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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 15.2.djvu/117

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TRINITÉ. DOCUMENTS OFFICIELS

le décret d’union. Dans la bulle Lætentur qui contient le texte définitif du décret d’union, il faut distinguer deux parties : la première historique, la seconde, dogmatique. La première partie rappelle le grand bienfait du concile qui rétablit la concorde entre l’Orient et l’Occident, et elle indique en quelques phrases la raison du malentendu au sujet de la procession du Saint-Esprit : « On a cité des témoignages de l’Écriture et un grand nombre de textes tirés des saints docteurs de l’Orient et de l’Occident, dont les uns disent que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils et les autres, qu’il procède du Père par le Fils ; tous cependant voulant exprimer la même chose en des termes différents. Car les Grecs ont assuré qu’en enseignant que le Saint-Esprit procède du Père, ils ne le faisaient pas dans l’intention d’exclure le Fils, mais parce qu’il leur semblait, disaient-ils, que les Latins professaient que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils comme de deux principes et par deux spirations ; pour ce motif, ils s’abstenaient de dire que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils. Les Latins ont déclaré qu’en enseignant que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils, ils n’avaient nullement l’intention d’exclure le Père comme la source et le principe de toute divinité, savoir le Fils et le Saint-Esprit ; pas plus qu’en disant que le Saint-Esprit procède du Fils, ils ne voulaient nier que le Fils procédat du Père ; qu’enfin ils n’admettaient pas deux principes ou deux spirations, mais un seul principe et une seule spiration de l’Esprit. L’accord étant ainsi réalisé, Eugène IV en vient à la définition dogmatique :

In nomine Sanctæ Trinitatis, Patris et Filii et Spiritus Sancti, hoc sacro universali approbante Florentino concilio, distinimus, ut hæc fidei Veritas ab omnibus christianis credatur et suscipiatur, sicque omnes profiteantur, quod Spiritus Sanctus ex Pâtre et Filio aeternaliter est, et essentiam suam suumque esse subsistens habet ex Pâtre simul et Filio, et ex utroque aeternaliter tanquam ab une principio et unica spiratione procedit :
Au nom de la Sainte-Trinité, Père, Fils et Saint-Esprit, avec l’approbation de ce saint concile œcuménique de Florence, nous définissons que tous les chrétiens doivent croire, recevoir et professer cette vérité de foi, savoir que le Saint-Esprit est éternellement du Père et du Fils, qu’il tient tout ensemble du Père et du Fils son essence et son être subsistant et qu’éternellement il procède de l’un et de l’autre comme d’un seul principe et par une spiration unique.
Declarantes quod id, quod sancti Doctores et Parses dicunt, ex Patre per Filium procedere Spiritum Sanctum, ad haut intelligentiam tendit, ut per hoc significetur, Filium quoque esse secundum Græcos quidem causam, secundum Latinos vero principium subsistentiæ (ὑπάρξεως) Spiritus Sancti, sicut et Patrem.
Nous déclarons que les expressions des saints Docteurs et des Pères, affirmant que le Saint-Esprit procède du Père par le Fils, signifient que, selon les Grecs, le Fils est aussi la cause et, selon les Latins, le principe de la subsistence du Saint-Esprit, comme le Père.
Et quoniam omnia quæ Patris sunt, Pater ipse unigenito Filio suo gignendo dedit, præter esse Patrem, hoc ipsum quod Spiritus sanctus procedit ex Filio, ipse Filius a Patre aeternaliter habet, a quo etiam aeternaliter genitus est.
Et, parce qu’en engendrant son Fils, le Père lui a donné tout ce qui appartient au Père, excepté d’être Père, le Fils tient éternellement du Père, dont il a été engendré de toute éternité, cette particularité même que le Saint-Esprit procède de lui (comme il procède du Père).
Diffinimus insuper, explicationem verborum illorum « Filioque » veritatis declarandæ gratia, et imminente tune necessitate, licite ac rationabiliter Symbolo fuisse appositam.


Denz.-Bannw., n. 691.
Nous définissons en outre que l’explication apportée par ces mots Filioque pour exposer la vérité, en raison d’une nécessité urgente, a été ajoutée au Symbole d’une manière licite et raisonnable.



Le texte conciliaire peut être divisé, comme on l’a fait ici en quatre paragraphes. — Le premier est une définition de foi, promulguant comme un dogme, que le Saint-Esprit procède éternellement du Père et du Fils, comme d’un seul principe et par une unique spiration, tenant d’eux toute sa réalité essentielle et personnelle. — Le second est une simple déclaration marquant l’identité de foi chez les Orientaux et chez les Latins, malgré la différence des formules. On y trouve acceptée l’expression grecque « cause », prise comme l’équivalent de « principe ». — Le troisième consacre une raison dogmatique maintes fois apportée par les Latins en faveur du Filioque : le Père donne au Fils tout ce qu’il a, sauf la paternité ; ainsi, comme du Père procède le Saint-Esprit, ainsi du Fils le Saint-Esprit doit-il également procéder. — Enfin le texte se clôt par une définition concernant la légitimité de l’addition Filioque au symbole.

On sait combien fut fragile l’entente réalisée à Florence. Des discussions dogmatiques — qui aujourd’hui n’ont pas encore pris fin — continuèrent après le décret d’union. Voir Filioque, t. v, col. 2331-2336, ainsi que les bibliographies des art. Esprit-Saint, ibid., col. 819-829 et Filioque, col. 2342-2343, qu’on complétera, en ce qui concerne le concile de Florence, par les art. Bessarion, t. ii, col. 801 ; Marc Eugenicos, t. ix, col. 1968 sq. ; Scholarios, t. xiv, col. 1521 sq., surtout 1534-1540, 1562-1565, et par A. Touron, Hist. des hommes illustres de l’ordre de Saint-Dominique, Paris, 1746, t. iii, pour Jean de Montnoir, théologien des Latins au concile de Florence, p. 287-303 ; cf. ici Jean de Montenero, t. viii, col. 891. Pour la suite des controverses, qui dépassent le cadre de cet article, on se référera à M. Jugie, Théologia christianorum orientalium, t. ii, Paris, 1933, p. 296-536. Tous ces compléments n’ajoutent aucun progrès à la doctrine trinitaire.

2. Décret d’union pour les jacobites (4 février 1441).

Sur les préparatifs de cette union aussi éphémère que celle des Grecs, voir Ethiopie (Église d’), t. v, col. 941-942, et Florence (Concile de), t.vi, col. 47-48.

Le préambule de la bulle Cantate Domino ne renferme rien qui intéresse le dogme. Mais la partie doctrinale est un véritable résumé de la théologie catholique, où la première place est réservée au mystère de la Trinité. La partie concernant ce mystère comprend deux paragraphes, le premier consacré à l’unité de l’essence et à la trinité des personnes, le second à la circumincession et à la parfaite égalité des personnes, nonobstant l’ordre des processions.

Sacrosancta Romana Ecclesia, Domini et Salvatoris nostri voce fundata, firmiter credit, profitetur et prædicat, unum verum Deum omnipotentem, incommutabilem et aeternum, Patrem et Filium et Spiritum Sanctum, unum in essentia, trinum in personis : Patrem ingenitum, Filium ex Patre genitum, Spiritum Sanctum ex Patre et Filio procedentem.
La sacrosainte Église romaine, fondée par la parole de Notre-Seigneur et Sauveur, croit fermement, confesse et prêche qu’il y a un seul et vrai Dieu tout-puissant, immuable et éternel, Père, Fils et Saint-Esprit, un dans son essence, trine dans ses personnes. Le Père n’est pas engendré ; le Fils est engendré du Père ; le Saint-Esprit procède du Père et du Fils.
Patrem non esse Filium aut Spiritum Sanctum ; Filium non esse Patrem aut Spiritum Sanctum ; Spiritum Sanctum non esse Patrem aut Filium ; sed Pater tantum Pater est, Filius tantum Filius est, Spiritus Sanctus tantum Spiritus Sanctus est. Solus Pater de substantia gentil Filium, solus Filius de solo Patre est genitus, solus Spiritus
Le Père n’est ni le Fils ni le Saint-Esprit ; le Fils n’est ni le Père ni le Saint-Esprit ; le Saint-Esprit n’est ni le Père ni le Fils, mais le Père est seulement Père, le Fils seulement Fils, le Saint-Esprit seulement Saint-Esprit. Seul le Père a engendré de sa substance le Fils, seul le Fils est engendré du seul Père, seul le Saint-Esprit procède