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TIMOTHÉE 1er. VIE

112’qui avait eu, suivant eux, le tort de se rallier à Timothée, Mari, loc. cit. ; ouplutôt, suivant Thomas de Marga, op. cit., éd. Bedjan, p. 201 sq., ils opposèrent à ISô’yahb, devenu récemment métropolite d’Adiabène, Roustem, évêque du petit diocèse de Hënaytâ. Joseph, invité à comparaître, pour se justifier, devant Timothée et le métropolite Grégoire, préféra dénoncer Timothée au calife. Mais Timothée avait des protecteurs ; la démarche de Joseph auprès d’al-Mahdï fut bientôt suivie de son apostasie, facilitée peut-être parce qu’il se trouva dans le même temps sous le coup d’une grave imputation de sodomie. Barhebrseus, loc. cil.

Cette défection d’un de leurs évêques affecta profondément les chrétiens et la position de Timothée s’en trouva encore plus ébranlée. Il essaya de dégager sa responsabilité en écrivant aux habitants de Gondê-Sapour, mais le métropolite Éphrem, ayant convoqué au couvent de Mar Péthion un synode qui réunit treize évêques, prononça contre Timothée une sentence de déposition. Mari, loc. cit. Timothée, appuyé par quinze évêques, répondit en déposant Éphrem et ses partisans. Le médecin chrétien du calife, Abu Qurayi’Isâ, négocia une transaction : Timothée accepta de se soumettre à un renouvellement par Éphrem du rite de l’intronisation. Le schisme avait duré deux ans. Pour empêcher le renouvellement de semblables incidents à chaque vacance du siège de Séleucie-Ctésiphon, deux canons furent rédigés, qu’on trouve avec deux autres sous le titre de « premier synode de Mar Timothée I er » dans divers manuscrits du Synodicon orientale, éd. J.-B. Chabot, texte, p. 599-603, trad., p. 603-608. D’après Ébedjésus, Timothée aurait tenu deux synodes, le premier en 790, le deuxième en 805 (174 et 189 de l’hégire), Ebediesu métro politæ Sobæ et Armeniæ collectio canonum synodicorum, tract, ix, c. vi, dans A. Maï, Scriptorum veterum nova colleclio, t. x, Rome, 1838, part. I, texte syriaque, p. 327 sq., trad. latine, p. 165 ; mais il semble bien que les deux premiers canons du « premier synode » aient été rédigés beaucoup plus tôt, dès 782 ou 783, dans un synode de la province de Séleucie-Ctésiphon, au temps de la controverse entre Éphrem et Timothée, car les signataires appartiennent tous à cette province, à l’exception du métropolite de Bassorah. O. Braun, Zwei Synoden des Katholikos Timolheos L, dans Oriens christianus, t. ii, 1902, p. 283-285.

Timothée gouverna dès lors sans trouble grave ; Salomon de Hëdatâ, lui ayant demandé pardon par lettre, se retira au monastère de Saint-Aaron. O. Braun, Der Katholikos Timotheos I. und seine Briefe, dans Oriens christianus, t. i, 1901, p. 143. D’après Mari, Éphrem de GondêSapour aurait été déposé par vengeance peu après la réconciliation, mais ce geste, que ne mentionnent pas’Amr et-Slibâ, ni aucun autre historien, n’a pas paru vraisemblable à J. Labourt, op. cit., p. 13. D’après la lettre xin citée ci-dessous, on ne peut guère douter qu’Éphrem soit mort sur son siège et que Serge ait été son successeur immédiat.

D’après Mari, op. cit., p. 75 sq., trad., p. 66 sq., ISô’barnûn, ancien condisciple de Timothée et son futur successeur, lui aurait fait opposition pendant plus de trente ans, écrivant contre lui des libelles qu’il distribuait au loin. De même Barhebrseus, Chronicon, t. iii, col. 181-184. Sa haine contre Timothée alla jusqu’à lui inspirer de supprimer dans les diptyques le nom de son prédécesseur, et ce fut seulement à la mort qu’il regretta une attitude que plusieurs membres influents de la communauté nestorienne lui avaient demandé en vain de modifier. Ibid. Aucun écho de ce différend toutefois n’apparaît dans la correspondance de Timothée, où l’on voit au contraire le catholicos désireux d’élever ISô’barnûn au siège métropolitain de Nisibe. Comme les lettres de Timo thée ne sont pas datées, ni disposées suivant l’ordre chronologique dans la collection incomplète qui nous en est parvenue, on ne sait pas à quelle époque remonte ce projet. L’opposition absolue de la communauté de Nisibe, qui menaça de passer au monophysisme sévérien et obtint un veto du calife, empêcha seule le projet d’aboutir. On peut noter à ce sujet que Gabriel devint médecin de Hârûn ar-RaSId en 805, et que les lettres xxi et xxii, où il est question du projet, sont adressées à Serge, l’ancien directeur de l’école de Basoâ, lorsqu’il était déjà métropolite d’Élam. O. Braun, Timothei patriarchse I epistolse, i, dans Corpus script. Christian, orient., Scriplores syri, sér. II, t. lxvii, p. 131-133 sq., trad., p. 88-90. D’autres détails suggèrent pour la lettre xxi une date assez basse : le catholicos y exprime le souhait de voir encore Serge avant de mourir, sachant dès lors que sa vie approche de son terme. Ibid., p. 133, trad., p. 89. Le différend entre Timothée et ISô’barnûn dut se produire après la promotion manquée, peut-être à l’occasion de celle-ci, mais il se pourrait aussi qu’il s’agisse simplement de discussions d’ordre théologique. Le récit de’Amr et-Slibâ, qui présente les événements de la même façon que Mari semble avoir conservé une meilleure leçon, car il limite à trois ans le séjour d’ISô’barnûn dans le couvent de Mar EMas à Mossoul, prolongé jusqu’à trente ans, suivant Mari. Éd. Gismondi, p. 66, trad., p. 38.

Ce qui aida Timothée à voir s’écouler sans opposition grave à peu près tout son long pontificat de 42 ans, 8 mois et 2 jours, c’est sans doute la faveur dont il jouit à la cour des califes, soit en raison de ses relations personnelles avec al-Mahdï et Hârûn ar-RaSîd, qui aimaient à s’entretenir avec lui, même de questions religieuses, soit grâce à l’influence de chrétiens haut placés, comme Abu Nûh al-Anbàrl et Gabriel bar Boktiso’. Dans sa lettre xxi à Serge, métropolite d’Élam, op. cit., p. 133, trad., p. 89, Timothée dit que Gabriel lui sert de bouclier, ainsi qu’à toute la communauté, et a obtenu en sa faveur un rescrit, criytXXiov, grâce auquel aucun fonctionnaire ne pourra l’empêcher de gouverner suivant les lois des chrétiens. Timothée eut même l’appui de Zubaydah, la femme favorite de Hârûn, qu’il aurait sauvée d’une répudiation dont elle était menacée, grâce à une de ces habiles réparties, auxquelles il dut en partie son succès auprès des grands. Mari, op. cit., p. 75, trad., p. 66 ; Labourt, op. cit., p. 33-36.

Timothée, dont le catholicosat marque probablement l’apogée, comme extension, de l’Église nestorienne, profita des bonnes dispositions des califes à son endroit pour renforcer la position de sa communauté, dont les fidèles étaient exposés en permanence à un double danger : sollicités d’embrasser l’Islam et en butte aux cabales des jacobites. Avec un sûr coup d’œil, après être arrivé au poste suprême par des manœuvres dont le moins qu’on puisse dire est qu’elles furent peu loyales, Timothée comprit que l’avenir de sa communauté dépendrait de la qualité de son clergé, et il s’occupa dès lors d’en soigner la formation avec encouragement constant des études, comme aussi de lui donner de bons chefs, des évêques et métropolites choisis avec le plus grand soin possible.

L’intérêt de Timothée ressort particulièrement des correspondances adressées à ceux de son aima mater, l’école d’Abraham le Boîteux, à BaSôS. Dans la lettre xiv, de condoléances pour la mort de Rabban Péthion, premier successeur d’Abraham, éd. Braun, p. 109-111, trad., p. 72 sq., l’éloge du maître relève à la fois sa science et sa vertu : il savait que les deux buts de l’éducation ecclésiastique sont d’instruire et de former à la piété. Que Serge, son successeur soit ferme, comme s’il se tenait sur une base de diamant ! Car de lui dé-