Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 14.2.djvu/520

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
2541
2
SIM IMTl Kl. S. API’HKCI A T I O N
5’. 2

livrés à l’inquisiteur frère Michel Monacbl, Bull, franc, t. v. p. 132, qui réussit à en réduire encore vingt à l’obéissance envers le souverain pontife. Plus tard un des cinq obstinés se rétracta et fut condamné au « mur ». les quatre restants furent condamnés comme hérétiques et livrés au bras séculier, par sentence de l’inquisiteur. Marseille. 7 mai 1318, publiée par Baluze-Mansi. Miseellanea, t. n. Lucques, 1 761, p. 2 18 sq. C’étaient Jean Barrani de Toulouse. Déodat Miehælis, Guillaume Santonis et l’once Rocha qui turent brûles à Marseille. Les viniit autres durent abjurer publiquement leurs erreurs et. après avoir reçu les pénitences, furent dispersés dans différentes provinces de l’ordre. Quelques-uns semblent s’être réfugiés en Italie, puisque l’inquisiteur Michel Monæhi adressant une lettre de Marseille, le 3 décembre 1310. au provincial de love. me. enjoint à celui-ci de combattre certains pseudo-religieux qui avaient abjuré leurs erreurs dans les mains de l’inquisiteur mais étaient retombés et couraient maintenant par le monde. La lettre a été publiée par J.-M. Vidal, Bullaire de l’Inquisition française au zive siècle Paris, 1913, p. 38. et parOliger dans les Studi francescani, t. xxviii, 1931, p. 198.

Le mouvement des spirituels franciscains provençaux se termina ainsi sur le bûcher et dans les prisons claustrales. Cependant quelque étincelle s’en retrouve encore plus tard. C’est ainsi qu’en 1354 deux franciscains. Jean de Châtillon, prêtre, et François ab Aquata, frère laïc, d’abord emprisonnés à Carcassonne et ensuite conduits à Avignon, sont brûlés comme hérétiques à cause de leurs opinions sur les décrets de Jean XXII relatifs à la pauvreté du Christ et sur la légitimité de ce pape et de ses successeurs. Voir Raynaldi. an 1354, n. 31. En même temps Jean de Roquetaillade était détenu dans les prisons de la cour pontificale pour ses prophéties et ses idées joachimites. Voir Wadding, Annales, à l’an 1357, n. 1(5-21, t. viii, 3° éd., p. 155-158. Ce sont les dernières traces du courant spirituel en France. Il est cependant assez significatif que les premiers observants français en présentant leurs griefs contre l’ordre au concile de Constance en 1115. se servent largement des idées exprimées par Ubertin de Casale lors de la grande discussion de 1309 à 1312. Voir Archio. franc, hist., t. ix, 1916, p. 3 sq.

Avant même la tragédie finale des spirituels provençaux. Jean XXII avait frappé les deux autres groupes, celui de la Marche d’Ancône, demeurant alors dans les environs de Home, et celui de la Toscane réfugié en Sicile. Contre le premier il publia la bulle Sancta romana, 30 décembre 1317, Bztllar. Iranc, t. v, p. 131, dans laquelle apparaît pour la première fois le nom de fraticelles, sous lequel les anciens spirituels, devenus schismatiques et hérétiques, seront dorénavant désignés. Le groupe toscan en Sicile est excommunié par la bulle Gloriosam Ecclesiam, 23 janvier 1318, Bullar. franc., t. v, p. 137. On lui reproche cinq erreurs principales : 1. Ils admettent deux Eglises, l’une charnelle, comblée de richesses, souillée de crimes, dominée par le pape et les prélats inférieurs ; l’autre spirituelle, pure, orme de vertus, pauvre, dans laquelle eux seuls se trouvent et a laquelle eux-mème. président par mérite de ie spirituelle. 2. Ils proclament que les prêtres et les autres ministres de l’Église sont privés de juridiction et du pouvoir du sacrement de l’ordre et qu’ils ne peuvent pas rendre sentence ni administrer les sacrements ni instruire le peuple, parce que dans les pirituels seuls résilient la sain été et l’autorité de la vie spirituelle.’', . La troisième erreur est celle des vaudois, pane qu’ils enseignent qu’il ne faut. sous aucun prétexte, prêter serment, sous peine de péché mortel, t. La quatrième erreur provenant encore de l’hérésie vaudoise, est que les piètres en péché

mortel ne peuvent pas faire les sacrements tii les administrer. 5. Enfin ils sont tellement aveuglés qu’ils affirment que l’Évangile du Christ, dans ces temps modernes, ne s’est vérifié qu’en eux et que, jusqu’alors, il a été amoindri sinon complètement éteint. En plus des précédentes erreurs on leur en reproche encore d’autres : sur le mariage, la fin du monde, la venue de l’Antéchrist qui serait imminente, erreurs auxquelles ils cherchent à attirer les cœurs des simples.

Les fraticelles hérétiques descendant des anciens spirituels italiens augmentés en nombre par la décision dogmatique de Jean XXII sur la pauvreté du Christ et des apôtres (1323), favorisés par l’absence de la papauté du pays et protégés par quelques seigneurs el par les villes libres, ont su se maintenir jusqu’en t 166. Voir l’art. Fraticelles.

IV. Jugement a porter sur les spirituels et

EXAMEN DE QUELQUES ASPECTS PARTICULIERS DE LEUR DOCTRINE ET LEUR LITTÉRATURE. — Il Va de soi

qu’une question qui troublait aussi vivement l’ordre des frères mineurs, a profondément divisé les historiens du passé selon leur point de vue particulier. Les uns ont condamné en bloc tout le mouvement comme une rébellion de quelques fanatiques et même d’hérétiques contre l’ordre franciscain, insigne par sa sainteté et sa doctrine ; d’autres y ont vu un mouvement mal dirigé, mais en soi généreux et apte à ramener l’ordre à la fidèle observance de la règle, bref, le germe de l’observance régulière qui, dans des conditions plus heureuses, commença à rajeunir l’ordre dès la seconde moitié du xie siècle. Aujourd’hui l’historien objectif, grâce aux nombreux textes mis à sa disposition, est à même de se former une idée plus juste et de distribuer lumière et ombre dans une proportion plus équitable.

Le premier à mettre un peu d’ordre dans la confusion des textes contradictoires, à ajouter de nombreuses sources inédites et à distinguer clairement les différents groupes avec leurs courants divergents, fut le cardinal F. Hhrle dans ses études magistrales publiées dans les quatre premiers volumes de YArchiv fur Litcratw-und Kirchengeschichte, souvent cité dans les pages précédentes. Depuis, d’autres textes ont été publiés, mais sans apporter de modifications substantielles aux conclusions de l’éminent auteur.

Un examen attentif oblige à constater de graves fautes de part et d’autre. La Communauté, forte de sa position légale, a souvent manqué de cette charité, qui sait comprendre et pardonner, à l’égard des zélateurs de la pureté de la règle, qui, au commencement du moins, semblaient obéir à de bonnes intentions. Ange de Clareno se plaint maintes fois de la cruauté de la Communauté, et on ne lira pas sans émotion son Histoire des sept tribulations et son Epistola excusatoria. Il exagère sans doute, mais il a été trouvé substantiellement véridique. La terrible épreuve par laquelle, peu après l’écrasement des spirituels, l’ordre franciscain a passé, à propos de la question de la pauvreté du Christ et de ses apôtres, a été appelée un jugement de Dieu. Kirchenlexikon, t. xi, 1899, p. 644. Pour sauver la doctrine et l’honneur de l’ordre, Michel de Césène et Bonagratia de Hergame ont dû recourir â ces mêmes principes qu’ils avaient tant combattus dans les spirituels et, comme ceux-ci, ils finirent hors de l’Église. Cette double défaillance a fatalement contribué à accélérer

le mouvement de relâchement c tu sous le nom de

conventualisme, dont le premier représentant est Gérard Odonis(Ott <.ira M. voir son article), successeur immédiat de Michel de Césène dans le gouvernement suprême de l’ordre. Ce que le contemporain Alvaro l’elavo, l>c plandu Ecclesise, ii, 07, éd. de Venise, 1560, fol. 167 r° (voir aussi.

nl. franc, t. ii, p. 184 ;

t. iii, p. 505) raconte à ce propos, est assez significatif.