peu scrupuleuse et en réclamant, pour le bien de tous, le renforcement de l’autorité centrale, semble donner une voix à la conscience de la nation. Après avoir lu ces pages, on comprend qu’elles aient paru précieuses aux patriotes polonais de la période du démembrement. et qu’aujourd’hui encore elles soient classiques en Pologne. Publiés par Skarga en 1597 et deux fois réimprimés de son vivant, 1000 et 1010, les Sermons de dicte ont eu dans la suite nombre d'éditions.

0° Dernières œuvres, dernières années. Pour bien des raisons, Skarga désirait être déchargé de ses fonctions de prédicateur royal. Il put croire en 1(502 que l’heure de prendre sa retraite était enfin venue. SigismiMid III, veuf et désireux de se remarier, voulait épouser une soeur de sa première femme. Le théologien du roi, opposé à cette union, profita de la circonstance pour tenter de se démettre. Mais de Rome lui vinrent des apaisements et l’affaire s’arrangea. Entre temps, l’infatigable travailleur avait traduit, abrégé et adapté à l'édification des fidèles les Annales ecclésiastiques de Baronius. Des dix in-folio latins il tirait un volume qui parut en 1003. Peu après, il jugea nécessaire de combattre la doctrine de certains protestants anti-trinitaires, d’observance socinienne. Ce fut La confusion des nouveaux ariens, Cracovie, 1604. Une Deuxième confusion devait suivre en 1608. Mais auparavant Skarga eut à faire front contre d’autres adversaires.

La diète de 1606 avait semblé un moment devoir être un triomphe pour les dissidents. Des catholiques, des évêques même, étaient prêts à homologuer la fameuse « confédération de Varsovie ». Un projet de compromis avait été élaboré qui sûrement rallierait la plupart des suffrages, mais, dans la nuit qui précéda le vote, le roi fit consulter le jésuite qui déclara inadmissible le texte proposé à la diète et, par ses remontrances, décida les catholiques à voter contre. Les partisans de la confédération se déchaînèrent alors plus que jamais contre Skarga. qu’ils traitaient de perturbateur de l'État, et, d’une manière générale, contre les jésuites, dont ils déclaraient néfaste l’activité dans le pays. Cette campagne prit même bientôt une telle violence que Skarga crut devoir justifier publiquement l’attitude de ses confrères et la sienne propre en présence du cas de conscience que leur posaient les affaires religieuses de l'État. Le 17 septembre, ayant à prêcher devant la cour, alors en dépla cément à Wislica, il lut en chaire un mémoirejustiflcatif où il répondait à tous les griefs. Analyse dans Berga, toc. Cit., p. 256. L’année suivante il reprenait et développait le » sermon de Wislica » dans L’examen île l’ordre de la Compagnie de Jésus, Cracovie, 1607, ibid., p. 257, lier, disait-il, de voir les jésuites maltraités en Pologne, comme partout ailleurs, par les hérétiques.

L’activité de Skarga touchait à son terme. Il avait édile, en 1606, un Manuel de piété il l’iism/c des soldats. Il publia encore, en 1609, sous le titre Areopagus, quatre sermons sur le discours de saint Paul devant l’Aréopage ; en 1610, ses Sermons de circonstances ; en Kilt, une Invitation ô lu foi, court exposé de conlro-