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    1. SPIRITUELS##


SPIRITUELS. l.El/R CONDAMNATION

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devant le souverain pontife, ne put que fortement la compromettre. Aussi, parla bulle Ad nostri apostolatus, en date du 13 juillet 1313, Bullar. franc, t. v, p. 96, Clément V ordonna-t-il à l’archevêque de Cènes et aux évoques de Lucques et de Bologne de faire rentrer les fugitifs sous l’obéissance de leurs supérieurs légitimes et de restituer à l’unité de l’ordre les maisons occupées. Le prieur de Saint-Fidèle de Sienne, Bernard, fut chargé de l’exécution du décret pontifical. Le 15 février 1314, Bernard intima à trente-quatre spirituels nommément spécifiés de retourner à l’ordre dans le délai de soixante jours. Ce document a été publié par N. Papini, Notizie sicure… di S. Francesco, 2e éd., Foligno, 1924, p. 244 sq. A la même date le délégué ordonna de publier dans les églises le procès contre les fugitifs, instrument édité dans la Zeitschrifl fur Kirchengeschîchte, t. xlv, 1020, p. 221 sq. Ces injonctions axant manqué leur effet sur les coupables, le prieur Bernard, le 21 mai suivant, les excommunia et interdit les couvents occupés. Le texte de cette sentence dans Papini, loc cit., p. 253 sq. L'évêque d’Arezzo promulgua la sentence dans sa cathédrale le 29 juin 1314. Cf. U. Pasqui, Documenti per la storia délia cilla di Arezzo, t. ii, Florence, 1916, p. 528 sq.

Avant cette répression énergique voulue par Clément V, l’inquisiteur, frère Grimaldo de Prato, de concert avec l'évêque de Florence, avait déjà fait un procès aux dissidents qui, le 7 juillet 1313, protestèrent contre la sentence. Papini, loc. cit., p. 204 sq. Ne pouvant pas faire front longtemps aux deux condamnations, ils prirent le parti de fuir en Sicile, où ils avaient été précédés par un groupe qui s’y était rendu dés le commencement des troubles en Toscane. Ils y obéissaient à un certain frère Henri de Ceva et comptaient sur la protection du roi Frédéric, qui avait été sous l’influence d’Arnaud de Villanova. Ils lui présentèrent une justification de leur manière d’agir. Dans Finke, Arta Aragonensia, t. ii, p. 061 sq. D’autre part le ministre général, Alexandre d’Alexandrie, dès le 12 novembre 1313, écrivit à Jacques II. roi d’Aragon, en réclamant ses bons services auprès de son frère Frédéric, afin que ce dernier chassât les rebelles de son royaume. Jacques II, à la date du 1 lévrier 1314, lit une démarche dans ce sens, mais en vain. Les deux lettres dans Finke, loc. cit., t. ii, p. 666 sq. Les lettres de Jean XXII au roi Frédéric, 15 mars 1317, Bullar. franc, t. v, p. 110, et celles du collège des cardinaux (parmi lesquels Jacques Colonna) aux évêques de Sicile, ibid., t. v, p. 111, n. I, n’eurent pas plus de succès. Seule la mauvaise humeur des fidèles de Païenne à l'égard des schismatiques réussit à les faire partir soit en Tunisie soit en Calabre. Ibid., t. v. p. 320. Ils font dès lors partie des Fralicelles (voir l’article) condamnés par la bulle Gloriosam Ecclesiam du 23 janvier 1318, et dont on parlera ci-après.

4° Condamnation <les spirituels. — La cause des différents groupes des spirituels, qui traînait depuis des années, lut en tin terminée sous Jean XXII, qui, loin d’avoir la bienv cillance de son prédécesseur à l'égard

des rigoristes, trancha la questions ! longtemps débattue en faveur de la Communauté, c’est-à-dire de l’unité de l’ordre. Les raisons de ce changement d’altitude de la part de l’autorité suprême vis à vis des zelanli ne doivent pas être uniquement cherchées dans le tempérament du pape mais dans l'évolution même de l’idée spirituelle. Dès la fin du pontifical de Clément Y les tendances schisniatiqucs de certains zcluitti de la pauvreté franciscaine, notamment de ceux de Toscane, s'étaient manifestées ouvertement. La va

canec du Saint Siège pendant deux ans n’avait pas été de nature a faire disparaître cette tendance. Les

spirituels de Provence, de leur ciiié. fortement pro voqués par les autorités de la province, s'étaient ren dus indépendants et avaient un grand nombre d’adhérents parmi les séculiers, qui n’inspiraient guère de confiance. Dans ces conditions peu favorables, le mouvement des spirituels franciscains s’approchait de la crise finale qui devait l’anéantir.

La nouvelle action contre les dissidents fut introduite par une dénonciation de la part de l’ordre. D’accord avec Michel de Césène. Raymond de Fronsac et Bonagratia de Bergatne présentèrent dans un consistoire public une pétition dont les cinq points étaient tous dirigés contre les spirituels et leurs adhérents séculiers, les béguins. Archiv, t. iii, p. 27. Ceci eut lieu vers la fin de 1316. Bientôt après. Jean XXII cita les chefs du parti rigoriste, entre autre Ange de Clareno et L’bertin de Casale, à comparaître devant lui. Ange fut emprisonné et c’est dans sa prison qu’il composa sa fameuse Epistola excusatoria, par laquelle il se défendit vigoureusement du soupçon d’hérésie. Mis en liberté, il prit l’habit des célestins et retourna chez le cardinal Jacques Colonna. libertin de Casale. par une bulle du 1° octobre 1317, fut transféré dans l’ordre de Saint-Benoît et reçut commandement de tixer sa résidence dans le monastère de Ceinbloux en Belgique. liulltir. franc, t. v, p. 127. Il est cependant fort douteux qu’il y soit jamais allé. Dans tous les cas, en 1322. nous le trouvons à la cour d’Avignon, où il donne son avis sur la question de la pauvreté du Christ et de ses apôtres. Cf. L. Oliger, Documenta inedila ad historiam fraticellorum spectantia, Quaracchi, 1013, p. 22 sq. Enfin une bulle en date du 16 septembre 1325, Bullar. franc, t. v, p. 202, l’appelle vagabundus per mundum.

Le sort des spirituels provençaux et en général de ceux du midi de la France fut bien plus dur. Jean XXII par deux lettres pontificales du 17 avril 1317. adressées aux ofliciaux de Narbonne et de Béziers, Bullar. franc., t. v, p. 118 sq.. les cita devant son tribunal. Le 22 mai suivant, ils arrivèrent au nombre de soixantequatre à Avignon et, sans aller au couvent, restèrent toute la nuit sur le seuil de la résidence papale. Lorsque Jean XXII les reçut le lendemain en audience, le fameux frère Bernard Délicieux, qui volontairement s'était associé aux prévenus, prit la parole pour défendre la cause des spirituels. Vu son passé orageux, c'était l’homme le moins indiqué dans la circonstance. Aussi les frères de la Communauté, en rappelant au pape ses démêlés politiques et ses querelles avec les inquisiteurs dominicains, curent vite raison de lui : le pape le fit emprisonner sur le champ. Trois autres frères qui, à leur tour, tentèrent de plaider en faveur des rigoristes, n’eurent pas meilleure fortune : ils furent tous arrêtés. La niasse des spirituels l’ut dirigée dans les couvents pour être détenue, lue commission d’en quête fut nommée et la discussion de 1309-1312 recommença, mais dans une mesure plus réduite et surtout dans une atmosphère beaucoup moins favorable. L’ordre était représenté par Bonagratia et Guillaume

Astre, deux adversaires implacables des spirituels. Ehrle a publié des extraits de plusieurs réponses à Unis accusations. Archiv, t. iv, )>. 51 -63. Comme fruit de ces discussions, Jean XXII. le 7 octobre 1317. publia la

bulle Quorumdam exigit, Bullar. franc, t. v, p. 128, par laquelle il rnitigealt en quelque sorte certaines restrictions de la décrétale Exivi relatives à la pauvreté.

C'était en outre un dernier appel aux rigoristes à se soumet Ire. Grande est la pauvreté, s'écrie le pape, mais plus grande est l’intégrité », entendant par cette dernière expression la discipline et l’unité de l’ordre

franciscain. Michel de Césène, ministre général, soumit la bulle aux détenus, en leur demandant s’ils

l’acceptaient et s’ils croyaient que le pape avait le

pouvoir de légiférer eu celle matière, lue bonne moitié se soumit, tandis que vingt cinq répondirent négativement aux deux questions. Ils furent aussitôt