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3139 SYRO-MALABARE (ÉGLISE). HIÉRARCHIE INDIGÈNE 3140

bare, enfin dotée d’une hiérarchie propre, ont été tels qu’elle n’a plus besoin de s’appuyer sur la Mésopotamie ; on pourrait envisager aujourd’hui une assistance en sens contraire, de la fille à la mère ; dès 1876, certains prêtres et religieux du Malabar, qui connaissaient la situation et les difficultés des catholiques appartenant aux provinces orientales de l’empire ottoman, s’offraient déjà pour leur venir en aide.

VI. Hiérarchie catholique indigène.

Les actes solennels par lesquels Pie XI a décidé la création des hiérarchies indigènes en Extrême-Orient et en pays noir ont fourni l’occasion d’affirmer un principe, en soi indiscutable, que chaque nation chrétienne a le droit d’être gouvernée par une hiérarchie indigène ; et beaucoup de s’indigner à propos de la situation précédente, comme si l’absence d’évêques indiens, chinois ou japonais avait été l’effet d’une aberration étrange des missionnaires latins. Mais il n’y a jamais eu d’évêque indigène au Malabar avant l’arrivée des Portugais, ni en Ethiopie avant 1929, et aujourd’hui encore certains diocèses de l’Église dissidente du Proche-Orient sont régulièrement gouvernés par des prélats hellènes, alors qu’ils sont formés à peu près exclusivement de fidèles arabophones. Le patriarche d’Alexandrie, sans aucune influence romaine, comme le catholicos de Séleucie-Ctésiphon, ont régulièrement choisi pour gouverner leurs filiales lointaines de l’Ethiopie et des Indes des personnes de leur entourage, en leur interdisant de consacrer eux-mêmes des candidats locaux.

Le premier évêque syro-malabare fut élu et consacré dans des circonstances extraordinaires, lorsque les conquérants hollandais chassèrent en quelques jours le visiteur apostolique Joseph de Sainte-Marie Sebastiani, col. 3123. Le fait que Sebastiani avait été autorisé avant son départ de Rome à consacrer, s’il en était besoin, un et même deux évêques, choisis dans les rangs du clergé local, démontre que la Propagande était dès lors acquise au principe, qui a définitivement prévalu dans ces vingt dernières années. L’expérience d’ailleurs fut favorable : non seulement Parambil Ciandi (Alexandre de Campo) réussit à défendre les fidèles qui lui avaient été confiés contre les entreprises de son ambitieux cousin Thomas de Campo, mais il réussit encore à opérer des conversions. Aussi, lorsque, appesanti par l’âge, il demanda d’avoir un eoadjuteur, c’est un syro-malabare que les quatre commissaires carmes envoyés par la S. Congrégation reçurent l’ordre de choisir. Pourquoi faut-il qu’une discussion entre eux et le vieil évêque sur la personne idoine ait interrompu si vite une lignée qui promettait ? Que de dissensions et de schismes auraient été évités ! Quoiqu’il en soit, l’habitude qu’avaient les « syriens » du Malabar de recevoir leurs évêques de Mésopotamie était si forte que, dans les siècles suivants, chaque fois qu’ils éprouvèrent des difficultés à obéir aux missionnaires latins, c’est vers Babylone qu’ils se tournèrent. Une fois seulement, après la mort prématurée de Joseph Cariatil, nommé par la reine de Portugal au siège latin de Cranganore, ils essayèrent d’obtenir soit la nomination à Lisbonne, soit la consécration par le patriarche chaldéen, de Thomas Pareamakel, devenu, bien que prêtre syro-malabare, administrateur de Parchidiocèse latin de Cranganore. Mais les aventures de Mar Rokos et de Mar Elie Mcllus démontrent la prédominance « le la tradition mésopotamienne, si humiliante qu’elle pût être.

Cependant, à partir du début du xixe siècle, le désir d’un évêque indigène ne disparut plus : en 1865, les missionnaires carmes demandaient a Rome la condamnation de certains écrits composés par l’évêque manqué Thomas Pareamakel, qui circulaient dans les chrétientés syro-malabares et y entretenaient les espé

rances qu’avaient fait naître en 1798 l’arrivée de l’évêque Cariatil. On doit signaler, au surplus, comme un acte de grande clairvoyance, que, dès 1852, un jésuite du Maduré, le P. Puccinelli, recommandait qu’on donnât au vicaire apostolique de Vérapoly un coadjuteur pour les « syriens », sans droit de succession, lequel pontifierait dans leur rit, ordonnerait leurs prêtres et aurait vis-à-vis d’eux les prérogatives normales des vicaires généraux. Mais c’est seulement après l’aventure de Mar Rokos et la conversion du cassanare Antoine Thondanatta, consacré par le patriarche nestorien, que la Propagande décida qu’il était temps d’appliquer au Malabar les dispositions du canon 9 du IVe concile du Latran pour les diocèses comprenant des fidèles de plusieurs rits : Pontifex loci catholicum prœsulem nationibus islis conjonnem provida deliberatione constituât sibi vicarium in prædictis, qui ei per omnia sit obediens et subjectus. Hefele-Leclercq, Histoire des conciles, t. v b, p. 133 sq. Conformément à l’avis du P. Puccinelli, la S. Congrégation envisageait que ce vicaire général pourrait être consacré, mais, lorsque le vicaire apostolique, Mgr Baccinelli, consulté sur l’opportunité de la mesure, interrogea ses missionnaires, il les trouva fermement opposés à toute promotion de prêtres ou de religieux indigènes : la nomination d’un vicaire général syro-malabare, même non consacré, eût été un retour à l’ancien usage de la métropolie d’Angamalé, quand l’archidiacre indigène était l’auxiliaire perpétuel du métropolite mésopotamien. Mais, si peu nombreux qu’ils fussent pour l’administration d’une chrétienté considérable, les carmes entendaient se réserver toute l’autorité. Mgr Mellano ne voulut même pas désigner un de ses confrères pour remplir vis-à-vis des « syriens » le rôle de vicaire général, ce qui eût adouci cependant une tension due pour une bonne part à sa dureté personnelle.

L’arrivée de Mar Élie Mellus devait remettre la question à l’ordre du jour ; il était bien évident que la consécration d’un évêque indigène aurait mis fin à l’intrusion des Mésopotamiens. Mais les intérêts en jeu masquaient le plus souvent les véritables conditions du problème et les discussions se multiplièrent, dont il n’importe pas d’exposer ici les détails. La solution la plus catégorique eût été de diviser le vicariat de Vérapoly en deux nouvelles circonscriptions, chacune avec son évêque, une pour les « syriens » et une pour les latins, circonscriptions qui auraient quelque peu chevauché, en raison du mélange des fidèles des deux rits dans certaines localités. La solution la plus bénigne consistait, en conservant le vicariat dans sa présente extension, à nommer un évêque pour les « syriens », lequel aurait pu, soit avoir qualité de vicaire général, soit ne posséder aucune juridiction, étant un simple évêque in pontificalibus, pour les ordinations et la pratique du rit. On envisageait d’ailleurs que l’évêque, au lieu d’être syro-malabare, pourrait dans l’une ou l’autre hypothèse être un Européen de rit latin (anglais, irlandais, français, carme, jésuite, membre de la Société des Missions étrangères de Paris), avec ou sans la faculté de célébrer dans le rit de ses nouvelles ouailles. Chacune des combinaisons permises par les groupements de ces termes eut ses partisans, qui en exaltaient les avantages, et fut examinée à Rome. Toutefois, c’est en 1877 seulement qu’on parvint à une conclusion : le 17 août, le P. Marcelin de Sainte-Thérèse (Antoine Berardi), supérieur du séminaire mixte de Puthempally, devenait coadjuteur de Mgr Mellano, avec droit de succession et la charge particulière des « syriens ». Hierarchia carmcl…, dans Anal. ord. carmel. discale, t. xiv, 1939, p. 45-48. Le choix n’était pas heureux : le nouvel élu était étroitement lié au vicaire apostolique et, comme il se savait destiné à gouverner un jour les latins du vica-