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SYLLABUS. PROPOSITIONS (31-67 — ! 906

. Fortunata factl lujus- 61. Une injustice qui réustitia nullum juris sanctitati sit en fait ne porte aucun detrimentum affert. préjudice à la sainteté du

droit.

Les Piémontais, qui s'étaient emparés d’une partie des États pontificaux, voulaient amener le pape à reconnaître le fait accompli. Ils lui demandaient de déclarer publiquement qu’il cédait aux nouveaux occupants la possession de ses provinces. Parmi les raisons que l’on suggérait pour décider le pontife à prononcer les paroles attendues, on disait que le succès avait rendu cette occupation légitime. Pie IX, dans l’allocution Jamdudum cernimus, du 18 mars 1861, refusa de sanctionner ce qu’il appelait « l’enlèvement injuste » de son bien, et il condamna le principe sur lequel s’appuyaient ses adversaires ; c’est le texte de la proposition 61. Cf. pour le contexte, Recueil…, p. 438-441.

Pour les ennemis de la papauté, nulle action ne pouvait porter atteinte à un droit préexistant ; c'était la réussite qui créait le droit et légitimait l’action. Mais si l’on entend par le mot droit le pouvoir moral (ce qui est le sens vrai du terme), la proposition n’est plus condamnable ; c’est au contraire une maxime bien connue et tout à fait orthodoxe ; la violation d’un droit n’empêche pas celui-ci de subsister. Cf. L. Choupin, op. cit., p. 364-366, et généralement tous les commentaires du Syllabus qui se sont longuement arrêtés à cette proposition.

62. Proclamandum est et 62. On doit proclamer et observandum principium observer le principe qu’on quod vocant de non-interappelle : de non-intervenventu. tion.

Le pape comptait sur l’appui du gouvernement français et des nations chrétiennes pour l’aider à repousser les attaques des Piémontais, mais il se heurtait, pour l’ordinaire, à une inertie presque générale. Les alliés qu’espérait Pie IX refusaient leurs services en invoquant le principe de non-intervention. En cette circonstance, remarquait le pontife, leur inaction était coupable et le principe sur lequel ils s’appuyaient, funeste et pernicieux. En effet, disait-il, il s’agit présentement « de la violente spoliation de ce pouvoir qui a été donné au pontife romain, pour exercer avec une pleine liberté son ministère apostolique dans l'Église tout entière. Cette liberté doit assurément exciter la souveraine sollicitude de tous les princes ». La proposition est extraite de l’allocution Xovos et ante, du 28 septembre 1860. Cf. pour le contexte, Recueil…, p. 418-421.

63. Legitimis principibus 63. Il est permis de refuser obedientiam detrectare, l’obéissance aux princes légiimmo et rebellare licet. times, et même de se révolter

contre eux.

A plusieurs reprises Pie IX a rappelé le devoir d’obéissance au pouvoir légitime. Il l’a fait dans l’encyclique Qui pluribus, cf. supra, propositions 3 et 4 ; dans l’encyclique Xostis et nobiscum, du 8 décembre 1849, cf. Recueil…, p. 239 sq ; dans l’allocution Quisque l’estrum, du 4 octobre 1847, ibid., p. 197 sq ; dans la lettre apostolique Cum catholica, du 26 mars 1860, ibid., p. 401 sq. La doctrine catholique qui enseigne que i tout pouvoir vient de Dieu ajoute en effet que

celui qui résiste au pouvoir résiste à l’ordre de Dieu ». Rom., xiii, 1 sq. Sur l’obligation de la loi civile et sur l’obéissance à refuser aux lois injustes, cf. Lois, t. ix, col. 899-909.

(>t. l’uni cujusque sanctis- 64. La violation d’un ser sirni jurainent i violatio, tum ment, quelque saint qu’il

qwelibet Bcelesta llagitiosasoit, et n’importe quelle

que aclio sempiterme legi action criminelle et honteuse

repugnans, non solum haud opposée à la loi éternelle non

est improbanda, verum seulement ne doivent pas

ctiamomninolicita, snmmis- être blâmées, mais elles sont que laudibus efferenda, tout à fait licites et doivent quando id pro patriæ amore être célébrées par les plus agatur. grands éloges, quand elles

sont inspirées par l’amour de

la patrie.

Pie IX devant la révolution avait dû quitter Rome et s’enfuir à Gaète. Dans le consistoire secret tenu le 30 avril 1849, il prononçait l’allocution Quibus quanlisque ; cf. Recueil…, p. 230-231. Protestant contre les agissements de ses ennemis et plus encore contre la doctrine qui inspirait leurs actes, le souverain pontife dégageait particulièrement ce principe qui leur était cher, et qui fournit le texte de la proposition 64 du Syltabus. En aucun cas la fin ne peut justifier les moyens, c’est là un axiome fondamental de la loi naturelle.

§ 8. Errores de matrimonio § 8. Erreurs sur le mariage christiano. chrétien.

La plupart des propositions contenues dans ce paragraphe sont extraites de la lettre apostolique Ad apostolicæ Sedis, cf. supra, proposition 24 ; elles expriment les différentes erreurs professées à ce sujet par J.-N. Nuytz. Cf. Recueil…, p. 294 sq. C’est à ce document pontifical que se référeront les propositions transcrites ci-dessous sans autre indication de sources.

65. Nulla ratione ferri 65. On ne peut établir par potest Christum evexisse aucune preuve que le Christ matrimonium ad dignitatem ait élevé le mariage à la disacramenti. gnité de sacrement.

Le concile de Trente a porté l’anathème contre ceux qui nient l’institution par Jésus-Christ du sacrement de mariage. Sess. xxiv, can. 1, Denz.-Bannw., n. 971. La proposition 65, rejetant sur ce point l’autorité de l'Église enseignante, est donc strictement hérétique.

66. Matrimonii sacramen- 66. Le sacrement de matum non est nisi quid conriage n’est qu’un accessoire tractui accessorium ab eoque du contrat et peut en être separabile, ipsumque sacraséparé ; et le sacrement luimentum in una tantum nupmême ne consiste que dans tiali benedictione situm est. la seule bénédiction nuptiale.

La contre-partie de cette proposition est double. Tout d’abord, il n’existe dans le mariage des fidèles aucune distinction entre le contrat et le sacrement. C’est le contrat qui a été élevé par Notre-Seigneur à la dignité de sacrement ; on ne peut donc pas pour eux séparer ces deux actes, et c’est pourquoi le début de la proposition 66 est très justement condamné. Quant à la bénédiction nuptiale, elle ne constitue pas essentiellement le sacrement. Le prêtre est un témoin indispensable pour que le mariage soit valide ; mais ce sont les époux eux-mêmes qui sont les ministres du sacrement. Cf. pour plus de détails, sur le premier point, Mariage, t. ix, col. 2279 et 2293 sq. ; sur le second, au point de vue historique, Bénédiction nuptiale, t. ii, col. 639-644 ; au point de vue canonique, de nombreuses références dans L. Choupin, op. cit., p. 380, note.

67. Jure natures matrimo- 67. De droit naturel, le nii vinculum non est indissolien matrimonial n’est pas lubile, et in variis casibus indissoluble et en différenls divortium proprie dictum cas le divorce proprement dit auctorilate civil i sanciri popeut être sanctionné par test. l’autorité civile.

La première partie de cette proposition est condamnée parce qu’elle est opposée à l’enseignement de l'Église. Sans doute, les théologiens distinguent ici ce qu’ils appellent le droit naturel primaire et le droit naturel secondaire. Cf. S. Thomas, Sum. theol., Suppl., q. vi, a. 1 ; ils étudient dans quels cas rares et bien