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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/1104

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ZWINGLI. ŒUVRES

qui ne cessa de grossir au cours de 1528 et 1529. A cela, les cinq cantons dits « forestiers », Uri, Schwytz, Unterwalden, Lucerne et Zug, répliquèrent en fondant, avec Ferdinand d’Autriche, l’Union chrétienne. Une collision était inévitable. Zwingli était plein de confiance dans le triomphe de l’ « Évangile ». Il poussait à la guerre de toutes ses forces. Elle faillit éclater en juin 1529, à propos de la nomination de l’abbé de Saint-Gall. Mais un arrangement fut conclu, le 25 juin, par la première paix de Cappel, qui était un succès pour les « réformés ». Zwingli ne connut plus de bornes à sa fierté et à son arrogance. On a une lettre de lui, de 1527, à Osiander, où il disait, dévoilant l’immensité de ses espérances : « Il ne se passera pas trois ans avant que la France, les Espagnes, l’Allemagne, l’Italie ne se joignent à nous ! » Opera, t. ix, p. 130. Les pourparlers qu’il eut à Marbourg, en 1529, avec Philippe de Hesse, lui avaient encore donné de nouvelles assurances. Il se voyait en état de tenir tête et même d’humilier « la monarchie de César », c’est-à-dire celle de Charles-Quint.

Un second conflit éclata, en 1531, entre Zurich et les cinq cantons forestiers. Les montagnards descendirent dans la plaine. La déclaration de guerre n’eut lieu que dans la nuit du 9 au 10 octobre 1531. Hâtivement, on lança, au-devant des catholiques, un corps de 1.200 hommes d’armes. Le lendemain, Il octobre, Zwingli et ses coopérateurs renforçaient le premier contingent d’un second corps à peu près égal au premier. Le choc eut lieu à Cappel, non loin de Zurich. Il fut formidable de la part des montagnards, auxquels rien ne put résister. Quand la déroute commença, Zwingli fut pris dans le remous des fuyards. Il était casqué et armé d’une épée, comme un guerrier. Blessé à la cuisse, il fut jeté à terre par un ennemi et enfin frappé à mort par un capitaine d’Unterwalden. Son corps fut reconnu le soir par les vainqueurs et coupé en quartiers pour être brûlé. Vingt-cinq ecclésiastiques, un grand nombre de conseillers et de notables zurichois, parmi lesquels le beau-fils de Zwingli, Gerold Meyer von Knonau, restaient sur le champ de bataille. La paix de Cappel, le 20 novembre, rendait l’avantage aux cantons catholiques et portait un coup très rude aux « évangéliques ». Œcolampade fut tellement abattu par cette catastrophe qu’il en mourut de chagrin, le 24 novembre. A Zurich, la succession de Zwingli fut confiée à Bullinger ; celle d’Œcolampade, à Bâle, fut donnée à Oswald Myconius. C’étaient des hommes de second plan. Le zwinglianisme ne pouvait plus que végéter, après la mort de son fondateur. L’apparition de Jean Calvin, à Genève, quelques années plus tard, put seule donner aux Églises réformées, en Suisse, une nouvelle vie et un nouveau prestige.

« Telle est la fin de la gloire qu’ils cherchaient par

leurs blasphèmes contre la Cène du Christ », s’écria Luther, en apprenant la mort de son rival et la paix humiliante que ses partisans avaient dû signer. Jusqu’à la fin de sa vie, il considéra la mort de Zwingli comme « le châtiment mérité de son orgueil incommensurable ». Lettre à Amsdorf, 28 décembre 1531, dans Luthers Briefwechsel, éd. Enders, t. ix, p. 135.


IV. Ouvrages. — Nous avons déjà donné, au mot Réforme, les aspects essentiels de la doctrine de Zwingli en parallèle avec celle des autres réformateurs. On y reviendra dans l’art. Zwinolianisme. Nous nous bornerons donc ici à énumérer les ouvrages principaux où il faut chercher sa pensée théologique, en Indiquant les caractéristiques de ces ouvrages et leur contenu.

L’'exposition et les preuves des thèses (Auslegung und Gründe der Schlussreden), 1523. — Cet ouvrage est un développement des 67 thèses publiées par Zwingli pour servir de base à la grande dispute de janvier 1523. Les thèses 1 à 15 établissent la position de l’auteur au sujet des grands sujets de la théologie

« évangélique ». En voici les plus importantes : 1. Tous

ceux qui prétendent que l’Évangile n’est rien sans l’approbation de l’Église se trompent et blasphèment Dieu. — 2. Le résumé de l’Évangile est le suivant : Notre-Seigneur, vrai Fils de Dieu, nous a révélé la volonté de son Père céleste et par son innocence nous a sauvés de la mort et réconciliés avec son Père. — 3. Cette vérité est l’unique chemin du salut pour tous les hommes, dans le passé, le présent et l’avenir. — 4. Quiconque cherche une autre voie se trompe, c’est un larron et un meurtrier des âmes. — 5. Ceux qui mettent les doctrines humaines sur le même rang que l’Évangile ou sur un rang supérieur, se trompent et ignorent la valeur de l’Évangile. — 6. Jésus-Christ est en effet le guide et le chef promis et envoyé à tout le genre humain. — 7. Il est le salut éternel de tous les croyants qui sont les membres du corps dont il est la tête. — 8. Tous ceux qui sont attachés au chef sont enfants de Dieu ; ils forment la communion des saints, Ecclesia catholica. — 9. De même que les membres ne peuvent rien sans la tête, de même, dans le corps du Christ, nul ne peut rien sans le chef. — 14. Tous les chrétiens doivent faire effort pour que l’Évangile seul soit partout prêché. — 15. Notre salut est fondé sur la foi, notre condamnation dérive de l’incrédulité ; les vérités du salut sont parfaitement claires pour la foi.

Les thèses 16 à 67 sont dirigées contre l’Église catholique, à l’exception des thèses 34 à 43, qui traitent de l’autorité. Contre l’Église, les thèses les plus marquantes sont les suivantes : 16. L’Évangile nous enseigne que les doctrines et inventions humaines sont inutiles au salut. — 17. Le Christ étant notre Grand-Prêtre, unique et éternel, ceux qui prétendent au pontificat suprême (les papes) méprisent l’autorité du Christ. — 18. Le Christ s’étant une fois donné en victime expiatoire pour les péchés de tous les croyants, il s’ensuit que la messe n’est pas un sacrifice, mais le mémorial du sacrifice éternel et tout-puissant du Christ, un gage de la rédemption que le Christ nous a acquise. — 19. Le Christ est l’unique médiateur entre Dieu et nous. — 22. Le Christ est notre justice ; donc nos œuvres ne sont bonnes qu’en tant que faites par le Christ ; en tant que nous appartenant à nous-mêmes, elles ne sont ni justes ni bonnes. — 23. Le Christ rejette la pompe et les biens de ce monde, ceux qui les convoitent sous le couvert de son nom (les évêques) le déshonorent, car ils se servent de lui pour couvrir leur avidité et leur orgueil. — 24. Le chrétien n’est astreint qu’aux œuvres ordonnées par Dieu, il est donc libre de manger les mets qu’il lui plaît ; les lettres sur le beurre et le fromage sont donc une tromperie romaine. — 25. Le temps et le lieu sont soumis aux chrétiens et non les chrétiens à eux, ce qui prouve que ceux qui s’attachent aux temps et aux lieux dérobent au chrétien sa liberté. — 26. Il n’y a rien qui déplaise tant à Dieu que l’hypocrisie, d’où il suit que tout ce qui sert à parer l’homme n’est qu’une hypocrisie, et par là tombent les soutanes, les costumes, la tonsure, etc. — 27. Tous les chrétiens sont frères et ne connaissent pas de Père sur la terre, ainsi tombent les ordres (religieux), les sectes, les bandes séparées. — 28. Tout ce que Dieu permet ou n’a pas défendu est bon ; donc le mariage convient à tous les hommes. Tous les hommes que l’on nomme ecclésiastiques pèchent si, après l’être aperçus que Dieu leur a refusé la continence complète, ils ne se marient pas. — 30. Ceux qui font vœu de chasteté ont en eux-mêmes une confiance enfantine ou folle, ce qui prouve que qui exigent de tels vœux se conduisent indignement