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théologien doit pouvoir étudier à ses sources mêmes la tradition chrétienne. Il acquiert dans ce but la conoaissance de quelques langues orientales, complément nécessaire, selon lui, du grec et du latin. Petau personnifie assez bien, en somme, son idéal. Aee Passaglia, il entreprend de le rééditer en le mettant au point de la science du jour : Petaoii opus de theologicis dogmalibus expolitum et auctum… tomus primas. Home. 1857. Mais à peine ee premier volume vient-il de paraître, qu'à la demande du cardinal Hausclier. Sehrader est envoyé a Vienne (oct. 1857), pour occuper à l’Université la chaire de théologie dogmatique. Là, durant dix ans. va saillir et s’accentuer de plus en plus un second trait de sa physionomie de théologien : la passion de défendre les prérogatives pontificales et les doctrines romaines, de toutes parts battues en brèche.

Dans cet esprit, parallèlement aux synopses de ses cours annuels, qu’il fait imprimer depuis 1861 sous le titre général de Thèses théologies (détail dans Sommervogel), il écrit sur les points les plus directement en butte à la critique rationaliste : De unitute ronuuui liber I, 8'.8<xy.- : yÂç. Fribourg, 1 8(^2 : De Iriplici ordine naturali, prieternaturali et supernaturati. Vienne, 1864 ; De unitate romana liber II, —çoi.yy.XTiy.ôç, Vienne, 1866 ; de 1865 à 1867. la série Der Papsl und die modernen Ideen, éditée à Vienne et offrant au public, dans son premier fascicule, un recueil des textes pontificaux précurseurs du Syllabus ; dans le deuxième, une traduction et une étude de l’encyclique du 8 décembre (Quanta cura) et du Sijllabus : dans le troisième, une ample dissertation intitulée Pins IX als Papst und Konig, 1865 ; puis en 1866, toujours dans la même collection, Die Théologie der Schule oder die Scholastik, ihr Wesen und ihr ÏYerlh ; enfin en 1868, annexé à la sixième série des Thèses theologicæ, un De fide, ulrum ea imperari possit, deque libertate conscientiæ, commentarius dogmalicus.

On conçoit qu’une production théologique de ce caractère et de cette importance, jointe au mérite reconnu de l’auteur, ait constitué un titre au choix du Saint-Siège, lorsqu’il s’agit pour Rome de nommer des commissaires chargés de préparer le futur concile du Vatican. De fait, Sehrader est désigné dès septembre 1867 pour faire partie de la commission théologicodogmatique. Cf. Acta et décréta sacrorum conciliorum recentiorum. Collectio Lacensis, t. vii, col. 1052. Il prend part en cette qualité aux travaux du concile. Puis, les années 1871 et 1872 le voient professeur d'Écriture sainte au Collège romain. Mais en automne I 872 il quitte Rome de nouveau, cette fois pour la France.

Depuis quelque temps, en effet, Mgr Pie caressait le projet de faire de son séminaire une faculté de théologie. Ainsi le rôle doctrinal que les événements l’avaient conduit à jouer de sa personne au sein de l'Église de France, serait-il comme perpétué par une institution durable et fixé au siège du grand docteur des Gaules, saint Hilaire. Ayant eu de nombreuses occasions d’apprécier pendant le concile le jugement et la doctrine du P. Schrader.il le demanda, en 1872, comme directeur d'études au supérieur général, lequel ne crut pas devoir refuser, nonobstant les informations peu favorables qu’il recevait de France concernant les chances de succès de l’affaire. Sur la faculté de Poitiers, voir : Mgr Baunard, Histoire du cardinal Pie, t. ii, 1 887, p. 487 sq. et 578 "-q. ; Burnichon, La Compagnie de Jésus en France. Histoire d’un siècle : 1814-1914, t. iv, 1922. p. 527 sq. ; PU IX acta. Pars prima, t. vii, Rome [s. d.|, p. 112 : bref d'érection de la Faculté, 1 er octobre 1875.

Peut-être la réputation de ce maître importé de Home eût-elle aplani peu à peu les difficultés de l’entreprise. Malheureusement, il n’avait plus guère que deux ans à vivre. Deux ans d’un travail intense et fécond, d’ailleurs. Dan-, la pleine maturité de son talent, il rêvait de

composer un cours complet de théologie répondant a sa conception personnelle de cette discipline. En conséquence, tout eu éditant selon s. m habitude les thèses

objet de son enseignement, Thèses theologicœ… Séries VIII : De theologia prolegomenis et de angelis ; accedit de prmdestinatione eommentarius, Poitiers, 187 1 (sur cet exposé de La prédestination post prævisa mérita, cf. Revue des sciences ecclésiastiques, 187 1. t. ii, p. 359371 et 197-.")17), il lit paraître, en 1874 encore, à Poi tiers, deux larges traités où il développait la doctrine des thèses, et qui représentaient les premières assises de sa grande théologie : De theologia generatim et De Deo créante. De plus, à la (in de la même année il met tait la dernière main à un autre traité fondamental. De theologico testium fonte deque… traditione eommentarius. Mais il devait laisser à un confrère venu le rejoindre de Home, le P. Aug. Ferretti, le soin de publier cet ultime ouvrage, car, en février 1875, une pleurésie l’emportait âgé à peine de cinquante-cinq ans.

S’il avait eu l’estime et la vénération de l'évêque de Poitiers, comme de bien d’autres, le P. Sehrader s'était vu, en revanche, fort maltraité par les publicistes du camp adverse, dont plusieurs, surtout en Allemagne, affectaient de ne voir en lui qu’un spécimen achevé de la théologie ultramontaine. Ainsi Doellinger : cf. Granderath, Histoire du concile du Vatican, trad. fr., t. i, 1907, p. 206, 434 et 79 sq. ; ainsi von Schulte, dans Allgemeine deulsche Biographie, t. xxxii, 1891, p. 425427. On s’explique en partie la chose quand on feuil lette les livres techniques du savant professeur. D’une part, en effet, la présentation et la langue en sont on ne peut plus rebutantes, y faisant comme barrage à la pensée, selon la juste remarque de critiques par ailleurs bienveillants, tel un recenseur anonyme de la revue Der Katholik, 1863, t. i, p. 102 ; tel aussi Scheeben, dans le Litcrarischer Handiveiser, 1869, p. 334. De sorte que toute la science enfouie dans ces volumes hérissés se trouve fatalement vouée à rester méconnue. D’autre part, il est indéniable que, dans sa hantise du libéralisme, Sehrader va parfois à l’extrême opposé. Sa conception de l’infaillibilité pontificale, par exemple, fondue qu’elle est avec l’idée d’une juridiction universelle du pape dans la chrétienté, fait parfaitement comprendre les appréhensions des anti-infaillibilistes du concile du Vatican.

Précisons. Une formule comme celle de ce titre de paragraphe du De unitate romana (t. ii, p. 415) : Supremus christiani juris fons et cuslos romunus, pourrait, isolée, s’entendre correctement. Mais dans l’orchestration de l’ouvrage elle prend une résonance fâcheuse. Comparer : p. 127-143, 360, 446-452. Au fond, Sehrader se représente la société chrétienne à la manière de beaucoup de médiévaux, comme un tout organique, où fonction séculière et fonction spirituelle-pontificale se comportent à peu près dans le même rapport que le corps et l'âme chez l’homme individuel. Un cléricalisme doit logiquement sortir de là. Ft peut-on espérer que la logique du théologien sera ici en défaut ?

En octobre 1863, à la suite du discours de Montalembert à Malines, la Civillà callolica, par la plume, croit-on, du P. Curci, avait proposé comme une solution conciliatrice au problème de la liberté de conscience, la distinction bientôt célèbre de la thèse et de l’hypothèse. Dans l'œuvre du P. Sehrader, cette distinction n’a pour ainsi dire pas de place. Elle n’apparaît que dans une note du De theologia (1871), p. 1 13 ; et antérieurement, sous une forme équivalente, dans une phrase rapide du De /nie atram imperari ea possit (1868), p. 91. l’ar contre, en 1865, l’auteur de la brochure Die Encyclica des 8. Decembers 1864 (second fascicule de la série Der Papsl und 'tic modernen Ideen) écrivait sans sourciller, p..'{.' !, commentant les propositions 77 79 du Syllabus : En lace de ces propositions, on ne peu ! plus