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STATTLER (BENOIT)

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controverses assez vives. En 1778, un » moine de la congrégation bénédictine de Bavière i (il s’appelait Frôlich et il jouera un rôle très important dans cette histoire) publie une longue lleflcxio in sic dictam Demonstrationemcatholicam… Un de ses confrères, Buz, d’autres théologiens, séculiers ceux-là, Ilerzog, Miclil, critiquent peu après les thèses de Stattler sur le pouvoir médiat du pape, le sujet de l’infaillibilité active, la réunion des protestants, etc. Le professeur d’Ingolstadt répond ; ses disciples, Neuhauser et Sailer, le soutiennent. L’année suivante, au plus fort de la campagne contre les anciens jésuites, Frôlich dénonce 51 propositions extraites des ouvrages incriminés. Déjà, selon toute vraisemblance, il a fait une démarche personnelle pour mettre l’autorité romaine en garde contre les témérités doctrinales de son adversaire. D’autre part, deux anciens jésuites, Veith et Zallinger, ont dénoncé, sans résultat, semble-t-il, son traité de l’eucharistie.

En septembre 1781, l'évoque d’Eichstatt, Raymond de Strasoldo, revoit une lettre du dominicain Mamachi, secrétaire de la Congrégation de l’Index, l’avertissant que la Demonstratio caiholica et le De locis theologicis vont être condamnés. Le décret concernant la Demonstratio est tout prêt ; on n’en a retardé la publication que par égard pour Strasoldo qui a approuvé ces ouvrages. Qu’il se hâte donc, conseille Mamachi, de retirer son approbation, et il paraîtra ainsi prévenir la condamnation au lieu d'être obligé de la ratifier. Si l’on n’a point demandé à Stattler de défendre sa Demonstratio caiholica, c’est que ce livre fourmille d’erreurs et qu’il est proprement indéfendable. On craint de plus que le subtil théologien ne cherche indéfiniment des échappatoires. Le De locis theologicis est moins mauvais ; cependant on l’a confié pour examen à un second censeur, et la condamnation n’est guère douteuse. Dans une lettre, privée jointe à ce courrier officiel, le secrétaire de l’Index recommande à son ancien élève Strasoldo de ne point essayer d’intervenir : la cause est entendue.

Le 8 octobre, l'évêque d’Eichstatt écrit au pape Pie VI. Si l’on censure à Rome les ouvrages de son prochancelier, remarque-t-il d’abord, la honte en rejaillira sur lui-même, évêque. Puis il aborde le fond de la question. Stattler, c’est entendu, rejette beaucoup d’opinions de l'École et abandonne l’ancienne méthode, mais « nous vivons en un temps OÙ tout se renouvelle, où l’on importe de France en Allemagne non seulement les costumes et les parures, mais aussi les théories ; la philosophie et la théologie anciennes sont pari oui délaissées ». On trouvera ce texte, avec beaucoup de délails sur toute l’affaire, dans l’ouvrage de Reusch, Der Index der verbotenen Bûcher, t. n b, p. 1001 sq. Cf. aussi l’article Stattler que le même auteur a donné à [' Allgemeine deulsche Biographie, t. xxxv, p. 198 506. Au reste, continue l'évêque, l’auteur de la Demonstratio n’est pas absolument un novateur ; il a eu de nom breux précurseurs parmi les théologiens fiançais et allemands, même chez les bénédictins, qui sont les seuls a l’attaquer, et cela parce que Stattler a critiqué à pin leurs reprises les privilèges des réguliers, ('-mis des doutes sur les aptitudes des moines a l’apostolat. En conséquence il serait équitable que l’on observât la procédure fixée par Benoît XIV et que l’on signalât à l’auteur les propositions qu’on lui reproche ; s’il ne peut répondre à toutes les difficultés des censeurs, il pourra du moins préparer une seconde édition corrigée OU publier un supplément rect i lieal if. SI rasoldo écrit en nu' me temps à la Congrégation de l’Index et déclare que la

condamnation des livres de stattler ne fera qu’attirer

l’attention sur ses idées. A son ancien mailre Mamachi en lin il rappelle les faveurs dont il a comble Jusqu'à le jour le couvent dominicain d’Eichstatt ; son attitude

envers ces religieux dépendra de celle de Mamachi luimême dans l’affaire Stattler.

Quels furent, parmi ces arguments dont plusieurs étaient pour le moins étranges, ceux qui arrêtèrent le procès ? Nous ne savons. Ln tout cas la condamnation fut ajournée, bien que, cette même année 1781, ait paru une seconde édition, non corrigée, de la Demonstratio caiholica.

Là-dessus, l'évêque Strasoldo meurt ; Mamachi quitte le secrétariat de l’Index pour devenir maître du Sacré-Palais ; comme tous ses collègues anciens jésuites, Stattler est privé de sa chaire et Frôlich réussit à l’y remplacer. Cela n’est pas de bon augure, mais on attendra jusqu’en 1792 une reprise de l’affaire. Mamachi vient alors de mourir. Frôlich, qui s’est rendu impossible à Ingolstadt par son mauvais caractère et sa manie de dénonciation, réside à Rome depuis un an. Est-ce lui qui dénonce de nouveau l’ancien prochancelier'? Est-ce Stattler qui se rappelle imprudemment à l’attention des autorités romaines en demandant au nonce à Munich (août 1792) de faire parvenir à Rome deux opuscules qu’il a publiés en 1 77 ( J ? En tout cas, dès février 1793, le nonce lui fait savoir que, sauf rétractation de sa part, le décret de 1780 va être publié. Stattler lui répond qu’il ne rétractera rien de ses opinions tant qu’on usera avec lui de procédés « aussi étranges ». Il remet au nonce des lettres pour le pape et la Congrégation de l’Index, où il promet de se soumettre sans réserve si le pape définit une seule proposition contraire à son enseignement. Il est si intimement persuadé, dit-il, de l’accord de sa doctrine avec l'Évangile, que seule une définition officielle, non un simple décret de l’Index, pourra le convaincre de son erreur. De nouveau, pendant près de deux ans, on n’entend parler de rien.

Soudain, en décembre 1794, communication confidentielle du premier ministre de Bavière à Stattler : une condamnation pour hérésies serait imminente. Le souverain va se trouver obligé de retirer au théologien condamné ses fonctions de censeur et de conseiller ecclésiastique ; il y aurait avantage à prévenir cet affront public par une démission. Stattler s’exécute mais avertit les évêques de Freysing et d’Eichstatt. qui intercèdent à Borne en sa faveur. Lui-même écrit au pape le Il janvier 1795. Si l’on use de tant de sévérité à son égard, observe-t-il, cela ne pourra que troubler beaucoup de bien-pensants J seuls se réjouiront ceux qui le haïssent parce qu’il a été jésuite, qui envient sa réputation ou qui se laissent conduire par un zèle mal éclairé. On a souvent appliquée la eourde Rome le dicton : bat peniam coruis, vexai censura columbas. Le mot ne s’est jamais vérifié encore sous le long règne de Pie VI ; Stattler espère bien ne pas en être le premier exemple. D estime avoir droit autant qu’un autre aux égards prescrits par Benoit XIV envers les bons catho liqucs dont les ouvrages sont déférés à l’Index.

Peu après l’infortuné théologien apprend qu’il n’a jamais été question de le condamner du chef d’hérésie, mais seulement de publier enfin le décret de 1780. Il envoie aussitôt (18 mars 1795) une longue « Explica I ion sur les deux principales propositions qui semblent avoir provoqué la censure de la Demonstratio Catho lica ». Le 9 mai suivant. Pie Y 1 écrit à l'évêque d’Eichstatt, comte de SI ubenberg, que la publication du dé (ici est de nouveau différée. Le pape envoie en même temps à l'évêque une liste de 12 propositions extraites de la Demonstratio. Si l’auteur consent a les retirer, on pourrait renoncer à publier le décret. L’examen des autres ouvrages. De huis theologicis, Theologia cliris tiana theoretica, Epistola ad ('.. F. Bahrdt, n’est pas encore achevé. Si l’on y trouve des propositions erro nées, un demandera également à Stattler de les désavouer. Quand il s’agit de questions de foi, ajoute le