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SPINOLA (CHRISTOPHE DE)


tions furent décisives et pendant deux ans et demi on ne parla plus de tentatives de réunion.

Spinola toutefois ne se reposa pas : en 1682 et 1683, muni de lettres de recommandation de l’empereur, il entreprit de nouveau la visite des différentes cours protestantes, et s’efforça de provoquer des conférences avec les théologiens protestants sur la base de son traité : Concordia cliristianu circa pttncta principal iora, quæ inter romanos et protestantes schisma generarunt. Plusieurs princes et théologiens firent bon accueil aux propositions de Spinola et lui promirent même leur collaboration. Ainsi trouva-t-il les meilleures dispositions chez les princes de Brandebourg, de Hambourg, de Brunswick, de Wolfenbuttel, de Saxe inférieure, de Hanovre, etc., ainsi que chez les théologiens Hildebrand de Wolfenbuttel, André Kuhn de Danzig, l-'abritius de Heidelberg, Ilandelius d’Augsbourg, mais surtout auprès de Gérard Molanus, abbé de Lokkum, et de Leibniz. Par l’intermédiaire du duc Ernest-Auguste de Hanovre, protestant, mais très favorable à l’idée de la réunion, des conférences furent tenues entre Spinola et les principaux théologiens de Hanovre, entre autres H. Barkhaus et Molanus, qui fut, chez les protestants, l'âme de l'œuvre de conciliation. Ces conférences eurent un résultat appréciable, qui fut consigné dans un écrit qu’Albritius acheta à la foire de Leipzig du mois d’octobre 1683 et qui est intitulé : Methodus reducendæ unionis ccclesiasticæ inter romanenses et protestantes ex speciali mandato ser. prineipis ac dornini Ernesti Augusti… a seren. cels. sua theologis conscripta. Cet écrit était signé par Molanus et H. Barkhaus. Voir à ce sujet la lettre d’Albritius à Leibniz éditée par Foucher de Careil, Œuvres de Leibniz, 1. 1, Paris, 1859, p. 468, ainsi que les Regulæ circa cltristianorum omnium ecclesiaslicam reunionem tam a sacra Scriptura quant ab uniuersali Ecclesia et augustana conjessionc præscriptæ et nonnullis hujus (se. Augustana confessio) prof essori bus pro facilitate pacis c.rutantium et protestantium lutngarorum collectas, rédigées par Molanus, que l’on peut trouver dans les diverses éditions des œuvres complètes de Bossuet, par exemple, t. viii, Paris, 1846, p. 509-515, et la trad. française, p. 515-523. Ces deux écrits donnaient le point de vue des protestants et devaient constituer la base des conférences entre ceux-ci et les catholiques. Pour ce qui est de la position adoptée par Molanus et ses amis, elle est bien résumée dans une lettre de Leibniz à Spinola de février 1683 : « Les protestants commencent d’abord par se réunir à l'Église romaine et reconnaissent la juridiction pontificale, niais on ne les oblige pas, du côté catholique, à recevoir le concile de Trente, dont les décrets dogmatiques, et à plus forte raison disciplinaires, sont considérés comme provisoirement suspendus. Les Eglises liniates, qui conserveraient sur des points importants de discipline leurs usages actuels, seront admises à avoir leurs représentants à un futur concile, où l’on terminera, si besoin est, les controverses dogmatiques. » Voir ici t. x, col. 2082-2083. Pour les concessions faites par les protestants, voir aussi G. Menge, art. cit., p. 32-34. Quant à l’attitude adoptée par Spinola par rapport aux demandes protestantes, nous en parlerons plus loin. Qu’il suffise de remarquer ici qu’au point de vue dogmatique il ne leur a jamais fait la moindre concession et qu’au point de vue disciplinaire il leur promit de travailler à Home

pour que certaines concessions leur lussent faites. Le projet de Spinola ne fui cependant pas accueilli

partout avec la même faveur qu'à Hanovre. Ainsi le mémoire Concordia cliristianu circa piaula principù liora, cité plus haut et destiné au prince de Brande bourg, qui devait constituer la base pour les confé

renées acc les théologiens protestants, ne fut pas reçu par ceux de Brandebourg et fut accueilli avec une bos

tilité ouverte par ceux de la cour de Berlin. Voir Ph. Hiltebrandt, op. c17..p. 81-82, et G.Haselbeck, art. cit., dans Kaiholik, 1913. t. ii, p. 15-16. Contre les concessions faites à Hanovre, s’insurgèrent pendant l’automne de 1683 les prédicateurs de Gotha et de Dresde, qui ne voulaient rien savoir d’une nouvelle soumission au joug papiste et antichrétien. A Francfort on estimait que les propositions faites par Spinola concordaient en réalité avec les décisions du concile de Trente et que, dès lors, elles étaient inacceptables, parce qu’inconciliables avec la foi luthérienne. La landgraline Elisabeth Dorothée de Darnistadt mit les cours amies en garde contre les projets de Spinola et engagea la faculté théologique de Giessen h faire une critique serrée du « syncrétisme athée » del'évêque de Knin. L'électeur de Saxe défendit à ses théologiens toute tractation privée avec Spinola et demanda aux autres princes d’adopter la même position. Sur cette opposition, voir G. Menge, art. cit., p. 34-42, où l’on trouvera le texte de quinze objections faites par les protestants au projet de Spinola et publiées dans les X ourdies de la république des lettres (Amsterdam). 1684, avril, p. 187 sq.

L’opposition contre Spinola ne venait pas seulement, d’ailleurs, des protestants, mais aussi des catholiques qui lui reprochaient d’avoir été trop loin dans ses concessions aux dissidents. Parmi eux, les Français vinrent en premier lieu. Pendant l'été 1683, Leibniz, à la prière de Spinola, était entré en relations avec Bossuet, lui avait exposé les démarches faites en Allemagne pour opérer l’union entre protestants et catholiques et lui avait envoyé les Regulæ circa unionem de Molanus. Lu 1683, Spinola eut aussi une correspondance assez suivie avec Bossuet, qui, dans ses réponses, le loue pour sa noble entreprise et l’assure que le roi apprécie hautement les elïorts qu’il fait pour opéier l’union entre protestants et catholiques. Voir Correspondance de Bossuet, édit. par Ch. Urbain et E. Levesque, t. ii, n. 284, p. 391. Mais la pensée intime du roi paraît avoir été assez différente ; il pouvait craindre que le rétablissement de l’unité religieuse ne renforçât l’Allemagne. Il semble avoir Intrigué à Rome et avoir accusé le pape de vouloir faire des concessions nuisibles pour l'Église afin de gagner les protestants allemands. Sous le coup de toutes ces accusations, Spinola, muni d’une lettre de l’empereur, se rendit à Home, au début de 1684, pour s’expliquer avec le pape. Celui-ci lui accorda une longue, audience et le pria de mettre par écrit le rapport circonstancié qu’il lui avait fait de vive voix. C’est ainsi que Spinola rédigea la Sarcla relatio status, quem negotium religionis a nouent ullimis annis in Germania oblinuit. conservée à la bibl. de Hanovre, et que le pape lit examiner par trois théologiens. Le résultat de ces négociations nous est connu par un bref d’Innocent XI à Spinola, dans lequel le pape exprime sa sat isfacl Ion pour les résultats obtenus et engage le négociateur à continuer son œuvre sous la protection de l’empereur et en son propre nom, mais nullement au nom du pape, pour éviter toute difficulté avec les adversaires. Voir le Tagesbuch de Spinola dans F.-X. Kiefl, Der Friedensplan des Leibniz, Leipzig, 1903, p. 248 -2 19. Dans un bref à l’empereur du 15 juillet 1684, le pape affirmait que, sans doute, il n’ajoutait pas loi aux accusations formulées parles Français contre l'œuvre de Spinola, mais que, par ailleurs, il ne pouvait approuver complètement les pro

positions de Spinola. Voir.1..1. Herllner. op. cit., t. II, Paris, 1895, p. 183. Muni de ce bref et de plusieurs Ut t ifs de cardinaux et de généraux de différents ordres religieux, favorables à son entreprise, Spinola quittait

Home vers la fin du mois d’août de l’année 168 I. Mais,

a son retour a Vienne, il fut profondément déçu ; au

lieu des encouragements qu’il attendait, il y trouva en