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SPINOLA (CHRISTOPHE DE)


seulement un consensus implicilus : on était prêt à les accepter connue dogmes, dès qu’on en aurait l'évidence. De la sorte, selon Si>inola, il n’existait aucune objection sérieuse contre l’union des protestants, puisqu’ils croyaient au moins implicitement tout ce que croit l'Église catholique.

Les théologiens protestants qui auraient les dispositions décrites ci-dessus et donneraient des garanties pour l’avenir pourraient être ordonnés prêtres et même évoques et comme tels assister au concile éventuel et y avoir droit de vote. On pourrait ensuite faire aux protestants bien disposés et revenus a l'Église quelques concessions d’ordre disciplinaire, comme la cession des biens et de certains droits ecclésiastiques aux princes, l’autorisation de vivre dans l'étal de mariage aux prédicateurs et aux théologiens mariés. la communion sous les deux espèces, etc. Spinola toutefois n’avait pas donné l’assurance que toutes ces concessions seraient faites, mais il avait promis de travailler à les obtenir du Saint-Siège, qui seul pouvait les accorder.

Tout l’exposé de cette méthode fut rédigé par Spinola sous la forme d’un Casus, dans lequel plusieurs questions sont posées au sujet d’un peuple acatholique qui a les dispositions décrites ci-dessus et qui croit au moins implicitement tout ce que l'Église croit. A la première question : An populus hic sic dispositus sil hecreticus formalis vel solum materialis et an, non obstanle explicala imperfectione, ad unionem admillendus et legitimis sacerdotibus et sacramentis lempestive providendus ? Spinola répond que ce peuple est seulement matériellement hérétique et par conséquent peut être admis à l’union et être pourvu de prêtres et de sacrements. A la deuxième question : An expédiât huic populo concilii congregalionem pro congruo tempore promittere ? et à la troisième : An expédiât pnvdicatorcs huius populi non obstanle malrimonio in saccrdoles ordinare ? la réponse est affirmative. A la quatrième question : An congruum sil, ut memorati prirdicatores a Sanctissimo per novas dignilates concessionemque voli ac sessionis in concilio prsemientur ? Spinola affirme que cela dépend du Saint-Siège, mais qu’il existe des motifs plausibles pour répondre affirmativement. Ce Casus avec les solutions données par Spinola fut envoyé aux principales universités catholiques d’Allemagne, d’Autriche, de Hongrie, à celle de Louvain et aux principaux théologiens tant séculiers que réguliers ; il fut approuvé par le plus grand nombre d’entre eux. De ce Casus il faut rapprocher un chapitre de la Sécréta relatio citée plus haut, intitulé : De remediis quæ zelosi Germant congrua fore sub S. Sedis correctione existimant, dans lequel Spinola s’efforce de réfuter les objections faites contre son plan. Pour le Casus et ce chapitre de la Sécréta relatio, voir G. Haselbeck, Die Stcllung des Ircnikers P, Christophor Rojas y Spinola zur Orthodoxie, dans Franziskanische Studien, t. i, 1914, p. 28-34. De cet exposé il résulte que, dans le plan élaboré par Spinola, on ne peut rien trouver qui puisse faire suspecter son orthodoxie puisqu’il n’a jamais fait la moindre concession dogmatique aux protestants et que, pour les concessions d’ordre disciplinaire, Il s’en remettait aux décisions du Saint-Siège. D’ailleurs il a toujours cillé avec un soin jaloux a rester dans l’orthodoxie, Comme le prouvent tous ses ('(lits et les nombreux témoignages des protestants allégués par (1. I lasclbeck, art. cit., p. 18-24, ainsi que l’approbation de son œuvre par les souverains pon tiles.

Si, du point de vue dogmatique et théorique, on ne peut faire à Spinola aucun reproche, il n’en est pas de même quand on considère son œuvre d’union au point de vue pratique. Le reproche le plus grave que l’on puisse lui faire, c’est d’avoir voulu de fait réaliser

l’union entre prot estants et catholiques, alors que cet accord, étant données les dispositions des protestants et leurs relations effectives avec les catholiques, était impossible à obtenir. Il fallait un robuste optimisme pour croire à la possibilité d’amener la majorité des princes et des théologiens protestants aux dispositions exposées plus haut et requises pour être admis dans l'Église catholique, ne fût-ce qu'à titre provisoire. La faute principale de Spinola a été de croire pouvoir réaliser ce qui, de fait, était irréalisable. Puis son zèle pour ramener les protestants au sein de l'Église lui a fait faire des choses que la masse et une grande partie des théologiens catholiques, qui tenaient compte des facteurs réels, ne comprenaient pas et qui fut cause d’une opposition souvent acharnée de leur part aux projets de Spinola. Le même zèle dans la poursuite de son idéal le rendit aveugle sur les dispositions réelles des protestants et lui fit considérer leurs velléités et leur empressement apparent, mais réservé, comme une volonté ferme et arrêtée d’aboutir à l’union. Aussi la déception éprouvée quand, à la veille de la réunion des théologiens protestants et catholiques à Vienne, en 1691, les théologiens protestants se retirèrent et refusèrent de paraître, a-t-elle dû produire sur Spinola un effet mortel dont il ne s’est plus remis. Un autre reproche que l’on pourrait faire à Spinola, c’est d’avoir trop négligé d’exposer aux protestants la doctrine catholique, chose qui, dans ces tentatives de réunion, aurait dû occuper la toute première place, En effet, même dans le cas où protestants et catholiques accepteraient les mêmes vérités, la raison fondamentale de cette acceptation diffère essentiellement chez les uns et les autres. Les protestants les admettent sur la foi du propre examen et de l’expérience personnelle, tandis que les catholiques les acceptent sur le témoignage de l'Église infaillible. On peut encore reprocher à Spinola d’avoir été trop condescendant pour le point de vue protestant du procédé à i-uivre et d’avoir accepté trop facilement la manière de voir des dissidents, qui voulaient d’abord s’unir aux catholiques en oubliant les points de doctrine qui les divisaient et régler ensuite ces points après la conciliation. Bossuet fut plus intransigeant ; il voulait avant tout causer pour faire voir aux protestants que les décisions dogmatiques, dont ils s’effarouchaient, n’avaient rien quc de légitime et, après avoir réalise l’accord doctrinal, opérer défait l’union entre protestants et catholiques.

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p. 18-36 ; le incine, Sinci-ra relatio… dos Spinola, dans Jahresbericht des seraphischen Kollegs St. Joseph tu Yat<rsleyde, 1911-1912, Fulda, 1912 ; II. Landwehr, Spinolas Unionsbestrebungen in Brandenburg, dans Mdrkische Forschungen, t. xx, 1887, p. 2 : si sq. ; F.-X. Kiefl, Der Friedensplan des Leibniz, Paderborn, 1903 ; A. Thelner, Gesch, der Rùckkehr </cr Hâuser Braunschutelg and Sachsen, Elnsiedeln, 1843 ; il. Landwehr, Die Kirehenpolitik Friedrich WiUielms, Berlin, 1894, p. 340-341 ; Baumstark, Kaiser Leopold L, Frlbourg-en-B., 1873 ; J. Jusl von Einem, lias Leben M<>lani, Magdebourg, 1734 ; C.-E. Weidemann, Geschtchte des Klosters Loceum, Gœttlngue, 1822 ; L. von Pastor, Geschichte der Pâpste, i. iv />, Fribourg-en-B., 1930, p. 1008-1014.

A. Ti i i i ; nr.