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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.1.djvu/592

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TOBIE. DOCTRINE, LES ANGES


se tenant devant leur souverain. Cf. I Reg., xxii, 17 ; III Reg., xii, 6, 8 ; II Par., ix, 7. L’ancienne version latine y ajoute l’entretien familier de ces esprits avec Dieu : conversamur. Cf. la mission de l’ange Gabriel qui se tient devant Dieu et est envoyé auprès de Zacharie et de Marie, Luc, i, 19, 26.

Quant au nombre sept, à maintenir dans le texte malgré son absence de la version syriaque, deux questions se posent à son sujet, celle de son origine et celle de son interprétation. On y a vu une influence directe de la religion des Perses sur le judaïsme, les sept anges du Livre de Tobie correspondraient aux sept Ameshas Spentas, les saints immortels qui forment la cour d’Ahura Mazda. Cf. J. Scheftelowitz, Die allpersische Religion und das Judentum, Giessen, 1920, p. 133 sq. ; Kautzsch, Apokryphen, t. ii, p. 250 sq. En dehors de la date incertaine de l’Avesta, il faut bien reconnaître que la prétendue correspondance entre les sept anges et les sept Ameshas Spentas ne repose sur aucune base vraiment solide. Une fois pour toutes, note le P. Lagrange, il faut répondre « que les sept Ameshas Spentas sont constamment six et non sept. On rencontre, il est vrai, ce nombre de sept, mais dans un texte qui porte la trace d’un effort pour y atteindre ; car il ne peut être réalisé qu’en comptant parmi eux Ahura Mazda dont il est dit en même temps qu’il est leur père… Et des Sémites avaient-ils besoin qu’on leur enseignât à se servir du nombre sept… En dehors du nombre il n’y a aucune relation prochaine. Les anges des Hébreux sont de grandes individualités qui ont des missions spéciales ; les Ameshas Spentas sont des abstractions qui deviennent des agents : la bonne pensée, la docilité, l’immortalité. On n’a même pas essayé de rapprocher les missions des anges des abstractions persanes ni des attributions naturelles que les Ameshas Spentas possédaient probablement auparavant . La religion des Perses, dans Revue biblique, 1904, p. 208-209. Cf. du même, Le judaïsme avant Jésus-Christ, 1931, p. 388-409.

Faut-il se tourner du côté de la religion babylonienne et voir dans les sept planètes déifiées l’exemplaire des sept anges du judaïsme, ainsi que le prétendent H. Gunkel, SchOpjung und Chaos, 1895, p. 294 sq. et A. Jeremias, Babylonisches im Neuen Testament, 1905, p. 24 sq. ? Les noms des sept anges d’après le livre d’Hénoch, xx, sont tous formés avec le nom de Dieu : Uriel, Raphaël, Raguel…, « et ils ne sont pas assimilés aux étoiles, puisque, au contraire, ce sont les sept êtres blancs qui amènent les étoiles devant Dieu pour être jugées. Hénoch, xc, 21. Les sept anges sont probablement une précision des sept lampes de Zacharie, Zach., iv, 10, expliquées comme « les yeux de Jahvé qui parcourent toute la terre » : or, il est clair que ces sept lampes sont celles du chandelier à sept branches. Zach., iv, 2. (Il est admis que l’Apocalypse de saint Jean dépend de Zacharie). Nous n’avons donc pas à chercher a Babylone. Aussi bien d’autres textes ne connaissent que quatre anges principaux, qui sont Michæl, Uriel, Raphaël, Gabriel, Hénoch, îx et x, tandis qu’Uriel est remplacé par Phanucl dans le Livre des Paraboles, Hénoch, XL, 9°. Lagrange, Le judaïsme…, p. 411. La vision d’Ezéchiel, ix-x, pourrait n’être pas étrangère non plus à la révélation des sept anges ; il y est question, en effet, d’esprits, les chérubins, au service de l ; i gloire fie Jahvé, ix, 3 ; x, 3, 7, et le nombre sept s’y retrouve quoique d’une manière obscure ainsi qu’il convient au genre de la vision, ix, 2-3. Cf. A. Miller, op. cit., p. 96. Du rapprochement suggéré avec les hauts fonctionnaires de la cour |n r sane, précisément an nombre de sept, il n’y rien à condurt. car on ne soumit y voir qu’une coïncidence

purement fortuite. I Ksdr., vii, 11 ; Est h., i, 10. Quelques commentateurs enfin ont pensé qu’il n’y avait

pas lieu de prendre à la lettre le nombre sept : ou bien il désignerait l’ensemble des anges, ou bien, par analogie avec les choses terrestres, il marquerait le nombre relativement petit des esprits supérieurs et plus parfaits ; c’est ainsi que les archanges n’apparaissent pas toujours au nombre de sept dans les livres récents, leur nombre variant entre quatre, six et sept, parfois au contraire paraît, plus considérable. Hackspill, L’angélologie juive à l’époque néo-testamentaire, dans Rev. biblique, 1902, p. 534-535.

En même temps qu’il révèle sa véritable nature, Raphaël en souligne le trait essentiel : la spiritualité ; la forme corporelle qu’il avait prise pour remplir sa mission, c’était en vision que les deux Tobie la voyaient, xii, 19 (Septante, ôpaciv). Non moins nettement marqué est le caractère de son rôle terrestre, ce n’est pas de lui-même qu’il est venu mais uniquement par la volonté de Dieu, xii, 18.

Ce que nous apprend le Livre de Tobie sur le démon Asmodée est en substance conforme à la doctrine de l’Ancien Testament, où les esprits mauvais, surtout Satan, ne sont pas inconnus. Gen., iii, 1 ; III Reg., xxii, 20-23 ; Job, i, 6-12 ; ii, 1-7 ; I Par., xxi, 1 ; cf. II Reg., xxiv, 1. Il n’en reste pas moins que plusieurs questions se posent au sujet de ce démon, plus spécialement sur son nom, son origine, son rôle et sa rélégation en Haute-Egypte.

Une question préliminaire serait à résoudre concernant l’originalité du nom et du rôle d’Asmodée dans l’histoire de Tobie. On a noté, en effet, que le nom de ce démon ne figure que deux fois dans le récit, iii, 8 et 25 (grec), et encore dans des passages de caractère rédactionnel, alors que dans le récit des événements survenus dans la maison de Raguel, le nom d’Asmodée n’est même pas mentionné. Il ne l’est pas davantage par Sara qui, dans sa prière, iii, 13-15, ne demande pas d’être délivrée du démon, ce qui pourtant pouvait sembler le plus urgent ; même silence, à cet égard, des parents de Sara. Faut-il en conclure que les éléments du livre de Tobie relatifs à Asmodée n’appartiendraient pas à la trame primitive du récit, dont ils peuvent être détachés sans nuire à l’ensemble ? Quoi qu’il en soit de la réponse à cette question, cf. A. Miller, op, cit., p. 51-52, nom et personnage d’Asmodée, attestés par l’ensemble des témoins du texte, demeurent à expliquer.

Nombreux sont les auteurs qui admettent l’origine persane du démon Asmodée, qui ne serait autre que le démon Aeshma dâeva de l’ancienne religion de l’Iran. Ainsi F. Windischmann, Zoroastriche Studien, Berlin, 1863, p. 138-147 ; A. Kohut, Die judische Angclologie und Dàmonologie in ihrer Abhângigkeit vom Parsismus, Leipzig, 1866, p. 72-80 ; J.-H. Moulton, The Iranian Rackground of Tobit, dans Expositorij Times, t. xi, p. 257-260 ; J.-H. Gray, The Meaning of the Name Asmodeus, dans Journal of the Roy. As. Soc, 1934, p. 790-792 ; Goettsberger, dans Theologischr Krtnir, t. xxxiv, 1935, p. 144-145 ; Lagrange : « NOUS sommes tout disposé, dit ce dernier, à concéder que le nom du démon Asmodée ressemble assez à celui de Aeshma qui était un dâeva ce qui a pu aboutir à la forme Acshinadâeva, qui, d’ailleurs, ne se trouve pas dans les textes. Par ailleurs le démon persan est un démon de la colère, un batailleur ; Asmodée est plutôt le démon de la luxure. La ressemblance ne va pas loin. » La Religion flrs Panas, dans Rev. bibliq., 1904, p. 210. Cf. du même. Le judaïsme avant Jésus-Christ. 1031, p. lit : ’, . Malgré

cet ensemble imposant de conclusions favorables à

l’Influence iranienne, celle-ci est loin d’être certaine. Outre l’absence « lu terme Ac bina dfteVB dans les

Gathas, c’est-à-dire la partie la plus ancienne de l’Aveata, Ifl format ion du nom d’.v modée/Aopo&ottoc, , par dérivation d’Aeshffla dâeva est peu probable, à